Au cœur du Quartier des spectacles, une fougueuse escouade est sur la corde raide. Tel un chef d’orchestre, Martin Messier dirige en direct 60 danseurs professionnels dans un grand ballet de fin du monde. En spasmes ou en vagues, la masse pulse comme un seul corps, s’ouvre et se replie, fonce ou se terre. Un spectacle de danse contemporaine à ciel ouvert comme on en voit trop rarement.
Dans cet univers constellé de lumières et de pierres brille une esthétique résolument actuelle. S’y meuvent des êtres parfois masqués, aux costumes sombres. Dictés aux interprètes, les mouvements de la partition chorégraphique sont retransmis par un système de communication sans fil. S’infiltrant au creux de leurs oreilles, Martin Messier pilote une machine humaine qui s’abandonne magnifiquement à ses consignes. Comme une sculpture vivante, les corps anonymes se révèlent ni tout à fait les mêmes, ni tout à fait autres. Une danse primitive et futuriste.
Un spectacle de 14 lieux
Direction artistique et chorégraphie Martin Messier
Interprétation Élise Bergeron, Charles Brécard, Sophie Breton, Ja James Britton Johnson, Marie-Ève Carrière, Miranda Chan, Matéo Chauchat, Jimmy Chung, Émilie Demers, Kimberley de Jong, Marie-Ève Demers, Amber Downie-Back, Mark Durand, Bailey Eng, Bradley Eng, Karen Fennell, Elinor Fueter, Gina Grant, Susannah Haight, Sara Hanley, Karina Iraola, Eloï Jacques-Wood, Audray Julien, Audrée Juteau, Camille Lacelle-Wilsey, Catherine Lafleur, Patrick Lamothe, Brianna Lombardo, Chi Long, Maria Mantia Papathanasiou, Lucy May, Julien Mercille, Émilie Morin, Camille Mougenot, Gabriel Painchaud, Susan Paulson, Nickle Peace-Williams, Sébastien Provencher, Thibault Rajaofetra, Sovann Rochon-Prom Tep, Simon Renaud, Marine Rixhon, Geneviève Robitaille, Anne-Flore de Rochambeau, Elie-Anne Ross, Olivier Rousseau, Cara Roy, Silvia Sanchez, Marie-Philippe Santerre, Jessica Serli, Stefania Skoryna, Victor Sono, Melina Stinson, Camille Trudel-Vigeant, James Viveiros, Zoe Vos
Crédits supplémentaires et autres informations
Musique Paul Jebanasam, Martin Messier
Scénographie Odile Gamache
Conseil à la création et à la chorégraphie Caroline Laurin-Beaucage
Coordination artistique Ingrid Vallus
Direction de production Émilie Martel
Direction technique Olivier Chopinet, Gabriel Duquette
Sonorisation Frédéric Auger
Conception matérielle Francis Vaillancourt-Martin
Assistance à la direction de production Chloé Eker
Technique Arthur Champagne, Gabriel Duquette, Marie-Frédérique Gravel, Pierre-Alexandre Poirier-Guay
Photographie Denis Martin
Tournage vidéo Robin Pineda
Soutien au développement La Machinerie des arts
Soutien administratif Sylvie Lavoie, Ingrid Vallus
Développement Diane Boucher
Agent Marc Langlois
Photo Denis Martin
Création au Festival TransAmériques, Montréal, le 29 mai 2019
Durée 30 minutes
Vendredi 31 mai, 12 h 15, Place des Festivals / Quartier des spectacles.
Entrez dans les entrailles de la création monumentale de Martin Messier sur la place des Festivals. Par l’entremise de la technologie sans fil développée pour Innervision, l’artiste lance les consignes à l’oreille des spectateurs, lesquelles génèrent une partition chorégraphique et sonore. À vous de danser !
Expérimentation
Rédaction Diane Jean
Traduction Neil Kroetsch
Tous les textes et les informations proviennent du site fta.ca
Un spectacle de 14 lieux
Coproduction et Codiffusion Agora de la danse
Développement avec le soutien de Nouveau Chapitre
Résidences de création Quai 5160 et Église Ste-Arsène
Coprésentation Partenariat du Quartier des spectacles
Remerciements Espace Libre + Nouveau Théâtre Expérimental et Jacques Poulin-Denis
Après avoir accueilli des taupes géantes (La parade/La nuit des taupes) l’an dernier et nous avoir invités à visiter leur étrange univers brutaliste, le FTA nous plonge cette fois dans un monde aux allures futuristes avec Innervision, du musicien et chorégraphe Martin Messier.
Le cadre bétonné de la place des Festivals et les éclairages curieusement raccords par moments du Musée d’art contemporain, le long de Jeanne-Mance, offrent un cadre idéal à la performance de 30 minutes. Arrivez tôt et placez-vous dans les gradins ou du côté de la rue Balmoral pour la meilleure vue d’ensemble.
Sur place, 60 danseurs vêtus de combinaisons noires identiques exécutent une série de mouvements autour de longues tables éclairées d’une lumière crue, sans compromis. Comme des automates, les danseurs répondent sans émotion aux directives dictées dans leurs oreilles par le chef d’orchestre Messier au moyen de petits écouteurs sans fil. La machine humaine est bien huilée, les individus n’en sont que les rouages aux mouvements efficaces, calculés.
La chorégraphie de Messier, que l’artiste présente comme un « bal de fin du monde », s’illustre quand elle détraque la machine, quand, emballée, celle-ci laisse ses rouages lui échapper.
Le tableau offert par 60 danseurs presque parfaitement synchronisés impressionne forcément, mais au-delà de la performance physique et de coordination, Innervision parvient à créer le malaise. Il s’insinue peu à peu en observant ces corps « anonymisés » par la cadence mécanique qui leur est imposée. Ils se distinguent par leur silhouette et les traits uniques de leur visage, mais la machine qui les propulse inlassablement dans l’espace, sans âme ni pensée, nie leur individualité. Avec ce regard, le happening prend une tout autre dimension.
La chorégraphie de Messier, que l’artiste présente comme un « bal de fin du monde », s’illustre quand elle détraque la machine, quand, emballée, celle-ci laisse ses rouages lui échapper. Les danseurs alors semblent brièvement recouvrir un ersatz de conscience, un sens du danger proche de l’instinct de survie qui les pousse à la fuite.
Si la musique techno industrielle s’impose trop sur la trame portée par le corps des danseurs, le spectacle est malgré tout habité par les pulsations sonores et lumineuses, et les mouvements répétitifs. La partition sensorielle est intensifiée par les micros sensibles qui captent tous les sons, comme les raclements de cailloux que les danseurs frottent sur les tables et le souffle rauque qui parfois leur échappe.
On pourra sans doute regretter que la performance mise beaucoup sur l’impressionnant effet d’ensemble que crée un tel groupe de danseurs, cependant, Innervision adopte le style et le ton nécessaires pour capter l’attention des passants sur une grande place publique et les maintenir dans un état de concentration suffisant pour qu’ils apprécient non seulement la performance, mais réfléchissent aussi à sa portée.