Danse en ligne
L’expérience s’annonce grisante ; vous branchez votre lecteur MP3 dans un mur où sont projetées des vidéos extraites de YouTube montrant des jeunes filles qui dansent. Et vous avez le pouvoir de les faire se trémousser au rythme que vous leur imposez. À vous les commandes !
L’artiste multimédia Grégory Chatonsky a sélectionné 157 séquences d’adolescentes qui se sont filmées dans leurs chambres en exécutant la même chorégraphie. Les visages, les costumes et les décors changent, mais les mouvements sont toujours les mêmes. Le spectateur tire les ficelles de ces marionnettes numériques. Que son choix musical soit lascif ou saccadé, elles se conforment à la cadence prescrite. Notre rapport aux nouvelles technologies et notre désir d’interférer dans le cyberespace se trouvent ici joyeusement interpelés.
Dance with Me, un espace carrément ludique où les visiteurs deviennent DJ et battent la mesure de danseuses virtuelles. Une invitation à diriger une œuvre, le temps d’une chanson.
Guilherme Botelho
Sens de la vie et danse-théâtre
Originaire de São Paulo, Guilherme Botelho tombe en amour avec la danse à 14 ans en voyant un spectacle d’Oscar Araiz. Cinq ans plus tard, il rejoint le chorégraphe argentin au Ballet du Grand Théâtre de Genève. Il y dansera 10 ans avant de fonder sa compagnie, Alias, en 1994, où il traite de grands thèmes de la condition humaine dans des chorégraphies théâtrales : quête éperdue de l’amour dans En manque, sa première création, violence conjugale, masques des apparences, manipulations génétiques dans Frankenstein… La notion de destin est présente dans son œuvre par la voie de l’accident et de choses qui tombent du ciel : eau, papier, lumière, plaques de plâtre… Ses décors sont souvent impressionnants, comme cette cabane à la dérive sur la vague immobile de Vaguement derrière, entrée au répertoire du Ballet du Tanztheater Bielefeld. Et si sa plus récente création, Jetuilnousvousils, s’inscrit dans la lignée de Sideways Rain quant à la dynamique théâtrale plus abstraite, le principe de répétition qui les caractérise était déjà à l’œuvre dans Approcher la poussière et Le poids des éponges. Auteur d’une vingtaine de chorégraphies présentées par Alias sur quatre continents, il est régulièrement sollicité par diverses compagnies. Il a notamment créé un Roméo et Juliette pour les 25 ans du Ballet junior de Genève auquel il a été associé de 2008 à 2010.
Rédaction Diane Jean
Création à Oboro, Montréal, 2007
Tarif : gratuit
Coprésentation Place des Arts
Salle d'exposition de l'espace culturel Georges-Émile-Lapalme
Place des Arts
Billetterie : FTA - 514-844-3822 / 1-866-984-3822
Quartier général FTA : 300, boul. de Maisonneuve Est
par David Lefebvre
Vous entrez dans le petit espace d’exposition Georges-Émile-Lapalme de la Place des Arts. Un petit pupitre blanc, monolithique, s’élève au centre de la place. Un fil clame votre attention : vous y branchez illico votre lecteur mp3 et vous démarrez une chanson. Sur le mur en face de vous s’agitent tout à coup des inconnues au rythme de la mélodie choisie. Vous devenez, l’espace d’un moment, le DJ de l’heure, celui ou celle qui, adulé(e), contrôle chaque déhanchement, chaque mouvement emballé, saccadé ou suggestif.
Gregory Chatonsky, concepteur de cette installation numérique « interactive » au parcours sinueux – d’abord peintre, il étudie la philosophie et les arts multimédias – désire ici « interroger notre rapport au cyberespace et aux nouvelles technologies ». Plutôt impressionnant au départ, Dance with Me plonge le participant dans une expérience ludique, durant laquelle il a le contrôle ; mais le possède-t-il réellement? Chatonsky a sélectionné 157 séquences sur YouTube d’une même chorégraphie sur laquelle se dandinent plusieurs filles, en solo ou à plusieurs, pour en choisir une trentaine, qu’il découpe en plusieurs plans pour que le mouvement puisse coller à la rythmique des chansons sélectionnées par le participant. Que ce soit du ska, du rock, du country ou du dance (j’ai personnellement choisi un remix de Sarah McLachlan et Rose Rouge de St-Germain pour l’expérience), l’effet est le même, l’illusion fonctionne et plait énormément.
Le seul bémol réside dans la qualité des images, qui sont souvent trop sombres ou trop pixelisées, en grande partie à cause de leur source. Ce petit désagrément empêche d’apprécier à sa juste valeur le travail du concepteur, et le « talent » des « performeuses » du Web, accentuant le sentiment de voyeurisme plutôt que le réel plaisir de manipuler technologiquement et musicalement ces marionnettes vivantes.
Dance with Me est à essayer à plusieurs, dans le but d’entraîner un mouvement de masse de danse, ou d’avoir simplement du plaisir entre amis.