Le coeur en hiver, c’est l’histoire de la petite Gerda qui part à la recherche de Kay, son ami disparu. Sur la route, aventures et embûches mettront son courage et sa détermination à l’épreuve. Elle retrouvera finalement son ami auprès de la Reine des neiges, le coeur glacé, apaisé par un froid qui a tout gelé, ses joies comme ses peines. Gerda parviendra-t-elle à le convaincre de laisser fondre son coeur ?
La pièce interroge notre manière de réagir devant les difficultés qu’impose l’existence. Il s’agit d’un spectacle touchant et plein de vigueur qui nous réserve des surprises étonnantes et complexes, tout comme la vie.
Le Théâtre de l’OEil a réuni une équipe intergénérationnelle pour cette nouvelle création. L’auteur, Étienne Lepage, revisite un vieux conte et en redessine les contours. Avec les marionnettes, la jeune metteure en scène Catherine Vidal développe les images créées par Richard Lacroix. La grande expertise des marionnettistes du Théâtre de l’OEil en font un spectacle qui éblouira une fois de plus l’imaginaire des jeunes spectateurs. Magique !
Section vidéo
Scénographie et marionnettes : Richard Lacroix
Conception sonore : Francis Rossignol
Éclairages : Alexandre Pilon-Guay
Conseiller artistique : André Laliberté
Illustration : Richard Lacroix
Durée 55 minutes
Article dans la revue Marionnettes (PDF)
Production Théâtre de l'Oeil (Montréal)
Alors que l’arrivée des premiers vrais froids se fait attendre, le Théâtre de l’Oeil présente ces jours-ci aux Gros Becs un conte qui saura réchauffer bien des cœurs d’enfant... et de grands!
Les enfants connaissent à présent tous la Reine des neiges, revisitée et rendue mondialement célèbre par le grand succès de Disney, mais le Théâtre de l’Oeil et l’auteur Étienne Lepage sont, eux, retournés au conte écrit par Hans Christian Andersen pour nous en offrir une version colorée qui n’en garde par moins son aspect un peu inquiétant et ses moments de cruauté… comme la vie!
Gerda et Kay sont heureux comme des enfants pauvres ignorant qu’ils sont pauvres, mais qui savent apprécier les petites joies qui les entourent, même ce rosier qui pique les doigts. Mais un soir de tempête de neige, Kay se retrouve dehors sans manteau et croise la route de la Reine des neiges, celle qu’on doit tous rencontrer un jour ou l’autre. D’un grand coup de froid, Kay sent sont cœur geler et accepte de suivre la reine au cœur de l’hiver pour ne plus jamais avoir froid.
À son habitude, le Théâtre de l’Oeil déploie sa fine magie sur scène avec une ribambelle de marionnettes adorables, signées Richard Lacroix (aussi à la scénographie). Gerda et Kay sont particulièrement attachants, eux qui empruntent quelques traits à leurs interprètes, excellents Pierre-Louis Renaud et Karine Sauvé. Celle-ci, dont on avait pu apprécier l’énergie dans Les grands-mères mortes aux Écuries la dernière saison, insuffle une grande vivacité à sa Gerda. La fillette aux boucles blondes pose un regard émerveillé sur le monde qui l’entoure et les personnes qu’elle rencontre dans son voyage. Sa naïveté même est charmante, soulignée par un habile coup de plume d’Étienne Lepage et par l’interprétation ingénue de la comédienne.
Les irrésistibles créatures du Cœur en hiver viennent peupler les paysages du conte, joliment éclairés par Alexandre Pilon-Guay. Le plateau tournant sur lequel sont montés les décors dévoile de nombreuses surprises au public pendant la quête de Gerda. Une colline de déchets se transforme ainsi en robe fleurie de magicienne, une montagne de neige cache un vieil ermite, et une rivière maligne s’étale de tout son long, telle une sirène… Idée ingénieuse aussi que de ne jamais montrer la Reine des neiges dans cette production ; les enfants l’avouent d’emblée en quittant la salle, ils l’auront tout de même imaginée sous les traits que lui ont donnés les studios Disney. La metteure en scène Catherine Vidal évite l’écueil en ne faisant qu’entendre la voix de la reine et accentue ainsi l’aura de mystère l’entourant, elle qui n’est finalement ni tout à fait méchante, ni tout à fait gentille, mais seulement égale à la nature de l’hiver (et de la vie?).
Le texte de Lepage mise avant tout sur une narration forte, en totale complicité avec le jeune public, et multiplie les adresses et les clins d’œil pleins d’humour. Et ça fonctionne à merveille, bien que certaines répétitions finissent par agacer. Lepage, qui avoue ne pas avoir écrit cette histoire en pensant aux enfants ou même à la marionnette, a lancé de beaux défis à la metteure en scène. La narration, assurée par plusieurs personnages et par les acteurs eux-mêmes (qui se font à l’occasion promptement chasser de scène) offre plusieurs échanges franchement drôles, mais aussi des moments de réflexion plus denses sur la détermination et le courage de faire ses propres choix pour soi.
On le sait, les contes, avant de passer sous la moulinette d’Hollywood, peuvent se révéler durs et cruels. Tout ne se termine pas toujours bien. Avec Le cœur en hiver, Lepage n’adoucit nullement la leçon : « Le monde peut être dur, et c’est pourquoi il faut l’aimer durement », écrit-il dans le programme. Et c’est bien là la morale apprise par Gerda au terme de sa quête lorsqu’elle comprend que, même si elle n’a pas pu convaincre Kay de quitter son royaume de glace, où il est à l’abri de toute douleur et de toute tristesse, il y a moyen de continuer à être heureuse, ou du moins d’y tendre, petit à petit.