texte du Carrefour
Pour clore sur une note éclatante l’édition 2012 du Carrefour, et en gage de son attachement envers le public de Québec avec qui il entretient un lien privilégié depuis bientôt 15 ans, le metteur en scène Wajdi Mouawad nous fait l’honneur de venir présenter l’intégralité de son cycle tragique Des Femmes : Les Trachiniennes, Antigone et Électre, trois des illustres tragédies du poète grec Sophocle, s’enchaîneront lors d’une unique représentation.
Trois héroïnes féminines : Déjanire la désespérée, Antigone l’insoumise, Électre la vengeresse… autant de figures de femmes rebelles malgré elles, fortes de la justesse de leurs convictions mais contraintes à ployer sous le joug des lois des hommes. Autant de paroles de résistantes traversées par la violence des passions humaines et qui, en cherchant la paix de l’âme, vivent tour à tour l’aveuglement et la révélation.
Dire que la rumeur précède l’événement relève de l’euphémisme ! Pourrait-il en être autrement, alors qu’il est ici question d’un des projets les plus fous, les plus audacieux et les plus courageux des dernières années ? Que la formidable Sylvie Drapeau nous y livre la pleine mesure de son immense talent d’interprète ? Qu’inspiré par le verbe lumineux qui éclaire les mystères des mythes de Sophocle, Mouawad a souhaité faire du cycle Des Femmes une ode à la musicalité : les textes des chœurs sont portés par une musique rock enfiévrée et magnifique, jouée en direct sur scène. Et que les dieux ébranlent le sol de Thèbes !
Près de 25 siècles ont passé depuis la création de ces tragédies, et pourtant, elles se dressent aujourd’hui devant nous, monumentales, contemporaines, toujours aussi pertinentes et criantes de vérité.
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Assistance à la mise en scène Alain Roy
Conseiller artistique François Ismert
Scénographie Emmanuel Clolus
Costumes Isabelle Larivière assistée de Cécile Recoquillon
Lumières Éric Champoux assisté de Éric Le Brec'h
Musique originale Bertrand Cantat, Bernard Falaise, Pascal Humbert, Alexander MacSween
Réalisation sonore Michel Maurer, assisté de Olivier Renet
Maquillages et coiffures Angelo Barsetti
Illustrations Sophie Jodoin
Direction de production et tournée Maryse Beauchesne
Adjointe à la production Mariane Lamarre (Québec)
Direction technique et régie lumières Eric Le Brec'h
Régie son Olivier Renet
Régie retour Eddy Josse
Régie plateau Eric Morel ou Emmanuel Cognée (Antigone : Le petit)
Habilleuse Emmanuelle Thomas
Photo Jean-Louis Fernandez
Tarif : 87$
Production Au Carré de l’Hypoténuse – France (Arnaud Antolinos),
Production déléguée Abé Carré Cé Carré – Québec (Maryse Beauchesne)
Coproduction Centre national des Arts – Théâtre français Ottawa, Théâtre Nanterre-Amandiers, Célestins Théâtre de Lyon, Théâtres départementaux de la Réunion, Mons 2015-Capitale Européenne de la Culture, Théâtre Royal de Namur, le manège.mons / Centre Dramatique, Le Grand T Nantes scène conventionnée Loire-Atlantique, Comédie de Genève, Maison de la Culture de Bourges – Scène nationale (avec le soutien du ministère de la culture et de la communication, de la région Centre, du conseil général du Cher et de la ville de Bourges), Festival d’Avignon, Festival d'Athènes dans le cadre du Réseau Kadmos, Soutien Espace Malraux Scène nationale de Chambéry, Théâtre 71 Scène nationale de Malakoff, Théâtre du Nouveau Monde (Montréal), ministère de la Culture des Communications et de la Condition féminine du Québec, Conseil des arts et des lettres du Québec, ministère des Relations internationales du Québec, Fonds franco-québécois de coopération décentralisée et Service de Coopération et d’Action culturelle du Consulat général de France à Québec, Participation Théâtre national de Toulouse Midi-Pyrénées et Délégation générale du Québec à Paris.
Wajdi Mouawad est artiste associé au Grand T.
Pavillon de la Jeunesse (ExpoCité)
250 Boulevard Wilfrid-Hamel
Billetterie : Carrefour - 418-529-1996 - 1 888 529-1996
Adresse : 369, rue de la Couronne, 4e étage, billetterie en ligne
par Chloé Legault
Premier cycle de trois que comptera le projet sophocléen de Wajdi Mouawad, Des Femmes, présenté au Pavillon de la Jeunesse d’Expocité dans le cadre du 15e Carrefour international de théâtre, regroupe Les Trachiniennes, Antigone et Électre. Plutôt que de nous livrer les textes du grand tragédien dans l’ordre chronologique, Mouawad a choisi de les regrouper de façon thématique. Le premier cycle étant celui des femmes, le deuxième celui des héros (Ajax et Œdipe Roi) et le troisième celui des mourants (Philoctète et Œdipe à Colone) ; les sept pièces seront finalement jouées dans l’ordre d’écriture en 2015, à la fin de cette longue incursion du Libano-Québécois dans l’univers de celui qui, on le sait, l’a grandement inspiré, Sophocle.
Loin de se la jouer Grèce antique, Mouawad a campé ses personnages dans des décors contemporains, très proches de ceux que l’on a pu voir dans Littoral, Incendies et Forêts. Comme c’était le cas dans la deuxième pièce du quatuor Le sang des promesses, les chaises sont des accessoires que l’on retrouve en grand nombre dans Des Femmes. Le metteur en scène a également décidé d’exploiter à nouveau des matières qu’on pourrait maintenant qualifier de fétiches chez lui : l’eau, la peinture et la terre. Leur utilisation ne semble pourtant pas toujours nécessaire, bien que les effets soient parfois très beaux, notamment avec l’eau qui tombe sur la scène comme la pluie (ce qui, bien sûr, rappelle Incendies). Si les décors ne font pas écho à ceux des Grecs, les costumes non plus. Vêtus de manière plutôt contemporaine, les personnages arborent, pour la plupart, des costumes foncés et sobres. Les seules qui font exception sont les femmes, ce qui contribue à les mettre en valeur.
Le choix qu’a fait Mouawad en ce qui a trait aux chœurs étonne, mais se justifie bien. Le son de la musique rock déstabilise au début, puis on s’y habitue et on y prend goût. Le chanteur chilien Igor Quezada interprète les musiques de Bertrand Cantat avec ses tripes. Même si l’on ne comprend pas toujours bien les paroles à cause de l’accent, ce bémol finit par devenir un atout, car son accent et sa voix tonnante et éraillée confèrent au choeur une forte sensibilité. Le mélange entre les chansons acoustiques, les chansons très rock et celles plus électro est intéressant ; elles s’amalgament aux émotions des personnages.
La distribution du cycle Des Femmes n’est pas exceptionnelle. Bien qu’aucun des comédiens ne soit médiocre, peu d’entre eux offrent des performances à couper le souffle. Mentions spéciales à Patrick Le Mauff pour son interprétation solide de Créon, à Charlotte Facet qui nous présente une Antigone de fer et à Sylvie Drapeau qui insuffle à Clytemnestre une prestance digne d’une reine.
Des Femmes est certainement une belle expérience théâtrale. Le spectacle dure plus de six heures, mais il n’est pas difficile de rester attentif et d’apprécier chacune des trois tragédies. Wajdi Mouawad confirme avec son projet sophocléen son goût pour les drames grandioses qui nous dépassent et les spectacles-événements. Nous, conquis, nous le suivons!