Un spectacle de Lorganisme
Chorégraphie Catherine Gaudet
Interprétation Dany Desjardins, Francis Ducharme, Caroline Gravel, Leïla Mailly, James Phillips

Rituel cyclique

Lumière. Cinq danseurs alignés les uns à côté des autres, les yeux fermés. Ils se meuvent ensemble, avec comme seul repère la présence et la proximité des autres corps qu’ils frôlent. Progressivement, presque imperceptiblement, ils ouvrent les yeux et semblent prendre conscience de leur environnement.

Crédit photos : Mathieu Doyon

L’affadissement du merveilleux est un spectacle qui s’articule autour de la répétition cyclique, de la lenteur et d’une synergie parfaite entre les danseurs. La progression des mouvements fait en sorte de créer une transformation perpétuelle. Les interprètes jouent d’ailleurs avec l’ambiguïté de leurs intentions, passant en une fraction de seconde d’une expression de terreur à une profonde extase. Leurs corps semblent traversés par des forces extérieures et contradictoires où rire, douleur et jouissance cohabitent.

La distribution est sans faille. Chacun des interprètes possède une force brute et une sensibilité qui permet la fluidité du passage d’un état à un autre.

Pour ce nouveau spectacle, Catherine Gaudet s’en remet au pouvoir évocateur des corps. Une certaine théâtralité ressort du spectacle, que ce soit par l’évocation de pleurs de bébé ou de cris d’oiseaux, ou encore par l’expressivité du regard des interprètes. La chorégraphe a choisi de créer une pièce où les interprètes incarnent des images qui leur viennent en tête de manière détachée de tout affect et de toute situation relationnelle. Ainsi, la compréhension du spectacle passe par une série d’émotions qui se lisent dans le corps et sur le visage des danseurs. On perçoit de la tristesse, de la peur ou du dégoût, mais aussi de la joie, de la fierté et de l’excitation.

Certains passages donnent lieu à des moments absurdes ou humoristiques, notamment dans les solos. Les corps se déplacent la plupart du temps ensemble, tel un magma de chair, mais se détachent à l’occasion l’un ou l’autre des interprètes qui offre un contrepoint aux mouvements de groupes. Les cris, les gémissements, les vocalises et les respirations servent de percussions vocales qui se superposent à la musique électronique originale d’Antoine Berthiaume qui accompagne les gestes des danseurs.

Sans décor et avec pour seuls costumes des culottes unies dans un dégradé de gris bleuté, la pièce se veut épurée. L’accent est mis sur les pulsions des danseurs et sur l’expérimentation de sensations complexes qui résonnent en eux. La distribution est sans faille. Chacun des interprètes possède une force brute et une sensibilité qui permet la fluidité du passage d’un état à un autre. À d’autres moments, les mouvements amples et saccadés font en sorte de découper la musculature et l’ossature des interprètes, qui sont poussés dans leurs derniers retranchements, dans une sorte de transe rituelle.

Le spectacle se termine sur un tableau vivant, où chacun des danseurs tient la pose, l’immobilité offrant un contrepoids apaisant au cycle hypnotique et incessant qui fait la force de L’affadissement du merveilleux. Un véritable moment de grâce.