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Festival TransAmériques - 7 et 8 juin 2017, 20h
Jusqu'où te mènera Montréal?
Théâtre
En français
Idéation et mise en scène Martin Faucher
Auteurs Marie Louise Bibish Mumbu + Sébastien David + Alexis Diamond + Anne-Marie Guilmaine + Thomas Hellman + Pierre Lefebvre + Melissa Mollen Dupuis
Interprétation Alex Bergeron + Karine Gonthier-Hyndman + Sharon Ibgui + Etienne Lou + Papy Maurice Mbwiti

Montréal, vaste cité, parfois insaisissable, souvent paradoxale, qui ne sait se brancher entre la douceur de vivre et un certain n’importe-quoi. Un territoire occupé depuis 4 000 ans par les peuples amérindiens, une ville « fondée » par les Français, conquise par les Anglais, longtemps sous l’emprise du catholicisme : Montréal grandit, se cherche, trébuche et veut s’affirmer haut et fort aux yeux d’un monde en pleine mutation. Rendons-lui hommage dans ce cabaret théâtro-littéraire-touristiquement-incorrect à la fois rêveur, rageur et jubilatoire.

Sept auteurs montréalais de tous les horizons ont arpenté pendant des semaines un quartier de cette vaste île qui ne leur était pas familier. Beaconsfield, Hochelaga-Maisonneuve, Westmount, etc. De l’immigrante congolaise à l’Autochtone, ils répondent à de malicieuses consignes d’écriture qui détournent la forme d’un guide touristique. Réflexions lapidaires, envolées poétiques, dialogues suaves et autres cartes postales insolites brossent ce portrait vivifiant et percutant d’une ville qui pourrait bien nous sembler étrangère.

Jamais Lu (Montréal)

Depuis sa fondation en 2002, le Jamais Lu se consacre à faire émerger publiquement de nouvelles écritures dramatiques en portant une attention particulière aux auteurs de la relève.


Section vidéo


Photographes Jérémie Battaglia + Kevin Calixte + Léa Castonguay
Musique live Benoit Landry + Navet Confit
Lumières, assistance à la mise en scène et régie Marie-Aube St-Amant‒Duplessis
Rédaction Paul Lefebvre
Photo Jérémie Battaglia

Durée : 2 h approx.

Création au Festival TransAmériques, Montréal, le 7 juin 2017

TERRAINS DE JEU

Films

La mémoire des anges

Mercredi 10 mai, 19 h, QG du Festival

Dans un minutieux travail d’assemblage d’archives tirées de 120 films produits par l’ONF dans les années 1950 et 1960, Luc Bourdon dépeint avec grâce un Montréal poétique d’une ère révolue. Grandes figures, gens ordinaires, lieux emblématiques ; portrait du temps qui passe.

Canada, Luc Bourdon, 2008, 1 h 20, v.o. fr.


Films

Il était une fois dans l'Est

Mardi 2 mai, 19 h, Cinémathèque québécoise

L’univers féroce de Michel Tremblay sur grand écran. Germaine Lauzon réunit chez elle parentes et amies pour coller le million de timbres-primes qu’elle a gagnés. Hosanna prépare avec fébrilité son costume de Cléopâtre pour un sordide concours de travestis. Récits croisés de réjouissances qui tournent à la tragédie.

Canada, André Brassard, 1974, 1 h 40, v.o. fr.

Un spectacle de Jamais Lu + Théâtre Aux Écuries

Coproduction Festival TransAmériques
Avec le soutien de la Fondation Cole

Présentation par Hyatt Regency Montréal en collaboration avec Société de la Place des Arts + Atelier 10
Un événement de la programmation officielle du 375e anniversaire de Montréal


FTACinquième salle
Place des Arts
Billetterie : En ligne : fta.ca
Par téléphone 514 844 3822 / 1 866 984 3822
En personne :
La Vitrine, billetterie officielle du FTA* - 2, rue Sainte-Catherine Est (métro Saint-Laurent)
*En personne, les billets pour les spectacles présentés à la Place des Arts ne sont pas en vente à La Vitrine, mais exclusivement à la PDA.

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Critique

Pour célébrer son 10e anniversaire en 2011, le Jamais Lu créait le spectacle cabaret Jusqu’où te mènera ta langue?, conçu et mis en scène par Martin Faucher, qui conviait une dizaine d’auteurs à un exercice d’écriture inspiré du célèbre questionnaire de Proust. Suivant le même principe, le Jamais Lu profite du 375e de Montréal pour célébrer la métropole en présentant Jusqu’où te mènera Montréal? Cette fois, c’est la forme racoleuse du guide touristique qui est à la base des contraintes d’écriture des auteurs montréalais Marie Louise Bibish Mumbu, Sébastien David, Alexis Diamond, Anne-Marie-Guilmaine, Thomas Hellman, Mélissa Mollen Dupuis et Pierre Lefebvre.








