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Beu-Bye 17
Du 15 au 30 décembre 2017

De retour pour une quatrième année consécutive, le Beu-Bye s’inscrit maintenant comme une tradition du temps des fêtes à Québec. Sur scène, six comédiens et un musicien revoit en humour les sujets chauds de l’année sous forme de sketchs, chansons et de chorégraphies. 

Pour une deuxième année, l’équipe fait appel à six auteurs invités (Robert Lepage, Isabelle Hubert, Pascale Renaud-Hébert, Joëlle Bond, Marc Auger Gosselin et Jocelyn Pelletier) à qui, ils ont convié un sujet de l’actualité 2017. 

Les spectateurs auront droit à plusieurs numéros mettant en vedette des personnages qui auront bien marqué l’actualité de 2017. Il y aurait d’ailleurs une rumeur à l’effet que Justin Trudeau et Mélanie Joly seront les vedettes d’une nouvelle comédie musicale pour l’occasion.


Mise en scène et script-édition Lucien Ratio
Textes Jean-Philippe Côté, Philippe Durocher, Lucien Ratio
Auteur(e)s invité(e)s Robert Lepage, Isabelle Hubert, Pascale Renaud-Hébert, Joëlle Bond, Marc Auger Gosselin et Jocelyn Pelletier
Interprétation Philippe Durocher, Jean-Philippe Côté, Joëlle Bourdon, Nicola-Frank Vachon, Nicolas Létourneau, Ariane Bellavance-Fafard et Mathieu Campagna


Crédits supplémentaires et autres informations

Chorégraphie Claude Breton-Potvin
Décor et éclairages  : Jean-François Labbé
Costumes et accessoires  : Marie-Sophie Gauthier
Musique et ambiance sonore  : Mathieu Campagna

Mercredi au samedi 19h30, sauf deux derniers samedis 15h et 19h30

TARIFS
Régulier : 30 $
60 ans et plus* : 25 $
30 ans et moins* : 25 $

Abonnés
Régulier : 24$
Aînés et jeunes 21$

Production du Théâtre du temps qui s’arrête


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Critique disponible
            
Critique

Jusqu’au 30 décembre prochain à La Bordée, le Théâtre du temps qui s’arrête propose un Beu-Bye cuvée 2017 très relevé. Peu de choses ont échappé à l’équipe de rédacteurs – qu’ils fassent partie de la troupe ou qu'ils soient invités – ; sans être mesquins, ou, au contraire, bonasses, ils ont su récupérer avec intelligence et ludisme une myriade d’événements dans des sketchs qui, pour la plupart, touchent la cible. Tout est dans les détails : l’équipe en a profité pour disséminer une multitude de références, en lien ou non avec les sujets principaux, dans les différents numéros. Il faut demeurer attentif pour tout capter. Mais avouons qu’une année comme celle qui s’achève, étourdissante, folle, inquiétante, offre beaucoup, beaucoup de sujets dont il vaut mieux se moquer pour repartir du bon pied.

Les « vieux routiers » Joëlle Bourdon, Philippe Durocher et Nicola-Frank Vachon se sont entourés de comédiens connus, soit Jean-Philippe Côté et Nicolas Létourneau, de retour pour une deuxième année, ainsi que d’une nouvelle recrue, Ariane Bellavance-Fafard, qui a su s’intégrer à l’équipe avec beaucoup d’aplomb.

Le spectacle commence sur les chapeaux de roues avec un clin d’œil à la visite des Backstreet Boys sur les plaines, cet été. Numéro enlevant, il donne le ton : ce soir, c’est la fête, on s’amuse. Avant l’entracte, 12 sketchs se succéderont. On aborde la recherche de sécurité pour de futures touristes (la destination choisie sera tout sauf dangereuse) ; Uber, en employé de bureau capricieux, menace de quitter l’entreprise (« on est en 2017, gang! ») ; Messmer invite sur son émission télé les chefs des partis politiques et les « hypnotisent »… jusqu’à ce que le petit nouveau de l’Assemblée nationale entre en scène sur l’air de la chanson de l’été – un premier grand coup de la troupe du Beu-Bye. L’une des têtes de Turc de la soirée sera l’animateur de radio Éric Duhaime : lors de cette première partie, on raille son livre « La fin de l’homosexualité et le dernier gay » lors d’une discussion entre chums bloqués sur l’autoroute 13 dans la tempête du 14 mars. Le numéro sur le vote de St-Apollinaire, qui a porté sur le cimetière musulman, a un arrière-goût de sketch de RBO (Hérouxtyville), mais « résume » bien certaines mentalités arriérées – l’équipe a profité pour se moquer de la récente nouvelle qui a ébranlé le Trident, la fameuse cigarette interdite. Beau flash. La légalisation de la marijuana a été le premier sujet abordé par un auteur invité, Marc Auger, qui a dépeint avec beaucoup d’humour une SQC, Société Québécoise du Canabis, en SAQ 2.0 avec ses pastilles de goût et sa carte de point. La Catalogne n’est pas en reste, dans un très court segment éloquent qui frappe, sans qu’un seul mot ne soit prononcé.

