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Du 4 au 8 novembre 2013, du lundi au jeudi 19h, vendredi 20h
DeuxII (Deux)
Présenté à la Petite Licorne
Texte Mansel Robinson
Traduction Jean Marc Dalpé
Mise en scène Geneviève Pineault
Assistance à la mise en scène Emanuelle Langelier
Avec Jean Marc Dalpé et Elkahna Talbi

Lors d’un voyage en Tunisie, Mercier, un policier d’expérience, rencontre la belle Maha, une jeune médecin musulmane, qu’il épouse. Ensemble, ils s’installent au Canada. Mais suite aux événements du 11 septembre, tout le monde devient suspect aux yeux de Mercier. Sa confiance en sa femme laisse tranquillement place au doute et à la suspicion. Lorsque Mercier se retrouve au coeur d’un interrogatoire, sur le banc de l’accusé, il a beaucoup à avouer. Elle aussi. Petit à petit, Mercier et Maha dévoilent leur histoire.

Deux monologues où il est question de racisme, de guerre au terrorisme, de profilage racial et d’un amour déchu. Ce texte, qui décortique les mécanismes de la paranoïa collective et questionne notre peur de la différence, explore les préjugés solidement installés dans notre société, surtout depuis que les actes terroristes semblent se multiplier.

Jean Marc Dalpé, qui a reçu en 2012 un Prix Rideau pour l’interprétation masculine de l’année pour son rôle de Mercier, signe la traduction de cette pièce de Mansel Robinson. Dans une mise en scène de Geneviève Pineault, directrice artistique du TNO, II (deux) est de retour à La Petite Licorne après un passage remarqué en 2012.


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Décor Normand Thériault
Costumes Isabelle Bélisle
Éclairages Guillaume Houët
Musique Aymar
Conseillère artistique Esther Beauchemin

Représentations avec surtitres anglais le 8 novembre

Régulier : 32$
30 ans et - : 22$
65 ans et + : 27$

Une production Théâtre du Nouvel-Ontario et Théâtre de la Vieille 17


La Petite Licorne
4559, avenue Papineau
Billetterie : 514-523-2246

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Dates antérieures (entre autres)

Du 17 au 28 septembre 2012, La Licorne, puis en tournée de octobre 2012 à février 2013 + Carrefour 2013

 
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 Critique
Critique

par David Lefebvre


Crédit photo : Mathieu Girard

Après les mineurs de Slague et les cheminots de Trains fantômes (deux textes, présentés en 2008 à la Petite Licorne, qui connurent un véritable succès autant ici que sur la route), le dramaturge Mansel Robinson explore le terrorisme, le racisme et l'état paranoïaque que la peur de l'Autre engendre dans II (deux), un récit noir et puissant.

Lors d'un voyage à la découverte du réel Sahara, Mercier, un policier canadien (Jean Marc Dalpé) rencontre une jolie médecin (Elkahna Talbi) dans un petit village. Charmé par « le rythme berbère de ses hanches tunisiennes », il réussit à la séduire, par sa gentillesse et son accent. Elle décide après quelque temps de le rejoindre au Canada. Ne pouvant pas exercer sa profession, elle ouvre une boutique où elle vend de l'artisanat provenant d'un peu partout à travers le monde, aidant des femmes habitant des endroits reculés et pauvres. Ses nombreux voyages et la couleur de sa peau font jaser. Si Mercier peut en prendre, car l'amour ne rend pas seulement aveugle, mais sourd, la pression sociale, les railleries de ses collègues et les attentats du 11 Septembre font réfléchir l'homme qui croit de plus en plus à la culpabilité de sa femme. Comment un homme bon, intègre, aimant, vient à dénoncer sa propre épouse, et à l'interroger lui-même jusqu'à l'irréparable? Et que cache-t-elle à son mari, réellement? C'est plus qu'une histoire politique, de terrorisme, de trahison ou de meurtre, c'est une histoire d'amour, de confiance et de ce qui peut les briser à cause d'un seul mot.

Avec II (deux), Mansel Robinson place au milieu d'une cage (conception de Normand Thériault) deux personnages diamétralement opposés, qui pourtant, à un moment de leur vie, se sont trouvés. Il est un peu bourru, voire arrogant, elle est douce, gentille. Il est policier, elle est médecin ; il est blanc, elle est « foncée ». Un monde les sépare, pourtant, ils ont réussi à trouver le leur. Et ce monde extérieur viendra les séparer de nouveau, plantant la graine de la peur, de l'incertitude, du racisme, du déracinement. Et de cette graine jaillira une pousse malheureusement fertile, qui transformera la peur et le doute en véritable guerre insidieuse dans l'esprit du policier.

Tel un polar, on suit deux confessions en parallèle, celle de Maha, à une ou des personnes inconnues, et celle de Mercier, aux policiers qui l'ont arrêté. L'auteur est en parfaite maîtrise des différents effets et sentiments qu'il veut instaurer chez le spectateur, et la mise en scène de Geneviève Pineault en exploite admirablement bien toutes les possibilités, tout en restant posé, presque latent. La parole de l'Ontarien est directe, crue, parfois drôle, mais en un sens véridique. Elle est « probable », et ceci crée autant une emprise rapide chez le spectateur qu'une réflexion terrifiante : réfléchissons-nous tous comme Mercier? Sommes-nous tous racistes, à différents degrés? Et jusqu'où peut mener cette peur honteuse?

Le jeu de Jean Marc Dalpé et d'Elkahna Talbi est tout à fait juste et très accrocheur. Prenant la parole chacun leur tour, tout en faisant avancer le récit de façon parallèle, les deux comédiens se donneront la réplique que rarement durant la représentation. Le seul bémol provient du manque de naturel lors des dialogues, des moments en couple, plus marqué du côté de Dalpé, mais rien pour entacher leur solide performance. Le compositeur Aymar, qui avait aussi concocté la musique de Slague, ajoute ici un certain suspense au récit grâce à une trame sonore subtile, discrète, au timbre peu changeant.

Coproduction du Théâtre du Nouvel-Ontario et Théâtre de la Vieille 17, II (deux) s'avère un morceau théâtral percutant, d'une grande pertinence, superbement traduit par Dalpé, évocateur d'une triste pensée collective, qui voit chaque mot, chaque phrase pénétrer le spectateur et ébranler tout autant la tête que le coeur.

18-09-2012