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Du 3 octobre au 4 novembre 2011, du lundi au jeudi 19h, vendredi 20h, supplémentaires 27 oct. et 3 nov. 21h30
La fin de la sexualitéLa fin de la sexualité
Présenté à la Petite Licorne
Texte François Létourneau
Mise en scène Frédéric Blanchette
Avec Émilie Bibeau, Frédéric Blanchette, Patrick Drolet, François Létourneau, Patrice Robitaille et Catherine-Anne Toupin

La fin de la sexualité est un «docu-théâtre politico-sexuel» qui se propose d'explorer les résultats des recherches du «Projet sur la fin de la sexualité», depuis sa fondation clandestine à Washington en 1986, jusqu'à sa fracassante découverte en 2008. Espionnage, luttes politiques et témoignages graveleux sont au menu.

La fin de la sexualité est la toute nouvelle pièce de François Létourneau, qui nous avait donné Cheech ou Les hommes de Chrysler sont en ville, présentée à La Licorne en 2003. Il est également coauteur de la populaire télésérie Les Invincibles (2005-2009). Frédéric Blanchette, qui signe la mise en scène de cette pièce, a aussi mis en scène Cheech, de François Létourneau, et À présent de Catherine-Anne Toupin, deux productions de La Manufacture.


Tête-à-tête : Jeudi 13 octobre

Carte Premières
Cartes Prem1ères
Date Premières : 3 au 7 octobre 2011
Régulier : 32$
Carte premières : 16$

Une production du Théâtre Ni plus ni moins


Théâtre La Licorne
4559, avenue Papineau
Billetterie : 514-523-2246

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 Critique
Critique

par David Lefebvre


Crédit photo : Marc-André Roy

Après un passage remarqué au cinéma (Cheech) et à la télévision (Les Invincibles), l’auteur et comédien François Létourneau, par l’entremise du Théâtre Ni plus ni moins, revient à ses premières amours et ouvre officiellement la toute nouvelle Petite Licorne avec un docu-fiction délicieusement scabreux, La fin de la sexualité.

Le personnage « narrateur et auteur » François Létourneau, interprété de façon impeccable par Frédéric Blanchette (une superbe mise en abîme dès le départ), reçoit par la poste des documents d’une certaine Jenna Bush, ancienne maîtresse, qui fait état de documents secrets sur l’étude de la sexualité des Américains, entre 1986 et sa découverte en 2008. D’après les calculs des chercheurs, si la tendance se maintient, l’humain perdrait tout plaisir en la sexualité et ne se reproduirait plus, ce qui pourrait être catastrophique, entre autres, au plan économique, dixit Reagan. Le End of Sexuality Project, mené clandestinement par le Conseil national de Sécurité qui interviewe des centaines de milliers de personnes sur leurs habitudes sexuelles, en enregistrant absolument tout au nom du patriotisme, connaîtra heurts et déboires pour finalement être abandonné.

L’intérêt premier de La fin de la sexualité réside sans contredit dans la façon dont est présenté le fameux projet, des faits jusqu’à sa reconstitution dramatique ; un excellent travail de justesse dans le ton, de la part de Frédéric Blanchette qui assume aussi la mise en scène, et qui a su savamment doser comédie, caricature et instants plus dramatiques. Le personnage François Létourneau s’adresse d’abord au public, de façon très sérieuse et éloquente, à propos des résultats d’études et de ce qui a mené au fameux projet gouvernemental, graphiques à l’appui. Puis, par l’entremise de différents acteurs bien réels – ou qui pourraient l’être (notons le Président Ronald Reagan et Samuel «Sandy» Burger (Patrice Robitaille), l’amiral John Poindexter, à l’orientation sexuelle refoulée (drôle et troublant François Létourneau), le Président George Bush père (Patrick Drolet), la psychologue Lucinda Collins (un personnage, joué par Émilie Bibeau, qui tarde à assumer pleinement sa présence scénique) ou encore Janet Reno (Catherine Anne Toupin – parfaite), on plonge dans une histoire tordue, souvent personnelle et sexuellement très explicite ou même perverse, mais jamais de façon déplacée ou gratuite, grâce au talent combiné de l’auteur et du metteur en scène. De vieux comparses qui nous font plaisir de retrouver. On sent véritablement l’engouement de Létourneau, dans ce texte, pour la politique américaine, ses complots et ses scandales, touchant à la Commission Tower, à l’Iran Contra, allant jusqu’à rattraper de façon géniale l’affaire Lewinsky (une stagiaire volontaire ici sobrement mais magnifiquement incarnée par Émilie Bibeau). L’écriture de Létourneau est d’une superbe intelligence et use d’un humour tout aussi touchant qu’obscène. L’utilisation d’images en fond de scène, semblables à des diapositives pour identifier gens, endroits, et autres informations utiles ou non, est souvent hilarante et terriblement efficace.

La pièce se divise en trois parties : l’ère Reagan, l’ère  Bush père et l’ère Clinton. Si la première est jouissive et surprenante, proposant un Reagan dévoreur de femmes et de cinéma (Ghostbusters et Splash en font les frais, vive les années 80), les deux autres souffrent légèrement d’inégalités et de longueurs, dans le texte comme dans le jeu ;  on piétine, et ce, malgré notre compréhension d’une grande détresse humaine derrière les imperfections, les impasses, les maladresses des personnages qui réussissent tout de même à nous toucher.

Profondes blessures amoureuses, frustrations sexuelles de toute sorte, sentiment viscéral de solitude jusqu’à la disparition de soi et de son intimité, l’amour est réellement «quelque chose de mystérieux»… comme l’est la sexualité. Mais la fin, vraiment?

05-10-2011