Du haut de ses six ans, la petite Rosépine est bien décidée à aider son grand père Akaï à affronter les grands bouleversements environnementaux qui frappent son pays, le Japon. Ensemble, ils doivent sauver les champs de melons menacés par des tempêtes de plus en plus importantes. Elle entend au loin de mystérieux pleurs… Mais d’où viennent-ils ? Rosépine est un récit sensible et captivant, sous le signe de l’amitié et de la poésie, qui conscientise les jeunes aux enjeux planétaires actuels.
Rosépine est la toute nouvelle création du Théâtre Les Amis de Chiffon, fondée à Chicoutimi, et qui offre au jeune public des spectacles de marionnettes depuis bientôt 40 ans.
Scénographie et marionnettes : Christine Plouffe
Musique : Guillaume Thibert
Éclairage : Alexandre Nadeau
Chorégraphies : Marie-Josée Paradis
Régie : Isabeau Côté
Techniques : mixtes et masques
Durée : 55 minutes
Production Théâtre Les Amis de Chiffon (Saguenay)
par David Lefebvre
La compagnie saguenéenne Les Amis de chiffon avait l'insigne honneur de présenter sa plus récente création, Rosépine, en clôture des Trois jours de Casteliers, et ce, au grand plaisir des nombreux festivaliers. Conte écologique s’inspirant du tsunami qui a ravagé le Japon en 2011, Rosépine est l’histoire d’une petite fille de six ans qui part à la recherche de la source des pleurs qu'elle entend sans cesse, accompagnée de son amie la Nuit, prenant la forme d'une grue blanche. Laissant son grand-père s’occuper des melons du jardin, elle s’élance donc, et dans son Japon natal défiguré par une grande vague, elle rencontre un chiot orphelin, tout comme elle, un saule pleureur qui tente de l’enraciner avec lui pour qu’elle le console toute la vie, un violoniste des marais unijambiste qui ne joue que des airs tristes et la Lacrymaire, une étrange créature qui collectionne les larmes depuis le début des temps.
Sans jamais être moralisateur ou verser dans le pathos, le texte de Daniel Danis aborde les thèmes de la préservation et de la protection de l’environnement, de la nature dans toute sa beauté et toute sa force de destruction, ainsi que ses effets sur la vie des humains. La langue qu'il utilise est empreinte d'une poésie très accessible pour les enfants, se relâchant à certains moments pour laisser la place à des mots très québécois, comme « pantoute » et « bouette ». Heureusement, ces écarts ne dérangent pas l'oreille ; bien au contraire, ils rendent le propos plus sympathique. La scénographie de Christine Plouffe est ingénieusement conçue ; la scène surélevée rappelle un tatami, et, tout autour, des tiroirs insérés à la verticale dans le plancher sont soulevés pour créer des boîtes lumineuses qui représenteront les différents lieux que notre petite héroïne visitera, en plus de receler d’une multitude d'accessoires et de marionnettes. L’ensemble de la création, des robes longues ou kimonos aux masques, dont celui du grand-père, en passant par le décor et les personnages fantastiques ou réalistes, emprunte directement à la culture traditionnelle nipponne ; il n'y a que Rosépine qui incarne, pour ainsi dire, la modernité, avec ses habits colorés et lignés. Elle est magnifique et attachante, d’ailleurs, cette petite, avec ses cheveux noir de jais et sa taille frôlant celle d'un réel enfant. Les costumes agissent même comme éléments scénographiques : la robe de la Nuit, toute blanche, devient, une fois suspendue, un écran pour des jeux d’ombres représentant Rosépine qui s'amuse dans le firmament avec la Tortue roche qui pond des œufs en pierre.
Les comédiens et manipulateurs Dany Lefrançois, Patrick Simard et Caroline Tremblay, presque anonymes avec leur chapeau de paille sur la tête, savent trouver le ton juste dans leur voix ainsi que la bonne posture pour incarner les différents personnages. Leurs déplacements se font toujours à petits pas, et les transitions, tout comme les manipulations, sont tout aussi précises qu’élégantes ; rien n’est laissé au hasard. La partition musicale de Guillaume Thibert, toute orientale, ravit l’oreille et colle parfaitement à la mise en scène soignée de Marthe Adam.
À l’instar des autres spectacles des Amis de chiffon, la trame narrative de celui-ci dépasse le simple divertissement et propose une réflexion sur l'environnement, et s'approche même d'une leçon de vie. Rosépine risque de devenir un autre classique instantané de la compagnie. Quel beau risque, tout de même.