Chaque saison voit dorénavant naître une nouvelle édition du Scriptarium, projet pour lequel le Théâtre Le Clou invite une personnalité inspirante à participer à l’idéation du spectacle. Mais avant de vivre sur scène, Le Scriptarium est un grand projet collectif d’écriture, un incubateur foisonnant qui permet à des milliers de jeunes de découvrir des courants artistiques, littéraires ou philosophiques. Le commissaire invité propose un univers, un thème ou une forme d’écriture à explorer en classe. Cette année, Stéphane Crête, inspiré par l’échange épistolaire, a participé à toutes les étapes du projet: conférences en classe, comité artistique, stage de création et enfin, collage d’extraits des textes pour le spectacle. Dans cet espace, tout était possible: dialogues, poésie, chanson, récit, manifeste...
Le Scriptarium 2018 - La pièce :
Sur scène, trois comédiens, accompagnés d’un musicien, livrent tour à tour la parole des 24 adolescents dont les textes se sont distingués par leur force de frappe. À travers cette prise de parole théâtrale, où ces ados abordent les strates de leur complexe réalité, ils dénoncent, renoncent et annoncent qu’ils peuvent agir, qu’ils vont le faire. Rien n’est épargné, tout passe au tordeur : une prise de parole décomplexée où les tabous restent à la porte. Est-ce un cabaret? Un zapping théâtral? Le spectacle se déploie en un enchaînement de tableaux liés par leur seule envie de répondre à Crête et au monde entier qu’ils ne sont pas que des clichés, qu’ils sont plus que ça. Une parole d’ado authentique, des interprètes sur la corde raide dans un spectacle signé Le Clou et construit sur le vif.
Les auteurs :
Les 24 jeunes auteurs des grandes régions de Montréal et de Québec dont les mots ont été retenus pour le spectacle sont : Josquin Beauchemin, Marie-Jeanne Bélanger, Anthony Bertrand, Aurélie Bérubé, Émile Côté, Lea Deschamps, Mara Dupas, Yannick Duprez-Goulet, Romane Dutilleul, Léa Granger, Oumeyma Hasnaoui, Laura Langevin, Félix-Antoine Lestage, Alexandre Lévesque, Alexandra McCormick, Catherine Morin, Eve Morin, Eloyse Paquet, Fabienne Pilon, Alice Popov, Simon Racine, Maya Sossoulo, Christine Yang-Dai et Juliet Zigby.Texte Stéphane Crête et 24 jeunes auteurs
Mise en scène Monique Gosselin
Avec Philippe Boutin, Sarah Cloutier-Labbé et Sarah Leblanc-Gosselin
Crédits supplémentaires et autres informations
Commisaire Stéphane Crête
Musicien sur scène Nicolas Letarte
Assistance mise en scène et régie Ariane Roy
Scénographie Josée Bergeron-Proulx
Costumes Angela Rassenti
Mouvement Marie-Eve Archambault
Éclairages Mathieu Marcil
Environnement sonore et musique Nicolas Letarte
Direction de production et technique Jean Duchesneau
Durée : environ 75 minutes
*Rencontre avec les artistes
Saison 2017-2018 | Avant le 30 juin 2017 | Après le 30 juin 2017 | |
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À la carte | 20$ | ||
Abonnement 3 à 20 billets | 14$ | 16$ | |
Abonnement 21 billets et + | 12$ | 16$ |
Les taxes sont incluses dans les prix affichés
Sera aussi présenté du 19 avril au 4 mai 2018 à la Salle Fred-Barry
Une production Théâtre Le Clou
Après 20 ans de fidèles et loyaux services, le Théâtre Le Clou a dit au revoir aux Zurbains pour accueillir un nouveau projet annuel : Le Scriptarium 2018, regroupé désormais autour d’un artiste. Pour l’édition initiale, la metteure en scène Monique Gosselin a choisi Stéphane Crête comme parrain pour cette aventure. Malgré quelques passages moins concluants, le public a manifesté à diverses reprises son approbation.
La nouvelle formule du Clou lui permet d’évoluer quant à son approche et à son traitement des réalités contemporaines, sans toutefois faire complètement oublier Les Zurbains. Les dernières éditions ont donné lieu à de belles découvertes (notamment la prestation de Marianne Dansereau et des écritures allumées). Contrairement à son prédécesseur, où des adolescentes et des adolescents voyaient leurs textes portés à la scène avec leur signature distincte, les participantes et participants (au nombre de 24 ici) du présent Scriptarium voient leurs mots se fondre dans un ensemble éclectique.