Crédit photos : David Ospina

S’étant fait attribuer chacun un quartier, les sept auteurs rendent compte avec une subjectivité savoureuse des multiples visages de Montréal. Si les auteurs livrent leur propre texte la majorité du temps, cinq comédiens prennent parfois le relai pour raconter certaines anecdotes ou pour faire des effets sonores en échos aux propos rapportés. Certaines des réponses des auteurs aux questions courtes que leur avait posées Martin Faucher sont d’ailleurs mentionnées pêle-mêle par les comédiens en guise de transition entre les longs témoignages des auteurs. C’est toutefois la musique de Navet Confit et Benoît Landry qui est principalement responsable de l’ambiance à la fois intime et festive du spectacle. Déjà au moment de l’entrée en salle, les musiciens répondent aux demandes spéciales des comédiens de faire une chanson sur les Bixis, ou encore sur la possibilité d’une « extension à Parc-Extension ». Puis, la musique s’efface pour se mettre au service des mots et des histoires écrits par les auteurs au courant de l’hiver et du printemps 2017.

En arpentant la mini-enclave qu’est Parc-Extension, Pierre Lefebvre découvre une multitude d’épiceries exotiques où trainent des clients habitués. Il déplore que la beauté de l’ancienne gare Jean-Talon soit altérée par les bannières des grands magasins que sont Provigo et Joe Fresh. Il critique aussi la piètre qualité des enseignes de boutiques, écrites dans un franglais incompréhensible, symptôme pour lui du rapport pathologique des Québécois avec la langue française.

Sébastien David, lui, remarque que la vie communautaire est la religion des habitants du quartier Saint-Michel. Même s’il s’inspire de ce qu’il a vu et des rencontres qu’il a faites, son récit est celui qui est raconté de la manière la plus personnelle. La description chorale que font les comédiens de l’odeur du centre de tri de la carrière Miron est franchement écoeurante. Peu après, Alex Bergeron se glisse dans la peau d’un commerçant du marché aux puces d’expérience, qui livre sa théorie sur l’achalandage des kiosques à l’échelle nationale (« parce que la tendance implicite veut que s’il n’y a personne à Saint-Michel, il n’y a personne à Toronto pis à Edmonton non plus. »), ou encore son analyse du comportement des autres marchands des stands avoisinants le sien.

De son côté, Marie Louise Bibish Mumbu décrit Westmount comme « un miroir dans lequel elle ne se voit pas » et constate avec consternation qu’elle n’y est pas la bienvenue. Heureusement qu’elle a pu faire la rencontre d’Elizabeth, une amie de la famille de Thomas Hellman, qui lui montre qu’un peu d’humanité se trouve aussi au sein de ce quartier où le revenu moyen des ménages est de près de deux millions de dollars par année.

Si Thomas Hellman décrit Villeray comme la promesse du meilleur de la vie montréalaise et comme la possibilité d’expérimenter la vie de village en ville, c’est plutôt le coin des rues Jarry et Christophe-Colomb qui fait remonter pour lui le plus d’émotions et de souvenirs. Ses rencontres avec le cordonnier, les propriétaires de l’épicerie zéro déchet et le barman de la Taverne Jarry donnent un bon aperçu de l’embourgeoisement actuel du quartier.

C’est pour comprendre qu’est-ce qu’être jeune dans une municipalité qui est « amie des aînés » qu’Anne-Marie Guilmaine s’est rendue à Beaconsfield, dans l’ouest de l’île de Montréal. Une certaine étrangeté se dégage de ce quartier exempt de déchets où tous les jeunes vont au gym et où les bacs de recyclage sont cordés au millimètre près. Au fil de ses rencontres, elle se rend compte que les adolescents du quartier acceptent avec fatalité cette vie réglée au quart de tour.

Alexis Diamond, quant à elle, a pris l’autobus 125 sur Ontario jusqu’à Hochelaga-Maisonneuve. Ses a priori ont rapidement été déjoués par l’accueil des gens du quartier et l’ambiance qui la faisait se sentir chez elle. Elle conserve un souvenir amusé de la soirée de lutte amateur ICW, à laquelle assistait des familles, des couples, des « chums de gars » et Evelyne de la Chenelière.

Puis, c’est Mélissa Mollen Dupuis qui termine ce « cabaret théâtro-littéraire-touristiquement-incorrect » en visitant le Vieux-Montréal, le quartier le plus touristique et le moins habité de la ville. Elle rappelle l’importance des Autochtones dans l’histoire du développement de Montréal, alors que les traces de leur présence ont été effacées par l’urbanisation du quartier.

Alors que les auteurs des dernières éditions de Jusqu’où te mènera ta langue? abordaient l’actualité sur un ton plus revendicateur, chaque texte agissant comme un mini éditorial, c’est plutôt la fragilité et l’émerveillement qui ressortent de cette édition spéciale de Jusqu’où te mènera Montréal? Les sept auteurs ont tous pris le temps de déambuler dans le lieu qui leur était assigné afin d’éprouver le pouls de chaque quartier, de prendre conscience des traits caractéristiques du coin et de se placer dans un état de réceptivité sensorielle aiguë. Le portrait riche et diversifié de Montréal qui en ressort est émouvant.

08-06-2017