Coproduction du Théâtre du Nouvel-Ontario et du Théâtre de la Vieille 17, alliés de longue date, la pièce II (deux), depuis sa création en mars 2012, a été présentée en tournée au Québec, en Ontario et au Nouveau-Brunswick. Elle suscite, partout sur son passage, de vives réactions. Et dérange, avec son histoire dangereusement plausible.
À la fois huis clos et confessions parallèles, le spectacle présente, en deux temps différents, Mercier, policier canadien, la cinquantaine, sûr de lui, et Maha, sa jeune épouse, médecin, cultivée, musulmane. Mercier et Maha se révèlent tour à tour : y passe l’histoire de leur rencontre, au loin, de leur amour, malgré les différences d’âge, de culture, les réactions parfois racistes, puis carrément accusatrices après les attentats du 11 septembre 2001. Maha, qui voyage beaucoup, ne dit pas tout. Ne serait-elle pas une terroriste? Insatisfactions, omissions, doutes : les deux récits retracent le soupçon qui s’insinue et gangrène tout jusqu’au dérapage tragique, alors que se mêlent l’intime et le politique.
Le spectacle réunit l’auteur Mansel Robinson, la metteure en scène Geneviève Pineault et le comédien et traducteur Jean Marc Dalpé, tous de l’équipe du puissant Slague présenté à Québec il y a quelques années. Se joignent à eux Elkahna Talbi, connue également comme slammeuse sous le nom de Queen Ka.
D’une grande intensité, II (deux) jette au visage un tas de petites intolérances et renvoie chacun à sa réflexion. Pièce troublante et nécessaire, elle souligne les dangers toujours présents du racisme latent, de la peur de l’Autre : rien, semble-t-il, dans notre société pourtant ouverte aux immigrants, n’est jamais acquis.
Section vidéo
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Assistance à la mise en scène et régie de plateau Olivier Gaudet-Savard
Vidéo Marilyn Laflamme
Régie Olivier Gaudet-Savard, Marilyn Laflamme
Durée : 1h30
Le collectif Nous sommes ici place la relation avec le spectateur et l’expérience vécue par celui-ci au centre de ses préoccupations. Il propose cette fois un exercice qui est à la fois un défi et un jeu : vous choisissez le prix de votre billet parmi les catégories qui vous seront proposées telles que : cinéma, spectacle d’humour, billet de hockey, opéra. Vous choisissez, donc, de payer le prix que vous estimez « juste ».
Les billets peuvent être achetés et payés uniquement sur place le soir de la représentation. Considérant la formule inusitée de tarification, les rabais ne sont pas applicables, ce spectacle ne peut être inclus dans un abonnement et le Passe Orange ne sera pas accepté à la porte. Prévoir de l’argent comptant.
En parallèle
Rencontre avec l'équipe du NoShow, le mercredi 5 juin, 21h30, sur place
Production Collectif Nous sommes ici et Théâtre DuBunker
Théâtre Périscope
2, rue Crémazie Est
Billetterie : Carrefour - 418-529-1996 - 1 888 529-1996
Adresse : 369, rue de la Couronne, 4e étage, billetterie en ligne
par Francis Bernier
En cette 14e édition du Carrefour international de théâtre de Québec, le collectif Nous sommes ici et la troupe montréalaise du Théâtre du Bunker s’associent pour présenter leur plus récente création, Le NoShow un show-must-go-on à tout prix. Le spectacle avait été présenté en formule laboratoire avec comme titre LaboM lors du OFFTA et des Chantiers du Carrefour en 2011.
Le concept est original : le public fixe lui-même le prix de son billet à l’entrée de façon anonyme. Il aura le choix entre le prix d’un match de hockey, d’une entrée à l’opéra, d’un spectacle d’humour, d’un billet de cinéma ou encore celui de la messe du dimanche (dans ce cas-ci le billet ne coûte rien). On cherche ainsi à savoir à combien les gens estiment la valeur d’une oeuvre théâtrale. De cette manière, lorsque la pièce commence, on nous explique que le spectacle sera reconsidéré en fonction du montant amassé de sorte qu’on puisse payer équitablement la distribution. Le public endosse ainsi le rôle de producteur et, selon l’argent mis à sa disposition, il aura à choisir les comédiens qu’il veut voir sur scène tandis que ceux qui n’auront pas été choisis faute de moyens financiers iront faire la grève à l’extérieur pour manifester contre le manque de soutien monétaire aux artistes. Le NoShow pose la question suivante : les subventions servent-elles à financer les artistes ou bien le public?
L’idée est excellente et la question mérite qu’on s’y attarde. On démontre efficacement l’effet nocif de la précarité dans le monde théâtral. Les comédiens se mettent à nu, affichant sans masque leurs incertitudes par rapport au choix de carrière qu’ils ont fait. On est témoin de la difficulté pour l’artiste de créer avec les contraintes financières et les obstacles liés au manque de subventions dans le domaine des arts. Touchant souvent la cible, la mise en scène d’Alexandre Fecteau donne cependant l’effet d’une montagne russe tellement certains moments sont plus forts que d’autres. L’improvisation avec le public autant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la salle est surutilisée, donnant souvent lieu à des moments statiques qui manquent de rythme. L’aspect interactif, quant à lui, gagnerait à diversifier ses procédés, donnant la plupart du temps dans le déjà vu. Les comédiens offrent un jeu sans fausse note très intimiste qui constitue la principale force de la production ; certains instants sont magiques et on arrive autant à faire rire qu’à toucher le spectateur.
Les questions que pose Le NoShow sont légitimes et se doivent d’être énoncées. Quiconque veut faire du théâtre son métier reconsidérera peut-être son choix en voyant le spectacle. Une oeuvre tout à fait originale qui se démarque assurément dans la programmation du Carrefour de cette année.