7 à 11 ans
Texte : André Jean
Mise en scène : Carol Cassistat
Interprètes : Patrick Ouellet et Irène Seyes
Les dons d’Amandine, femme de chambre immigrée d’Haïti, apaisante et fort sympathique, permettent à Rémi de trouver la clé manquante à son invention : le « Globophone », capable, selon lui, de reproduire tous les sons de la terre. Une rencontre d’exception qui permet d’apprivoiser le silence.
Concepteurs visuels et sonores : Nicolas Dostie, Félix Bernier-Guimont, Vano Hotton, Katia Talbot, Fabrice Tremblay et Geneviève Tremblay
Durée du spectacle : environ 60 minutes
Production du Théâtre du Gros Mécano (Québec)
En coproduction avec L’Atrium de Chaville (France) (Québec)
Les Gros Becs
1143, rue Saint-Jean
Billetterie : 418-522-7880 poste 1
par Charlotte Riondel
Une nouvelle fois, le Théâtre du Gros Mécano invite petits et grands à partager un beau moment de théâtre avec sa nouvelle création Prière de ne pas déranger, écrite par André Jean, dans une mise en scène de Carol Cassistat avec Patrick Ouellet et Irène Seye.
C’est bientôt le grand jour pour Rémi Samson ! Enfin, il va présenter au grand jury des brevets son globophone, une machine capable de reproduire tous les sons de la terre. La veille de la présentation de son invention, le jeune homme se retrouve à l’hôtel d’une grande ville où il fait la rencontre d’Amandine, la femme de chambre haïtienne. Celle-ci a un don particulier : elle est capable de lire les rêves des gens en écoutant leur oreiller… Avec son aide, Rémi plongera dans ses souvenirs les plus douloureux afin de trouver les sons qui lui manquent pour compléter son invention, des sons oubliés, enfouis au plus profond de lui-même et qu’il a peur de réveiller.
Avec Prière de ne pas déranger, les artistes nous font naviguer entre rêve et réalité, entre l’enfance douce et magique et la difficulté de devenir adulte et d’affronter les souffrances passées. La poésie de la mise en scène se mélange au réalisme du propos pour offrir au spectateur un cocktail à la fois très esthétique et plein de profondeur. Le texte d’André Jean est soutenu, riche et bien écrit. Idéal pour des enfants d’une dizaine d’années, mais peut-être un peu chargé pour un public plus jeune qu’il faut réussir à garder attentif pendant une heure. Une grande part du spectacle réside dans le dialogue, ce qui fait parfois perdre une part de l’univers du personnage de Rémi qui pourrait être mis encore plus en valeur. En effet, le jeu clownesque de Patrick Ouellet donne le ton du personnage qui est encore un grand enfant au début du spectacle et qui, peu à peu, devient adulte. Il y a un contraste très intéressant dans le jeu des comédiens. Alors que le personnage de Rémi (Patrick Ouellet) est marqué d’un jeu plus caricatural, corporel, voire acrobatique, le personnage d’Amandine (Irène Seye) est plus mature et interprété de façon plutôt réaliste et posée. Cette différence prend tout son sens, puisque la jeune femme permet à Rémi d’accepter le monde des adultes en mettant un terme à ses blocages d’enfant. C’est dans une belle complicité franco-québécoise (Prière de ne pas déranger est une coproduction entre le Théâtre du Gros Mécano – Québec – et l’Atrium de Chaville – France) que les deux comédiens nous permettent de voyager avec eux dans la chambre d’hôtel. Le public est invité à vivre dans un univers sensoriel qui passe beaucoup par l’univers sonore, puisque le personnage de Rémi a peur du silence et comble son existence avec les bruits qu’il trouve partout dans le monde. Cet univers est chargé et explosif, tout comme le sont le globophone et son inventeur. Le spectateur se laisse d’abord emporter dans un tourbillon de sonorités diverses en suivant les émotions de Rémi qui, avec l’aide de Mme Amandine, finira par apprivoiser le silence. Ce silence qui fait parfois si peur, mais qu’il faut savoir apprécier pour grandir.
Le décor, les costumes et les éclairages colorés nous donnent l’impression de naviguer dans un univers de bande dessinée. Ainsi, les deux personnages évoluent dans une chambre d’hôtel aux couleurs chaudes et rassurantes, à l’instar de Mme Amandine. Dans ce cocon-là, tout est possible. Ces choix visuels permettent d’attirer l’attention des jeunes spectateurs qui se reconnaissent dans cette chambre d’hôtel qui ressemble à leur chambre d’enfant. La conception vidéo de Marilyn Laflamme et Jocelyn Langlois appuie également cette esthétique de dessin animé en nous transportant soit dans les souvenirs de Rémi, soit l’autre côté du tableau, là où l’imaginaire prend toute sa place. Les projections s’intègrent avec justesse dans la mise en scène et sont bien complétées par un éclairage efficace qui ajoute de la profondeur au propos des personnages.
En allant voir Prière de ne pas déranger, on se laisse emporter par la poésie de l’image et des sons et par la sensibilité des personnages… il suffit parfois de faire silence.