Texte d'Éric-Emmanuel Schmitt
Mise en scène de Martin Genest
Avec Véronique Aubut, Guillaume Boisbriand, Lise Castonguay, Pierre-Yves Charbonneau, Jacques-Henri Gagnon, Marie-Ginette Guay, Linda Laplante, Valérie Laroche, Paule Savard, Alexandrine Warren
Par une étrange nuit brumeuse, dans son vieux manoir de province, la Duchesse de Vaubricourt attend avec impatience l’arrivée de tous ses invités. Quatre femmes, convoquées dans le plus grand secret et pour des raisons nébuleuses, se présentent au manoir. À peine arrivées, bien qu’étrangères les unes aux autres, elles reconnaissent toutes le portrait qui se trouve dans la pièce: Don Juan, l’homme qui les a séduites pour ensuite les abandonner. Également victime des charmes et de la trahison de ce dernier, la Duchesse de Vaubricourt a un plan. Lorsque l’accusé se présente enfin, l’homme qui se trouve devant ces dames, autrefois charmant et vivant, paraît fragile, déprimé et désabusé. À la surprise générale, il accepte sans broncher l’issue du procès et le sort que lui réservent ses anciennes flammes. Alors, le vent tourne: quel plaisir a-t-on à condamner un homme qui n’est que le pâle reflet de ce qu’il a été? Mais que s’est-il donc passé pour que le séducteur perde tout son aplomb? À leur grand étonnement, c’est ce qu’elles découvriront…
Avec La Nuit de Valognes, première pièce d’Éric-Emmanuel Schmitt, l’auteur annonce ses couleurs en dévoilant un style original qui a fait instantanément sa renommée. Brasseur d’idées, il n’hésite pas à sortir des sentiers battus et propose ici une version moderne et nuancée du mythe de Don Juan.
Scénographie: Jean Hazel
Costumes: Julie Morel
Éclairages: Caroline Ross
Musique: Stéphane Caron
Assistance à la mise en scène: Hélène Rheault
Trident - Grand Théâtre de Québec
269, boul. René-Lévesque Est
Billetterie : 418-643-8131 - 1-877-643-8131
par Isabelle Girouard
La nuit de Valognes, dernière pièce de la saison 2008-2009 au Théâtre du Trident, nous est servie comme un dessert. Il faut dire que le nom de son créateur n’est plus à faire : Éric-Emmanuel Schmitt est l’un des auteurs français actuels les plus lus et joués dans le monde. Philosophe, dramaturge, romancier et même réalisateur, il accumule les succès depuis l’écriture de cette toute première pièce en 1991. La nuit de Valognes est une reprise du mythe de Don Juan, une dernière rencontre avec ce grand séducteur tout droit issue de l’imagination de l’artiste. Drôle d’idée, penserez-vous. Pourtant, Don Juan n’est
pas la première réinterprétation des grands archétypes de notre histoire par Schmitt, ce qui témoigne de sa volonté « d’humaniser » et de rendre accessibles à tous les grands de ce monde.
On sait que la légende de Don Juan fut immortalisée la première fois par la plume de Tirso de Molina au XVIIe siècle, puis réécrite par de nombreux auteurs par la suite. Aujourd’hui c’est une rencontre bien particulière à laquelle nous convie La nuit de Valognes. Nous sommes en Normandie, dans la campagne profonde. Des femmes blessées, victimes de Don Juan, convoquent ce dernier à un grand procès où sa peine sera d’épouser la jeune Angélique, qu’il a séduite puis abandonnée. Elles désirent ainsi exercer leur vengeance en abaissant Don Juan au rang de la fidélité. Mais ce dernier, arrivant à la fin de son existence, en est dans de tout autres réflexions: quelque chose en lui s’est éteint, il est désabusé. S’ensuit alors un grand débat entre tous ces personnages réunis sur la vraie nature de l’amour.
Un somptueux tapis, quelques chaises, un parapluie, ces grandes dames et lui, le séducteur : voilà toute la scène, dans une simplicité déconcertante. Martin Genest a choisi un lieu hors du temps pour cette grande rencontre, laissant le spectateur entrer à sa guise dans cet univers tragi-comique. Mais le ton est plutôt banal dans les premiers moments, l’intrigue met du temps à s’installer on s’ennuierait certainement si ce n’était pas de l’humour flottant ici et là. Il faudra attendre la deuxième partie pour qu’émerge le sens moral de cette écriture, de cette rencontre entre le séducteur et ses anciennes victimes. Soyons patients.
Pour terminer, il faut souligner la force qui émane de ces femmes réunies sur la scène, portant leur personnage avec grâce et maturité. La présence de Marie-Ginette Guay est remarquable.