Texte : Michel Tremblay
Mise en scène : Frédéric Blanchette
Avec : Rita Lafontaine
Michel Tremblay s’exclame: “La mémoire est la mère de l’invention et la soeur aînée de l’imagination”. Aucune figure de son théâtre n’incarne cette idée avec autant d'aplomb que Nana, mère réelle et fictive de l’auteur, personnage chéri que nous retrouvons avec bonheur dans Le paradis à la fin de vos jours. Assise sur son nuage, un peu trop loin à la droite de Dieu, Nana nous parle de sa vie: la naïveté de ses enfants, les commérages de ses voisines, la bonne humeur de sa mère, son haïssable tante Amanda et l’intransigeance déplacée des curés de son temps. Et comptez sur Nana pour être comme ses histoires : plus vivante que nature !
Michel Tremblay avait présenté Nana sur scène en nous offrant la pièce Encore une fois si vous permettez pour le 30e anniversaire des Belles-Soeurs. Pour notre plus grand bonheur et à l’occasion du 40e, il n’allait pas rater la chance de nous faire réapparaître Nana, cette fois-ci dans son petit coin du paradis ! Ses histoires étonnantes ont ravis le public lors de la dernière saison et nous sommes heureux de pouvoir vous les offrir à nouveau cette année.
Équipe de production
Décor : Olivier Landreville
Costume : François Barbeau
Éclairages : André Rioux
Conception sonore : Yves Morin
Assistance à la mise en scène : Geneviève Lessard
Production Théâtre du Rideau Vert
Crédit photo : Angelo Barsetti
Salle Albert-Rousseau
2410, chemin Ste-Foy
Billetterie : 418-659-6710 - 1-877-659-6710
_____________________
Dates antérieures (entre autres)
Rideau Vert, Montréal
Du 12 août au 6 septembre 2008, 20h (samedi 16h et 20h30)
Supplémentaires 9-10-11 septembre 2008, 20h, 13 sept. 16h - 20h30
Du 11 au 29 août 2009
Salle Albert-Rousseau
20 janvier 2010
par Marie-Julie Desrochers
À l'occasion des 40 ans des Belles-Soeurs, Michel Tremblay offre à un son public un hommage magnifique, tendre salut adressé à son oeuvre et à sa mère, représentée comme toujours par Nana et incarnée une fois de plus par une Rita Lafontaine entière, touchante et spectaculaire. Malgré le propos central de la pièce, qui expose la vision désenchantée portée par Nana sur le paradis après qu'elle y ait passé 45 années et la circonstance de sa création – le double hommage, la pièce est à mille lieues d'une oeuvre nostalgique et passéiste.
Le monologue, qui dure un peu moins d'une heure vingt, porte incontestablement la signature de Michel Tremblay. Il s'agit d'un morceau (considérable) à ajouter au puzzle sans cesse grandissant de son oeuvre, morceau qui s'imbrique des les histoires déjà existantes, reprenant des mythes déjà décrits ailleurs, revenant sur des moments ayant déjà fait l'objet de récits. Le paradis, comme Les belles-soeurs, mais aussi tout ce qui se dresse entre ces deux morceaux, est un texte complètement ancré dans une situation historique, mais en même temps définitivement moderne, révélateur de réalités québécoises actuelles.
Le monologue posthume écrit d'un seul souffle par Tremblay, semble-t-il, prend parfois presque des allures de stand-up comique : les gags se suivent et Nana, bonne vivante, rieuse, se délecte des rires du public. Ce rire qui fuse de la salle à tout moment, si important pour Nana et sa mère, est toujours tendre - les réflexions de Nana, à la fois si naïves et si lucides, émeuvent. C'est d'ailleurs sur ce paradoxe opposant naïveté et lucidité que repose toute la délicatesse du propos : la critique acerbe des pouvoirs que s'octroyait la religion et ses représentants (l'humiliation des familles trop pauvres pour payer la dîme, le ridicule des béni-oui-oui se trouvant dans chaque bonne famille chrétienne) ne parviennent toujours pas à retirer à Nana ce puissant désir de croire (et de craindre) en un Dieu encore plus haut, plus Ailleurs, qui continuerait de veiller sur elle, malgré qu'il ne se soit toujours pas présenté après 45 ans au paradis.
Le paradis à la fin de vos jours est plus-que-joué par Rita Lafontaine, il est raconté, dans la pure tradition du conte québécois. La langue orale, les gestes précis et évocateurs, l'habileté démontrée par Rita Lafontaine à remplir la scène (magnifiquement jonchée, selon la mise en scène de Frédéric Blanchette, de chaises vides identifiées au nom des autres membres de la famille élargie décédés) par ses mots et l'évocation des images colorées de Tremblay en font une véritable série de contes urbains d'antan aux échos étrangement actuels.