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Du 28 janvier au 13 février 2016, mardi, jeudi et vendredi 20h15, mercredi 19h15, samedi 16h15
L'homme du sous-sol
Texte de Fédor Dostoïevski
Mise en scène et interprétation Simon Pitaqaj

Parallèlement à la présentation du Joueur de Dostoïevski sur la scène principale, une jeune compagnie française offre l’adaptation d’une œuvre majeure de l’écrivain russe. —— L’homme du sous-sol dit ce qu’il pense haut et fort. Il ne supporte plus de vivre parmi les autres, ne supporte pas non plus la solitude. Éternel insatisfait, il est sans cesse habité par le besoin de résoudre un problème, puis un autre, et un autre, car se présente toujours à lui une chose encore plus importante et plus urgente à régler. « Je suis un homme malade » nous dit-il, mais est-ce bien lui qui est malade, ou la société dans laquelle il évolue ? —— « L’homme normal… J’envie cet homme. Je ne le nie pas : il est bête. Mais, qu’en savez-vous ? Il se peut que l’homme normal doive être bête. » —— Simon Pitaqaj travaille depuis 2008 aux Carnets du sous-sol de Dostoïevski. Né à Gjakovë, au Kosovo, il a été formé à l’atelier d’expression théâtrale Radka Riaskova et auprès d’Anatoli Vassiliev.


Section vidéo


Travail corporel Cintia Menga
Regard extérieur Claude Maurice Baille, Mathilde Bost
Scénographie Simon Pitaqaj
Éclairages Flore Marvaux
Photo Alexandra Camara

Au guichet : Régulier 26 $, aîné 23 $, 30 ans et - et membres 21 $, groupes (15 personnes +) 18,50 $, étudiant en théâtre 16 $
Par téléphone et en ligne : régulier 28,50 $, aîné 25,50 $, 30 ans et - et membres 23,50 $, groupes (15 personnes +) 18,50 $, étudiant en théâtre 18,50 $

Production Théâtre Liria (France)


Salle intime du Théâtre Prospero
1371, rue Ontario est
Billetterie : 514-526-6582

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Critique

Crédit photo : Alexandra Camara

Tandis qu’au rez-de-chaussée se joue à la roulette le destin des hommes et des femmes du Joueur, un étage plus bas, le public se glisse dans les pensées de L’homme du sous-sol, spectacle tiré des Carnets du sous-sol de Dostoïevski.

Le sous-sol du Prospero offre à la proposition insolite du Théâtre Liria un écrin tout naturel. Les spectateurs s’y entassent d’abord dans un étroit couloir dont les murs sont recouverts de citations et de réflexions philosophiques. La vue partiellement obstruée par d’autres spectateurs, c’est par la voix de l’homme qu’on est guidé en premier lieu.

Doit-on opter pour un bonheur bon marché ou pour une souffrance qui coûte cher? Renoncer à son intelligence pour devenir un homme d’action ou s’interroger sur soi et sur la société humaine, quitte à gâcher sa vie, ses rêves et un possible grand amour? Enfermé depuis des années dans son sous-sol, un bric-à-brac fourre-tout tapissé de représentations de la Mona Lisa, de citations et de pans épars de sa pensée, un homme se présente à nous comme un ancien fonctionnaire et comme un homme ayant décidé d’être méchant.

Seul en scène, Simon Pitaqaj, qui signe aussi la mise en scène, l’adaptation et la scénographie du spectacle, livre une performance saisissante, et par moments étourdissante. Il accueille le public avant de commencer ses confidences, qui se déversent soudain à torrents. Sans qu’on puisse l’arrêter, l’homme nous expose avec lucidité et un certain cynisme ses observations sur les autres, ceux qui ne réfléchissent pas, mais agissent. Il passe d’un questionnement à un autre, interrompu à l’occasion par un chant polyphonique albanais, ce qui a l’heur de l’agacer prodigieusement.

L’avalanche de questions et de réflexions a de quoi décontenancer, mais Pitaqaj parvient toujours, et avec beaucoup d’habileté, à capter l’attention de ses invités, les apostrophant ou les interpellant sur telle ou telle observation. Et dans l’espace réduit du couloir, puis de la salle intime du Prospero, le public le suit dans sa quête d’authenticité et d’identité.

Dans son sous-sol, ce « trou dans lequel [il s’est] installé » depuis des années, l’homme souhaite nous démontrer qu’ « avoir une conscience développée est une maladie», un handicap qui l’empêche de mener à bien ce qu’il pourrait entreprendre. Au milieu du capharnaüm, qui illustre à merveille l’encombrement désordonné de son esprit et où s’entassent les souvenirs de lectures, de lieux, de gens, l’ermite glisse progressivement dans un emportement fiévreux qui l’enfonce encore davantage dans le marasme.

Au sortir de la salle, il est difficile de se raccrocher à un seul élément de ce soliloque parfois rageur, parfois résigné, mais, chose certaine, on emporte avec soi une petite partie de ce sous-sol, sorte de caverne-grenier, et de l'insaisissable pensée de cet homme reclus.

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