La défaite de Denis Coderre passe au tordeur humoristique, alors qu’il appelle Batman et Robin version 1966 en renfort – superbe clin d’œil à la disparition d’Adam West – contre Catwoman, une Valérie Plante au fouet assumé. Un numéro inspiré et brillant. Sur l’air de « Seul au combat » du regretté Patrick Bourgeois des BB, l’équipe, avec émotion, salue la mémoire des disparus de la tuerie de la Mosquée de Québec, juste avant l’entracte.

C’est au retour que la troupe propose son meilleur sketch avec un Justin Trudeau affolé de ne pas être dans les journaux, et une Mélanie Joly qui ne comprend rien de l’entente avec Netflix. Dans un numéro musical bien orchestré signé Pascale Renaud-Hébert, « La La Land » devient « Bla Bla Land » ; les paroles parodiques sur l'air de « Another Day of Sun » fonctionnent à merveille. Mentionnons le travail de Claude Breton-Potvin aux chorégraphies, qui a su relever plusieurs moments de la représentation, dont celui-ci, chaudement applaudi. Éric Duhaime revient hanter la scène, en Indiana Jones à la rhétorique absurde qui défend le crucifix de l’hôpital Saint-Sacrement, mais qui se retrouve au purgatoire, à cause (ou grâce?) au C. difficile. Le texte de Jocelyn Pelletier sur les suprématistes blancs avec la musique de Carl Orff, du café « noir » et des scansions irrationnelles est simplement hilarant, grâce au jeu de Nicolas-Frank Vachon et Nicolas Létourneau. Autre invité de marque, Robert Lepage propose une ritournelle western donnant la parole aux gens de la droite qui sont contre l’immigration ; de son côté, Joëlle Bond, moqueuse, met en scène Sophie Durocher et Bianca Longpré, blogueuse sur « Mère ordinaire » et pour le Huffington Post, dans un épisode de « Cuisine futée… », un sketch presque niché, mais très drôle. Malgré le côté délicat du sujet, le harcèlement sexuel est abordé avec intelligence, réunissant Gilbert Rozon, l’homme qui a embrassé Valerie-Micaela Bain, journaliste de Radio-Canada, lors d’un topo sur Osheaga et Éric Salvail devant le Premier Homme, Adam, hors de lui. La menace devant laquelle il les met s'ils récidivent ne peut être plus éloquente : une finale forte qui salue, d'une certaine manière, les femmes qui ont eu le courage de dénoncer leurs agresseurs.

Deux sujets n’ont pas eu l’impact souhaité. D’abord, mentionnons le numéro plutôt cliché sur Régis Labeaume, visité par les trois fantômes dickensiens, qui tombe à plat. Si ceux sur Trump, trois sketchs sous forme de gags de télé-réalité, s’avèrent en premier lieu tout de même rigolos, force est d’admettre qu’on aurait pu trouver mieux, surtout avec la supposée ingérence de la Russie qui a défrayé la manchette durant une partie de l’année.

La scénographie, à l’instar de l’an dernier, place le multi-instrumentiste Mathieu Campagna au-dessus de la scène, surplombant l’aire de jeu, accompagné de son indéfectible canapé rouge. Encore une fois, le musicien fait un très bon travail, bien qu’il ait été souhaitable, lors de moments plus émotionnels, qu’il use de plus de douceur, laissant de côté le son agressif de sa guitare électrique, dont lors de la chanson « Free Fallin » de Tom Petty, interprétée juste avant l’entracte par Nicolas-Frank Vachon en honneur aux disparus de l’année. Signée par le metteur en scène et script-éditeur Lucien Ratio, la chanson qui clôt le spectacle s’avère réellement accrocheuse (assez pour que des gens la sifflent encore en sortant de la salle), aux ritournelles faisant penser à un Alex Nevsky électrique. Par contre, la coda presque murmurée par les comédiens termine le spectacle trop délicatement ; la chanson entraînante aurait pu se continuer sous les applaudissements des spectateurs qui auraient joint la fête.

Le rendez-vous maintenant traditionnel que propose cette rétrospective de l’année concoctée par Lucien Ratio et l’équipe de concepteurs connaît une belle évolution depuis sa création. De toutes les éditions, celle-ci est assurément la plus réussie, à tous les niveaux. On attend avec hâte la prochaine cuvée !

16-12-2017


 
La Bordée
315, Saint-Joseph Est
Billetterie : 418-694-9721

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