Cheval rouge, cheval vert, cheval de bois, cheval de fer : on peut posséder mille chevaux, mais rien à faire, il n’y a pas mieux qu’un cheval de bleu. Une seule de ses larmes peut devenir océan, baleine, poissons ! Avec fougue, une petite fille nous raconte les histoires équines léguées par son grand-père, car même si son fauteuil à bascule ne balance plus, quelque chose reste de très précieux.
LORSQUE LA POÉSIE DU GESTE ET LE MOUVEMENT DE LA PAROLE ENTRENT EN SYMBIOSE
Deux comédiens se partagent cette partition théâtrale hors du commun. L’une est entendante, l’autre sourd, mais tous deux communiquent de la plus belle manière qui soit. À travers cette histoire à la fois poétique et empreinte de souvenirs, l’auteur belge Marcel Cremer met en lumière les thèmes du temps qui passe, du droit à la différence et de la transmission intergénérationnelle. Et la magie opère à chaque fois que les deux langues – parlée et signée – se synchronisent ou se répondent.
Texte Marcel Cremer
Traduction en LSQ TraduSigne, en collaboration avec Jonathan Poulin-Desbiens
Mise en scène Milena Buziak
Interprète français – LSQ Karine Bénard
Interprétation Sounia Balha et Jonathan Poulin-Desbiens
Crédits supplémentaires et autres informations
Scénographie John Doucet, en collaboration avec Julie Vallée-Léger
Environnement sonore Martin Dawagne
Costumes Manon Guiraud
Lumières Benoit Brunet-Poirier
Chorégraphies Zurine Orbelzu-Lacoste
Régie et assistance à la mise en scène Lionel Lehouillier
Direction de production Sophie Ducharme
Conseils artistiques Esther Beauchemin et Mélanie Dumont
Rencontre avec les artistes le 1er décembre 15h
Durée : 55 minutes
Tarif : 21$
Forfaits disponibles à l'achat de 3 billets et +
Un rabais est offert aux membres de plusieurs organismes partenaires.
Production Théâtre de la Vieille 17 et Voyageurs Immobiles, compagnie de création
Récipiendaire du prix de la mise en scène et des éclairages de l’année aux Prix Rideaux Awards 2019 d’Ottawa-Gatineau, Le Cheval de bleu s’installe pour une trop courte période aux Gros Becs. Coproduction du Théâtre de la Vieille 17 et de la compagnie Voyageurs Immobiles, cette pièce de l’homme de théâtre belge germanophone Marcel Cremer (décédé en 2009) est, de mémoire, la première de sa théâtrographie à être montée hors d’Europe. Cependant, le texte a fait l’objet d’un joli livre illustré par Julian Peters, sorti et nouvellement réédité chez Lansman.
Sous la forme du conte vivant, Le cheval de bleu met en scène une jeune femme qui se remémore son grand-père, grâce aux histoires qu’il lui a offertes avant de disparaître. La pièce explore ainsi le temps qui passe, les images et les mots que l’on garde de la personne décédée, sa force, ses histoires, son héritage. Le droit à la différence aussi, puisque le grand-père était sourd. Ce qui ne semble pas l’avoir embêté de raconter mille et une fables à la petite, toutes empreintes de nature et de chevaux, qu’ils soient de trait, de bois ou mythiques.
Marcel Cremer était un adepte du « théâtre autobiographique », une technique qui demande aux acteurs, aux auteurs et aux metteurs en scène d'offrir une partie d’eux-mêmes aux productions. Selon lui, « la plus grande richesse d’un être humain est sa biographie, ses expériences et ses histoires ». C’est ainsi qu’il s’inspira de deux de ses comédiens de la troupe Agora pour les rôles de la petite (qui oublie tout, partout, comme la comédienne originale) et du grand-père sourd-muet (le comédien avait à l’époque des problèmes avec sa voix et ses articulations). Les chevaux aussi, dont L’Oncle Vert de l’histoire, inspiré d’une bête de somme de son enfance que l’on maltraitait, qu’un Cheval de bleu, sorti de son imagination, venait sauver de temps à autre.
Bouts de souvenirs galopant au gré des saisons de la vie, Le cheval de bleu se déploie avec une belle poésie de mots dits et de mots signés, de gestes et de danses, se balançant avec douceur, entrain, joie de vivre, et un brin de magie.
Milena Buziak poursuit, avec Le cheval de bleu, son exploration de l’univers poétique et du langage des signes, entrepris dans son précédent spectacle Traversée. Grâce à la virtuosité de l’acteur sourd Jonathan Poulin-Desbiens et à l’énergie de Sounia Balha, elle réussit brillamment à combiner le langage des signes, qui, par moment, s'approche esthétiquement (et joliment) de la danse contemporaine, et le jeu théâtral, accompagnant ou doublant l’effet poétique des mots de Cremer. Une petite, mais fort jolie scène évoquant les saisons, alors que les bras des deux interprètes s’entremêlent dans le rayon d’un projecteur pour illustrer en accéléré la croissance d’un arbre, est un exemple parmi tant d’autres du travail de la metteure en scène. D’autres, encore plus simples (des confettis blancs font office de neige, offrant une bataille rangée de boules qui ne volent pas bien haut) font rire petits et grands.
Le texte, certes d’une belle et grande richesse, aurait profité d’une adaptation québécoise – du moins plus poussée –, pour que le public puisse davantage apprécier toutes les images qu’il évoque. Toutefois, la production s’inspire superbement de cette poésie, autant dans la direction des acteurs que dans la conception scénographique. Le plateau monté sur la scène et sur lequel jouent les deux comédiens prend la forme d’une grosse pastille de bois, légèrement en pente. Un seul accessoire : une chaise berçante, artefact laissé derrière par le grand-père. Elle matérialise à elle seule l’une des plus belles phrases de la pièce : « Entre le cheval à bascule et le fauteuil à bascule se déroule la vie de l’homme. » Au-dessus des comédiens pendent plusieurs disques de différentes grosseurs, évoquant une galaxie et reflétant les jeux de lumière de Benoît Brunet-Poirier. De là descendra un cheval de bois, magnifiquement sculpté, aux lignes tout aussi simples, modernes qu’universelles.
Bouts de souvenirs galopant au gré des saisons de la vie, Le cheval de bleu se déploie avec une belle poésie de mots dits et de mots signés, de gestes et de danses, se balançant avec douceur, entrain, joie de vivre, et un brin de magie.