D’ailleurs, prenons le temps de nommer l’équipe de collaboratrices et collaborateurs à l’écriture : Josquin Beauchemin, Marie-Jeanne Bélanger, Anthony Bertrand, Aurélie Bérubé, Émile Côté, Lea Deschamps, Mara Dupas, Yannick Duprez-Goulet, Romane Dutilleul, Léa Granger, Oumeyma Hasnaoui, Laura Langevin, Félix-Antoine Lestage, Alexandre Lévesque, Alexandra McCormick, Catherine Morin, Eve Morin, Eloyse Paquet, Fabienne Pilon, Alice Popov, Simon Racine, Maya Sossoulo, Christine Yang-Dai et Juliet Zigby.
Crête a proposé l’échange épistolaire comme piste à explorer. Il a regroupé la matière retenue afin de concevoir un collage. Entre l’ouverture et la finale, l’œuvre se déploie en trois mouvements. Elle préconise une approche vers le collectif, sans jamais renier la singularité ou l’exubérance des personnages de la partition.
La voix de l’instigateur amorce le spectacle sur une note affirmative : «je ne vous connais pas, mais je pense souvent à vous. Une partie de moi vous rêve, l’autre vous blâme. Une partie de moi vous glorifie, l’autre se désole…» Par la suite, les trois interprètes (Philippe Boutin, Sarah Cloutier-Labbé et Sarah Leblanc-Gosselin) prennent un plaisir tangible à rendre la fougue et les doutes existentiels durant l’heure et vingt minutes de la représentation.
L’intérêt de ce Scriptarium 2018 réside dans les prises de parole franches témoignant des doutes, des maladresses, des images préconçues et des aspirations associées à cette période transitoire de la vie. Dès l’amorce du spectacle, la conception sonore de Nicolas Letarte-Bersianik occupe une place significative avec ses rythmes parfois percussifs, glisse vers quelques notes de jazz à l’occasion (comme lors de la parodie de chanteur lubrique de Philippe Boutin) et se permet même une allusion reconnaissable au Stairway To Heaven de Led Zeppelin.
Les scènes sont entrecoupées de quelques chansons originales. Les deux actrices y démontrent des capacités vocales surprenantes (surtout dans l’air folk Mon cœur en avalanche). Surgissent également des parodies de publicité, dont l’une où les comparses vantent les mérites « miracles » d’un malaxeur (appelé ici Blendeur) susceptibles de régler des problèmes identitaires, raciaux et d’orientation sexuelle.
Du début à la tombée du rideau, l’équipe se moque allègrement d’une génération sur laquelle il pleut bien des préjugés (« Nos jeunes sont trop paresseux », « La société future est vouée à l’échec », phrases entendues dans le slam Nique ta race). Pourtant, les apparences de cynisme ou de je-m’en-foutisme laissent percevoir une conscientisation face à des problèmes de société et une détermination à ne pas s’engloutir dans une route tracée d’avance par les adultes.
Cette volonté de ne pas se restreindre à une certaine conformité se traduit dans la scénographie conçue par Josée Bergeron-Proulx où trône un amoncellement d’objets variés comme dans une brocante, de larges bandes où sont inscrites des phrases poétiques, sans oublier de nombreuses paires de souliers de tous les styles et de toutes les couleurs. Soulignons la qualité des éclairages de Mathieu Marcil, qui, dès la première scène, accomplit quelques tours prodigieux. Les lumières parviennent à ce moment à recréer successivement trois espaces séparés où chacun des protagonistes regarde son téléphone intelligent, coupé du reste du monde, jouant du cliché de l’ado centré sur ses préoccupations immédiates. Un peu plus tard, les lumières ratent volontairement leur synchronisme avec l’action, en ne tombant pas directement sur le personnage. L’effet demeure d’un comique contagieux.
Quelques références à des réalités ou personnes connues provoquent le rire («Je t’aime autant que Guy A Lepage s’aime lui-même.», «Je t’aime assez pour manquer Unité 9.»), tout comme une métaphore autour de l’abeille pour expliquer la reproduction sexuelle.
Vers la fin, la sauce s’étire, notamment lors de la deuxième séquence où le trio sollicite la participation de l’auditoire. L’utilisation récurrente de certains mots vulgaires n’ajoute rien non plus au propos et tombe dans la facilité.
« Nous imaginons, dans nos nuits blanches, dans nos nuits enivrées, dans nos nuits fumées teintées de toute cette mélancolie qui accepte le défaitiste pour mieux tendre vers le rêve, nous imaginons un monde, non pas meilleur, mais complètement autre », lance Philippe Boutin peu de temps avant le dénouement de ce Scriptarium. Lorsque le trio regroupe à la fin, au centre de la scène, toutes les chaussures en une montagne, le sentiment d’harmonie et de solidarité qui s’en dégage nous laisse espérer une prochaine rencontre aussi foisonnante en 2019 avec Didier Lucien.
Dates antérieures (entre autres)
Du 19 avril au 4 mai 2018 - Salle Fred-Barry