Du 6 au 30 janvier 2010, 19h30
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Le portier de la Gare WindsorLe portier de la Gare Windsor

Texte et mise en scène de Julie Vincent
Avec Stéphane Blanchette, Jean-François Casabonne, Geneviève Rioux, Noémie Godin-Vigneau, Francesca Barcenas, Victor Andrès Trelles Turgeon, Jean Maheux et Éric Robidoux

Suite au Coup d’État dans son pays, Francisco fuit l’Uruguay. Architecte à Montréal il se fait passer pour italien. En visionnant un film d’Antonioni, il rencontre Claire, pianiste. Entre eux la passion est dévorante mais les fantômes du passé le poursuivent.

Des années plus tard, Claire le cherche à Montevideo, à Buenos Aires. Qu'est devenu l'architecte exilé ?

Montréal 2005.

Dehors on entend la rumeur d’une foule, des milliers d’étudiants sont en grève. Francisco est hanté par le souvenir de son ami, Juan, poète de l’Uruguay. L'amnésie civile n'arrive pas à effacer la vision  de son corps criblé de balles. Un jeune homme le découvre inerte dans l'entrée de la gare : l'architecte devenu clochard doit affronter son fils. À la salle des pas perdus de la gare Windsor apparaissent les passagers du train fantôme de Montevideo.

Portier

Composition musicale : Michel Smith
Scénographie : Geneviève Lizotte
Chorégraphies : Estelle Clareton,
Éclairages : Mikael Fortin,
Costumes : Hélène Ewing
Photographe pour la scénographie : François Regis Fournier
Photos d’archives : Aurelio Gonzalez, David Simard
Monteuse-photo : Geneviève Boivin
Direction technique : Marcello Ponce
Assistance et régie : Audrey Wycinski

Carte Premières
Date Premières : du 6 au 14 janvier 2010
Régulier 26$
Carte premières : 13$

Une création de Singulier Pluriel

Fred-Barry
4353, rue Sainte-Catherine Est
Billetterie : (514) 253-8974

par David Lefebvre

«Je suis un témoignage...»

La comédienne, metteure en scène et auteure Julie Vincent (La robe de mariée de Gisèle Schmidt, 2006) signe la pièce Le portier de la Gare Windsor en hommage à Francisco, architecte et traducteur, qu'elle a rencontré en 2005 lors des manifestations étudiantes. Après qu'il se soit confié à elle, Julie Vincent et son équipe font plusieurs recherches sur l'homme, sur l'Uruguay, son pays natal, et sur les exilés politiques. Ce spectacle au rythme soutenu, aux courtes scènes qui s'emboitent les unes aux autres et qui dévoile la vie tumultueuse de cet homme au passé difficile et au présent qui demande pitié est le fruit de cet édifiant et captivant travail.


Crédit photo : François-Régis Fournier

Le spectacle débute, tel un train qui quitte la gare, et ne s'arrête pas avant la fin de l'histoire. Un homme de descendance italienne, habitant Montevideo, capitale de ce que l’on nomme la Suisse de l'Amérique du Sud, veut devenir architecte. Nous sommes au début des années 60, et le radicalisme s'installe. Les idées révolutionnaires semblent plus dangereuses que les armes : on condamne, on tue. Après la mort de son meilleur ami, dont il voit le corps criblé de balles dans une gare, l'homme s'exile au nord. Il prend un apprenti, veut créer, édifier, mais se bute à une autre forme de répression : celle des coopérations, des compagnies et de leurs idées à deux sous. L'architecte traduit Gauvreau en espagnol et tombe amoureux fou d'une pianiste mariée, qui aura pourtant un enfant de son amant. Mais l'homme s'enfonce doucement dans un déséquilibre psychologique précaire, perd tout, disparaît, devenant sans-abri. On le cherche, pourtant. Une étudiante lui paie un café, de temps en temps, une étudiante qui ressemble à s'y méprendre à une amie si chère qu'il a laissé derrière. Et l'homme se perd, dans sa propre mémoire, ses origines, dans ce qu'est devenue sa vie.

La cadence du spectacle est rapide, presque fugitive, alimentée par le jeu et le discours preste des comédiens. Leur parole, claire, empreinte d’une grande poésie, se fraie un chemin vers nos oreilles, mais elle ne laisse pas le temps de nous faire ressentir toute la portée, la détresse, l'enchantement ou la passion de ses mots. Nous les saisissons, comme un vol d’oiseaux, sans faire partie de la formation. Jean-François Casabonne, en scène durant toute la durée de la représentation, mis à part quelques secondes vers la fin, porte magistralement sur ses épaules ce spectacle ballet. Mais il ne danse pas
seul : jouant plus d'un rôle chacun, les Stéphane Blanchette, Geneviève Rioux, Noémie Godin-Vigneau, Francesca Barcenas, Victor Andrès Trelles Turgeon, Jean Maheux et Éric Robidoux forment une troupe singulière, virevoltante. Les transitions sont chorégraphiées, tel un tango : on entre à reculons, on s'exécute avec grâce. Les déplacements sont rigoureusement calculés. Le mouvement scénique est vivant et bat comme un cœur.

Le décor se résume en un simple mur gris béton, sur lequel on projette parfois des photos splendides, qui rappellent le texte et les images qui s'y rattachent – une ville, un piano, des peintures. La présence d'arches et de bancs évoque le lieu d'une gare. Du reste, tout le mobilier se crée à partir de malles et de valises, métaphore de l'homme en mouvance, en exil. La musique originale de Michel Smith, riche de la guitara, de l’accordéon et du bandonéon, est subtilement bien intégrée au spectacle.

Le portier de la Gare Windsor nous fait prendre place dans un train roulant à vive allure, aux multiples fantômes, aux vies qui se chevauchent, à l’amour impossible mais si vibrant, et à un affrontement final père-fils inévitable. Le voyage est magnifique, mais la vitesse, paradoxalement, refroidit sensiblement les ardeurs.

10-01-2010

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