Pour survivre à l'effondrement de la démocratie, il faut faire un choix : se salir les mains ou tenter de toute son âme, d'y résister.
Inspiré de la défaite du Parti travailliste en 1992 en Angleterre, L’Absence de guerre est un texte engagé, curieux et troublant sur les élus et surtout sur nous, électeurs et citoyens, tout manipulables que nous sommes. La grande question au cœur de cette pièce : un homme peut-il être élu sans s’y perdre lui-même ? Criant d’actualité, ce texte offre aux spectateurs un accès privilégié aux coulisses de la politique d’où personne ne ressort indemne. Pour qui devrait-on voter ? Pour celui qui promet la vérité ou celui qui dit ce qu’on désire entendre ?
Section vidéo
Scénographie : Gabrielle Arsenault
Costumes : Maude Audet
Éclairages : Jean-François Labbé
Musique : Mathieu Campagna
Vidéo : Vincent Champoux et Marilyn Laflamme
Crédit photo : Hélène Bouffard et Stéphane Bourgeois / Design : diese.ca
Mardi au samedi – 20 h
Les deux derniers samedis à 16h - 23 et 30 novembre
Dimanche 16h, entre la 2e et la 3e semaine - 17 novembre
Vendredi-causerie 8 novembre
Mardi avant-scène 12 novembre (Assistez à une entrevue intimiste avec un des artistes de la production. Dès 19h15, dans le Foyer de la salle Octave-Crémazie)
Coût : entre 25$ et 45$ selon les jours et les forfaits
par Élisabeth Dugas
Le théâtre du Trident présente ces jours-ci, en collaboration avec Les Écornifleuses, Absence de guerre, de David Hare.
La pièce raconte l’histoire du chef du parti travailliste britannique, Georges Jones, et son équipe dans leur lutte contre la droite économiste, pour diriger l’État. Exposant les coulisses de la vie politique, depuis la folie du déclenchement des élections, puis pendant toute la durée d’une campagne électorale, elle démontre le travail sans relâche des partis politiques pour arriver à convaincre la population de voter pour eux. Un objectif d’autant plus difficile à atteindre, particulièrement lorsque l’homme se retrouve prisonnier de cette grosse machine dans laquelle tout mouvement est bien calculé et le naturel est étouffé.
À leur arrivée dans la salle, les spectateurs découvrent une grande scène entourée de sièges, même à l’endroit où devrait se trouver l’arrière-scène. Les gens devant se rendre dans la section opposée à l’entrée sont invités à monter sur la scène pour rejoindre leur siège de l’autre côté de la salle. À ce moment, quelques personnes portant le coquelicot rouge discutent déjà au centre de la salle. Ces dernières pourraient passer pour des spectateurs sans aucune difficulté, si ce n’était du caméraman qui les filme et des images d’eux projetées en direct sur des téléviseurs situés de chaque côté de la scène.
Après un moment, les comédiens prennent place pour assister à une cérémonie commémorative du jour du Souvenir, au cours de laquelle l’audience est priée de se lever pour observer deux minutes de silence. Un coup de feu plonge la salle dans un silence complet, jusqu'à ce que, doucement, un comédien dans la salle se mette à parler à un spectateur. Avant même le début du spectacle, le ton est donné.
Magnifiquement interprété par Normand Bissonnette, on ne peut que s’attacher au personnage de Georges Jones, un idéaliste sans grande éducation, fidèle, intègre et, avant toute chose, humain. Le comédien nous offre ici une prestation sans fausse note, parfaitement dosée et pleine d’authenticité. Sa superbe présence sur scène, particulièrement lors des moments les plus dramatiques, est à en faire dresser les poils sur les bras.
Pour ce qui est du reste de la distribution, le niveau de jeu est généralement excellent. Au cours de leur long périple électoral, chacun des personnages clés de l’entourage de Georges Jones vit un moment plus éprouvant, ce qui permet à certains comédiens, dont Israël Gamache, Vincent Champoux, Jean-Michel Déry, Marie-Hélène Lalande, Joanie Lehoux et Jessica Ruel-Thériault, de se démarquer. Le seul bémol, côté jeu, vient malheureusement de Laurie-Ève Gagnon dans le rôle de Lindsay Fontaine. Son interprétation offre peu de variations, certaines émotions manquent de profondeur et le ton qui sonne souvent faux.
Avec cette mise en scène impeccable, où le moindre détail est pensé et rien n’est laissé au hasard, Édith Patenaude a su rendre justice à toute la puissance du texte de David Hare. Avec les nombreux changements de décor, effets sonores et visuels parfaitement adaptés à chaque circonstance et la performance des comédiens, la mise en scène est complète, sans faille. Tout est réglé au quart de tour.
L’utilisation de capsules vidéo pour simuler des conférences de presse et de la caméra tout au long de la pièce, spécialement lors de l’entrevue télévisuelle, ajoute une seconde dimension très intéressante à l’action qui se déroule sous nos yeux et dans les coulisses.
La scène finale, un an plus tard au jour du Souvenir, est tout simplement superbe, avec une image très forte de Georges Jones seul, brisé, nostalgique, marchant sur des feuilles mortes vers la seule lumière qui l’éclaire encore.
Cette pièce est réellement un bijou de mise en scène. À voir absolument.