La compagnie tectoniK_ nous offre un spectacle multidisciplinaire alliant théâtre, danse, musique et photographie. Une grande prise de parole d’une jeunesse qui cherche à se nommer. Un vent de fraîcheur, une nécessaire ode à la beauté dans ce monde régulièrement étouffé par le cynisme ambiant.
Équipe de création : Marie-Renée Bourget Harvey, Daniel Bélanger, Hubert Gagnon, Renaud Philippe, Josué Beaucage et Pascal Asselin
Lundi causerie
20 septembre 2010 à 19 h 30, dans le foyer du Théâtre Périscope
En marge de la création Vertiges, production de tectoniK_, qui, à la manière du Refus Global de 1948, s'interroge sur le monde dans lequel nous vivons, le théâtre vous invite à débattre des grands moteurs de changements de notre société.
Le théâtre recevra M. Antoine Robitaille, journaliste et correspondant du Devoir à l'Assemblée Nationale, témoin critique des méandres de la vie politique; Mme Diane Lamoureux, féministe engagée et professeure au département des sciences politiques à l'Université Laval, étudiant la notion de citoyenneté; et M. Gaston Cadrin, géographe et environnementaliste, membre-fondateur du GIRAM (groupe d'initiative et de recherche appliquées).
Production tectoniK_
Codiffusion Théâtre Périscope
par Sylvie Isabelle
Le Périscope lance ces jours-ci sa saison 2010-2011 avec Vertiges, un ambitieux spectacle choral qui réunit plus d’une vingtaine d’artistes de la relève artistique de Québec. Pendant deux heures, cette génération montante, héritière du Refus Global, fait de la poésie une arme « de reconstruction massive » en jouant, dansant et chantant son espoir d’un monde meilleur.
Olivier Lépine relève un défi colossal en signant cette mise en scène : avec tant d’interprètes différents, de genres allant de la poésie à la danse en passant par le chant, il est très difficile d’obtenir une homogénéité suffisante pour que cette création apparaisse comme un tout, rendant du coup ses faiblesses et ses forces d’autant plus visibles. Ainsi, les monologues sont excessivement longs et brisent le rythme qu’instaurent les sections musicales, alors que, curieusement, ce sont justement les passages collectifs qui sont les plus forts.
Les thèmes abordés vont de la politique aux inégalités sociales, du réchauffement climatique à la guerre, des relations amoureuses aux croyances religieuses en passant par l’identité sociale, bref, rien de bien différent de ce qui pouvait préoccuper les générations précédentes au même âge. Or, le tout est traité sans trop de mordant : on se contente de décrier sans vraiment attaquer, en égratignant gentiment au passage l’Église de Scientologie. Même la volonté d’intégrer les spectateurs à l’action est faite de façon timide, sans vraiment ajouter quoi que ce soit.
Vertiges nous offre toutefois des moments d’une belle intensité : si on nous sert encore des revendications souverainistes qui n’ont rien de nouveau, on nous offre toutefois quelques illustrations concrètes de la beauté de notre langue. Ainsi, la scène où Jean-Michel Girouard déclare son désir pour son pays comme il le ferait pour une femme est d’une poésie telle que notre fibre patriotique ne peut que s’émouvoir. Le conte d’Israël Gamache nous emporte littéralement. La scène où des couples s’interrogent à savoir s’ils « frencheront » ou non, recèle, sous une apparente légèreté, toute l’intensité d’une génération qui a faim d’engagement, tout de suite et maintenant.
Enfin, les artisans de Vertiges célèbrent également la langue au cours d’une scène collective particulièrement efficace en lançant des citations d’auteurs et d’artistes québécois, certaines s’élevant au-dessus du tumulte créé par toutes ces voix. Parmi ces cris, on peut entendre une citation de Wajdi Mouawad qui jette un tout nouvel éclairage sur Vertiges : « Chaque génération invente elle-même le monstre qui la dévore. Elle en est responsable. De quoi notre époque est-elle responsable? Par quoi notre époque est-elle dévorée? ».
Or, c’est justement lorsque Vertiges s’attaque à ses monstres, à ce qui touche sa génération de près, que la pièce réussit véritablement à nous toucher et à nous parler. S’il est ambitieux de se réclamer du Refus Global, la pièce a au moins le mérite d’amorcer un mouvement, ce qu’on ne peut que saluer.