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Le cercle de craie caucasien
Du 17 septembre au 12 octobre 2019
Supplémentaire 8 octobre 2019 à 19h30

En plein coup d’État, Groucha prend dans ses bras un poupon laissé à l’abandon. Elle n’a pas la fibre maternelle particulièrement développée, mais pour elle, il s’agit de la seule chose sensée à faire. Et dans le monde où elle évolue, sa conception du bon sens et du bien commun ne semble pas avoir d’écho. Elle devient la protagoniste d’une véritable épopée qui révèlera le meilleur et le pire de l’être humain.

Bertolt Brecht

Poète, auteur dramatique, metteur en scène et théoricien du théâtre, les œuvres et les idées de Bertholt Brecht ont marqué profondément le théâtre du XXe siècle et son influence se fait encore sentir aujourd’hui. En voulant rompre avec l’illusion théâtrale et pousser à la réflexion, il créé un théâtre qui provoque chez le spectateur un regard critique sur le monde. Il propose un théâtre épique, qui tient davantage du récit que du suspense dramatique, tout en suivant les évolutions d’une histoire dont il tient toujours compte. Mobilisé à la fin de la Première Guerre mondiale comme infirmier, l'horreur de la guerre a une grande influence sur lui. Ses trois premières œuvres révèlent son côté anarchiste. Ces œuvres provoquent une polémique, jusqu'à ce qu'il crée L'Opéra de quat'sous (musique de Kurt Weill), un des plus grands succès théâtraux de la république de Weimar. Devenu marxiste vers 1930, il est chassé de l’Allemange par les nazis en 1933. L'œuvre de Brecht est interdite et brûlée lors de l'autodafé du 10 mai de cette même année. Il parcourt l’Europe pour finalement s’installer en Californie en 1941. C’est durant cette période qu’il écrit la plus grande partie de son œuvre, de très grandes pièces qui sont propulsées par ses recherches théoriques sur la distanciation, mais qui les dépassent, dont Mère Courage et ses enfants, La Vie de Galilée, La Bonne Âme du Se-Tchouan, Le Cercle de craie caucasien et La Résistible Ascension d’Arturo Ui.


De Bertolt Brecht, pièce créée en collaboration avec Paul Dessau
Traduction de l'allemand par François Rey et Violaine Schwartz
Mise en scène d'Olivier Normand
Avec Jean-Michel Girouard, Jocelyn Paré, Anne-Marie Côté, Steve Hamel, Josué Beaucage, Mary-Lee Picknell, Jonathan Gagnon, Valérie Laroche, Emmanuel Bédard, Monika Pilon, Israël Gamache, Nicolas Létourneau, Maude Boutin St-Pierre, Sophie Thibeault


Crédits supplémentaires et autres informations

Musique Josué Beaucage
Scénographie Véronique Bertrand
Conseiller dramaturgique Patrick Dupuis
Costumes Virginie Leclerc
Accessoires Amélie Trépanier

Mardis et mercredi 19h30, jeudis au samedis 20h, dimanches à 15h et les deux derniers samedis à 16h

Durée : à venir

Mardi au dimanche
Adulte 52$
Ainés* 46$
35 ans et moins 52$
Étudiants** 39$

*Sur présentation d'une carte d'identité au moment de l'achat.
** Sur présentation d'une carte étudiante au moment de l'achat.
Les taxes sont incluses dans les prix affichés ainsi que les frais de service variant de 4 $ à 5,50 $ par billet.

Production Le Trident


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Critique disponible
            
Critique







Crédit photos : Stéphane Bourgeois & Catherine Tetreault

C’est à la fin de la Seconde Guerre mondiale, en 1945, que le dramaturge allemand Bertolt Brecht écrit le récit épique du Cercle de craie caucasien. La réflexion de l’auteur, quant à la vie en société et aux responsabilités qui en découlent, reste tout aussi pertinente en cette année 2019. L’œuvre remaniée et présentée par le Trident critique, avec un soupçon d’ironie, les débats sur l’appartenance des choses, lesquels deviennent souvent ridiculement hargneux et haineux, comme on peut le constater avec les enjeux actuels liés à l’immigration et à l’appropriation culturelle.

