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Titus
Du 13 au 24 février 2018

Titus Andronicus est sans doute le texte de Shakespeare le plus controversé et le plus masculin, selon les normes établies. Il donne à imaginer un monde où les pulsions se déchaînent en une sanglante tragédie ridiculement insensée. Ces matériaux d’une terrible richesse sont ici adaptés et offerts aux femmes d’aujourd’hui, elles aussi sauvages et puissantes. S’inscrivant dans un nécessaire courant de réappropriation féminine du répertoire théâtral classique,TITUS est farouche et minimaliste, à la recherche de l’humain fondamental et animal, tapi derrière les catégories séculaires qui le définissent.

Œuvre libre, monstrueuse et pourtant joyeuse, TITUSdépeint les combats de notre temps : nous, qui sommes perdus dans l’individualisme, alors que nous cherchons à tâtons l’individuation émancipatrice ; stoïques devant les horreurs du monde, et pourtant hypersensibles. Dix interprètes sur scène, femmes et hommes, feront corps pour avoir le droit d’être ce qu’ils sont, et rien d’autre.


Texte William Shakespeare
Traduction André Markowicz
Mise en scène Édith Patenaude
Avec Mykalle Bielinski, Caroline Boucher-Boudreau, Véronique Côté, Marie-Hélène Lalande, Catherine Larochelle, Dominique Leclerc, Joanie Lehoux, Anglesh Major, Guillaume Perreault, Anne Trudel


Crédits supplémentaires et autres informations

Appui dramaturgique Joanie Lehoux
Musique Mykalle Bielinski
Lumières Jean-François Labbé

Mardi 20h, mercredi 19h, jeudi-vendredi 20h, samedi 16h

Rencontre avec le public : 21 février

TARIFS
Scène principale - régulier 35$, sénior 65 ans et + 28$, 30 ans et - / membres 26$
Scène intime - régulier 28$, sénior 65 ans et + 25$, 30 ans et - / membres 23$
Les prix incluent les taxes, commande en ligne ou par téléphone : frais de service de 3$ par billet

La pièce sera jouée au Théâtre Périscope (Québec) du 17 novembre au 2 décembre 2017

Une production Les Écornifleuses


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Critique disponible
            
Critique

autre critique disponible, lors de la création à Québec en 2017


Crédit photo : Charles Fleury

Après Québec, voilà que le Titus d’Édith Patenaude vient déverser sa colère sur Montréal. Présentée au Théâtre Prospero jusqu’au 24 février, cette adaptation de l’œuvre shakespearienne a de quoi en surprendre plus d’un. Que ce spectacle plaise à certains ou qu’il en choque plusieurs, il est difficile de ne pas reconnaître l’audace des Écornifleuses. S’opposant à la notion de genre, Patenaude frappe fort dès la lecture du programme. Donnant les rôles masculins à ses actrices alors que Tamora et Lavinia sont personnifiées par des hommes, la metteure en scène vient clairement appuyer le penchant féministe du spectacle. Tragédie où la vengeance et la mort s’allient contre le changement et l’inconnu, la morbide destinée des Andronicus se prête évidemment bien à une réactualisation. Certes, est-ce prendre un peu trop de liberté que d’offrir une scène presque vide aux spectateurs, de costumer les comédiens avec ce qui pourrait se retrouver aux objets perdus d’un collège et, enfin, de s’amuser à proposer une fin cathartique alors que le texte dénonce justement la violence humaine ? Là est la question !

N’en déplaise à Shakespeare, il est vrai que son Titus abonde en violence et en meurtres au point de frôler l’hérésie. L’idée d’en souligner la présence, non par le geste, mais en clamant les didascalies qui s’y rapportent semblent une belle façon de démontrer l’usage abusif de violence tout en banalisant le crime commis, tel un fait rapporté parmi d’autres. Dénonciation réussie pour la metteure en scène qui dit « en [avoir] contre le système qui préfère l’accumulation à la profondeur. » D’ailleurs, si tous ne s’en tiennent qu’à ces mots, il est clair que Patenaude a soutenu sa pensée. Minimisant son dispositif scénique par deux rangées de chaises placées face à face, elle laisse à ses comédiens tout l’espace scénique pour défendre la profondeur du texte. Dommage que, chez certaines comédiennes, un manque d’aplomb semble se remarquer. Il n’est pas toujours facile d’incarner le sexe opposé... À l’inverse, Guillaume Perreault offre une Tamora maligne et féroce qui, aidée du gabarit de son interprète, s’impose avec une puissance agréablement menaçante. Dans le cas d’Anglesh Major, il est étonnant de constater que, malgré sa stature assez masculine, ce dernier paraît plutôt fragile en Lavinia. Bien sûr, dans l’ensemble, la performance de tous était agréable, mais sans plus. Peut-être aurait-il été préférable de revoir le choix de costumes afin de gagner en crédibilité… Les personnages ont beau agir en « bêtes de cirque », il n’est certainement pas nécessaire de leur en donner l’allure.

Côté musique, les arrangements sonores de Mykaelle Bielinski sont dignes de mention. Sans empiéter sur le travail de Patenaude, la musicienne a tout de même su trouver des harmonies à la fois subtiles et impétueuses qui permettent de maintenir une certaine tension tout au long de la pièce. Dans la peau de Bassianus également, Bielinski laisse parfois les tambours à ces collègues pour assurer ce rôle. Les autres femmes se partagent les autres personnages importants, tout en mentionnant de temps à autre leurs rôles. Bien que cela soit inévitable et, tout à fait, compréhensible, nul besoin d’arrêter la représentation pour le préciser. Des changements plus perceptibles dans les timbres de voix et l’attitude de chacune auraient, sans doute, pu contenter le public. D’un autre côté, quelle excellente manière de bouleverser les conventions et susciter l’attention ! L’adaptation du texte paraît aussi viser un effet similaire. « Fuck you », « cool » et « tabarnak » ne sont que quelques exemples d’expressions qui, mise à part provoquer quelques rires dans la salle, ne paraissent qu’être une source de distraction nuisible à la prise de conscience générale. Shakespeare, auteur de l’absurde… Vraiment ?

Quoi qu’il en soit, voici une version de Titus qui saura certainement provoquer un violent excès de surprise. Spectacle à la conception modeste et truffé de langage grivois, il est évident que le style shakespearien s’en trouve quelque peu « défleuri », et ce, assez crument. Devant un tel crime, plusieurs seront offusqués alors que d’autres en seront amusés. À aimer ou à détester : cela reste à voir… Par contre, chose certaine, Les Écornifleuses restent audacieuses.

15-02-2018
 

Théâtre Prospero
1371, rue Ontario est
Billetterie : 514-526-6582

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