Du 13 au 23 novembre
Julie, Joanne, Érik et Tanguay vivent un "nanodrame" existentiel! Pour se sortir de cette crise qui les dépasse, leurs moyens sont plutôt dérisoires... Heureusement que la surprenante mère de Julie est là pour leur rappeler que, même si la quête est éprouvante il ne faut pas s'empêcher de danser!
Romances et karaoké décrit avec fougue et intelligence la quête de personnages qui se cherchent en eux-mêmes et dans le regard des autres. Dialogue, chanson, diapositive, karaoké... Toutes les formes, tous les styles s'entrechoquent, comme si l'auteur Francis Monty et le metteur en scène Benoît Vermeulen avaient éprouvé le même besoin irrésistible qu'éprouvent leurs personnages: celui de s'étourdir pour mieux comprendre le choc que l'on ressent à l'aube de l'âge adulte.
Texte
François MontyMise en scène
Benoît VermeulenAvec
Patrice Bélanger, Marie-Ève Bertrand, Sandrine Bisson, Mathieu Gosselin, Monique GosselinScénographie et costumes
Raymond Marius BoucherConception des éclairages
Mathieu MarcilConception sonore
Sylvain ScottConseillère aux chorégraphies
Manon OlignyConception des maquillages
Florence CornetUne création du Théâtre Le Clou
par David Lefebvre
Le Théâtre Le Clou se spécialise dans le théâtre pour adolescents. S'il y a bien un public qui est difficile d'approche, c'est bien celui des ados. "Le théâtre.. pfff full poche"... Voilà ce qu'on pourrait facilement avoir comme réplique. Mais le Théâtre Le Clou crée des spectacles éclatés, uniques, qui plaisent à tout coup. Celui-ci ne fait pas exception.
Dès notre entrée dans la salle, la mère d'un des personnages nous accueille avec un large sourire, en marchant de rangée en rangée pour nous souhaiter la bienvenue (du moins c'est ce qui est arrivé lors de la première médiatique). On remarque aussi tout de suite que le niveau d'âge a augmenté dans la salle par rapport aux autres pièce de la Maison Théâtre... Le rideau est déjà levé (on a donc droit à un décor hétéroclythe, avec voiles bleus, causeuse, paravents, et un grand podium qui sert de décor de maison à Julie et sa mère). Tout ceci sur des musiques évoquant l'amour, de L'Amour est bleu jusqu'à L'Été indien en passant par le Mercedes Band et Diane Dufresne (J'ai rencontré l'homme de ma vie). Un retour dans les années 80 en force qui donnera quelques indices sur la pièce...
Puis, sans avertir, le spectacle commence. On voit tout de suite la tangente de la pièce et ses principaux thèmes : les premiers problèmes de l'adolescence, la crise et la recherche d'identité, à l'intérieur de nous et dans les yeux des autres, puis dans la société. Celui de plaire et d'avoir son premier french kiss. Celui de se démarquer. Celui d'être quelqu'un, finalement, sans l'aide des parents. De prendre position. Comment ne pas se retrouver et se reconnaître d'une manière ou d'une autre dans ce genre de texte?
La mise en scène de Benoît Vermeulen et le texte de Francis Monty sont complètement éclatés, actuel malgré le sujet vieux comme le monde, sans tomber une seule fois dans le "quétaine". Les situations passent du réalisme au cocasse, du rire jusqu'aux moments ambarrasants. On assiste à leur vie. Les spectateurs existent dans leur monde, ils nous parlent directement. Julie (Sandrine Bisson) nous raconte sa vie et ses fugues, Tanguay (Patrice Bélanger), le bum, nous fait quelques poses et nous parle aussi, lui qui se prend pour une pochette de film d'action. Johanne (Marie-Ève Bertrand) la timide, tente de nous dire que la vie est dure pour elle et qu'elle voudrait tellement plaire... Monique Gosselin, qui interprète le rôle de la mère de Julie, passe à travers toutes ses époques, selon les humeurs de sa fille, des années 60 jusqu'à aujourd'hui, en passant par la mode hippie et les années 80 fluo... Il y a aussi Érik (Mathieu Gosselin), le bollé, qui nous donne quelques cours sur la recherche d'identité et certains écrivains et poètes comme Claude Gauvreau (par sa révolte). Il y a beaucoup de références dans le texte, comme au film de Ding et Dong (quand on reprend la blague de "boom poteau"). Mais c'est la musique qui fait rire. Le choix musical va interpeller beaucoup de monde, surtout ceux de ma génération, soit les 24-35 ans, avec les C'est beau un homme, C'est un beau roman et I Was Made for Lovin' You de... Kiss (pas besoin de vous révéler ce qui va se passer...). Les costumes collent définitement à la peau de chaque personnage, comme un gant. Il est donc facile, du premier coup d'oeil, d'identifier qui est le bum, la timide, la "fuckée" et le bollé.
La pièce évoque pour les plus vieux beaucoup de souvenirs de jeunesse, les premières approches, les crises, les questionnements, les séances de "cruise". Les jeunes vont totalement se reconnaître dans ce genre d'histoire sautée, tel un volcan qui explose. Comment les jeunes mettent l'accent sur le look, l'habillement et la parure, pour plaire à l'autre quand on s'aperçoit finalement que ça ne marche pas du tout, et que c'est bien ce qui est sous l'habit qui séduit. Le fait de ne plus savoir à quel saint se vouer pour que nos rêves et nos espoirs deviennent réalité (Johanne implorera plusieurs fois Ste-Marie Mère de Dieu...). Plusieurs sujets, un rythme effrené, que la mère récupère pour dire aux jeunes que malgré tout, on ne doit pas s'empêcher de danser...
Pour la témérité du spectacle, pour les thèmes choisis, justes, drôles, actuels et indémodables, le spectacle vaut franchement le détour, quelque soit l'âge.