Dans cette production signée Olivier Normand (Figurec, Le songe d’une nuit d’été), le grotesque loufoque du texte original est accentué par divers éléments scénographiques : des maquillages exagérés et des mimiques extravagantes, tous attribués, d’ailleurs, aux personnages issus du milieu bourgeois. La pièce déborde d’anachronismes incorporés avec soin, principalement d’habits tirés de notre époque – les soldats portent fièrement l’armure des unités spéciales antiémeute de la police – ou de coiffures extravagantes – comme la couleur de cheveux des avocates, en fin de parcours. Par contre, le choix de la chevelure rouge flamboyant pour Groucha (Anne-Marie Côté), le personnage principal de la pièce, peut plaire ou déplaire, mais s’avère difficile à saisir : en tant que servante, elle n’appartient pas vraiment à la bourgeoisie, même si elle la côtoie. Voulait-on démontrer qu’elle était prédestinée à s’occuper d’un prince ? Son état d’équilibre précaire entre deux mondes bien distincts de la société ? Une simple marque esthétique ?

La force principale de cette relecture du Cercle de craie caucasien se trouve dans la prégnance des émotions qu’elle provoque et dans son habileté à soulever l’importance contemporaine du propos de Brecht...

Bien que l’équipe de conception ait travaillé à rendre le récit plus limpide (tel que le mentionne Olivier Normand dans le programme de la pièce), il reste néanmoins quelques interactions nébuleuses, dont la rencontre entre Groucha et son amoureux Simon Chachava (Nicolas Létourneau), au tout début du spectacle. Le jeu des deux acteurs n’arrive pas à rendre nettes la complicité et la relation intime des deux personnages. Leurs taquineries bon enfant et l’absence de tendresse ne permettent aucunement de sentir la drague ou l’attraction réciproque que l’on retrouve au cœur des répliques. Cela dit, Anne-Marie Côté incarne la simplicité et la pureté de Groucha avec brio, malgré les quelques difficultés à conserver un registre langagier cohérent, parfois plus québécois, parfois plus normatif. Tous les comédiens de la distribution (ils sont 13 sur scène) nous prouvent encore une fois qu’ils débordent de talent de par leur jeu juste et leurs personnages habilement campés. Mentions spéciales à Mary-Lee Picknell qui joue une exquise Natella Abashvili et à Jocelyn Paré pour la riche authenticité qui ressort de ses personnages (soit l’aide de camp et Laurenti).

Tout au long de l’épopée, le vaste espace de la salle se voit judicieusement utilisé ; le décor graveleux, en pente, ainsi que les bandes de tissus translucides suspendues et déplacées grâce à un système sur roulettes marquent divers lieux, permettant d’imager facilement les énormes distances que le personnage principal doit parcourir pour sa survie et celle du petit Michel. Fait original, une passerelle est installée en plein centre de la salle, la séparant en deux au milieu, reliant la régie à la scène, est superbement utilisée et inclut les spectateurs dans l’action.

L’ambiance musicale composée par Josué Beaucage ajoute énormément à la pièce, agissant comme un second degré de narration. Les sons de synthétiseur et de percussions font ressentir au spectateur une profonde tension dramatique, spécifiquement lors des scènes plus chaotiques ou de poursuites. Les jeux d’ombres et de lumières créent aussi un puissant esthétisme poétique ; la mise en scène d’une rangée de silhouettes sur fond d’éclairage rouge magnifie l’oppression et le stress que subit Groucha face aux individus concernés dans sa quête.

La force principale de cette relecture du Cercle de craie caucasien se trouve dans la prégnance des émotions qu’elle provoque et dans son habileté à soulever l’importance contemporaine du propos de Brecht – malgré une finale très goldonienne ou moliéresque, où tout s’arrange presque par magie. Olivier Normand rend justice au texte en insistant sur la bonté simple de Groucha qui rappelle les valeurs humanistes de l’entraide et la beauté des actes qui en découle.

24-09-2019


Théâtre du Trident
269, boul. René-Lévesque Est
Billetterie : 418-643-8131 - 1-877-643-8131

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