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Du 23 avril au 18 mai 2013, 20h, vendredi 19h, samedi 16h, dimanche 5 mai 15h
Les vendredi à 19h et samedi à 16h, première partie Cleaning de Simon Lacroix
SurvivreSurvivre
Texte Olivier Kemeid en collaboration avec Eric Jean
Mise en scène Eric Jean
Avec Anne Casabonne, Sylvie Drapeau, Laurie Gagné, Renaud Lacelle-Bourdon, Martine-Marie Lalande, Olivia Palacci et André Robitaille

Après Les mains et Une ardente patience, Eric Jean et Olivier Kemeid se réunissent à nouveau pour explorer avec esprit et dérision l'univers d'un bureau qui risque de nous sembler si étrangement familier.

Au beau milieu du travail,
nous rêvons violemment de verdure sauvage,
de contrées désertiques, uniquement parcourues
par la civilisation ténue des fils du téléphone.
Tomas Tranströmer, « Aux confins du travail », Accords et traces.

Ils sont sept et travaillent sans relâche dans un sous-sol ou un centième étage qui ressemble à tous les sous-sols et à tous les centièmes étages des tours à bureaux des villes modernes. Leur travail est important, essentiel à la marche du monde mais quelle est sa nature, on ne pourrait le dire. D’élans de solidarité en petites actions mesquines, de froideur clinique en érotisme fugace, de censures défensives en sursauts libérateurs, ils avancent dans le long écoulement des travaux et des jours à l’aide d’écrans, de claviers, de téléphones et de photocopieurs.

Place au carnaval de la condition humaine, aux prises avec ce que l’on nomme en nos temps contemporains « l’aliénation du travail », cette nouvelle forme d’esclavage qui repose sur l’un des postulats les plus troubles de notre histoire : cette idée que le travail rendrait libre.


Assistance à la mise en scène et régie Stéphanie Raymond
Scénographie Pierre-Étienne Locas
Costumes Cynthia St-Gelais
Lumières Martin Sirois
Conception sonore Vincent Letellier
Maquillages et coiffures Florence Cornet



PREMIÈRE PARTIE

En marge du spectacle Survivre, le Théâtre de Quat’Sous propose Cleaning, une courte pièce de Simon Lacroix, artiste en résidence. Le texte de la micropièce se déroulera à même le décor du spectacle Survivre, en lever de rideau, juste avant les représentations du vendredi à 19 h et du samedi à 16 h.

Le public y découvrira l’écriture vive et drolatique de Lacroix, jeune auteur et comédien, qui révèle des personnages assoiffés de grandes destinées, alors qu’ils sont confinés à effectuer des ménages de nuit dans d’anonymes tours à bureaux. Tour à tour hommes et femmes de ménage, voleurs ou voyeurs, ils tenteront de conquérir un espace infini où règnent bureaux, classeurs et photocopieurs.

Comédien, auteur et metteur en scène, Simon Lacroix  est issu de la promotion 2011 du Conservatoire d’art dramatique de Montréal. Alors que l'on a pu le voir récemment dans le très apprécié Projet Bocal,  il planche sur quelques actions artistiques singulières et un projet majeur d’ici quelques saisons dans le cadre de sa résidence au Quat'Sous.

Texte Simon Lacroix  Avec Simon Lacroix, Julien Hurteau et Raphaëlle Lalande

Un rendez-vous à ne pas manquer et inclus dans le prix du billet de Survivre!

HORAIRE
Vendredi 26 avril, 3 mai, 10 mai et 17 mai à 19h
Samedi 27 avril, 4 mai, 11 mai et 18 mai à 16h



Une production du Théâtre de Quat'Sous


Quat'Sous
100, ave. des Pins Est
Billetterie : 514-845-7277

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 Critique
Critique

par Daphné Bathalon


Crédit photo : Yanick Macdonald

Le travail rend libre. Tel est le message général martelé par notre société de performance et de production. Et pourtant, qui n’a jamais goûté, ne serait-ce qu’un peu à l’aliénation qui guette les travailleurs, acculés à la routine de 9 à 5, du téléphone qui sonne, des ordinateurs qui déraillent, des réunions qui s’éternisent, des collègues de travail que l’on n’a pas choisis et qui ne nous sont pas toujours bien accordés? C’est sur cet univers rarement exploré au théâtre qu’ont choisi de se pencher le metteur en scène Éric Jean et l’auteur Olivier Kemeid avec Survivre, présentée au Quat’sous jusqu’au 18 mai.

Dans un décor on ne peut plus beige – du tapis au plafond –, on retrouve tout l’équipement de bureau nécessaire à une journée de travail : tables, bureaux, ordinateurs, téléphones, classeur, papiers, beaucoup de papiers…  oh, et des travailleurs, tout aussi ternes que le décor intemporel dans lequel ils évoluent. Ils sont à peine illuminés par les néons fatigués qui les surplombent. Vêtu d’un veston vert malade qui le rend plus blême que jamais, le personnage d’André Robitaille incarne bien tout le malaise du travailleur pris dans le carcan du travail et de la routine. Autour de lui, ses collègues de bureau ne sont pas plus vigoureux, répétant chaque jour dans l’ordre les mêmes gestes. Ils sont si englués dans ce marasme que leurs vêtements ont pris les teintes de leurs chaises. Ils n’attendant plus qu’une seule chose : 17 h, la fin de la journée.

Kemeid et Jean s’intéressent aux six personnages « littéralement prisonniers de ce bureau, confinés à la tâche, dépossédés de leur âme, privés d’empathie », que l’apparition d’un jeune homme au fort charisme va libérer. Son apparition fait également remonter à la surface leurs fantasmes et leurs désirs en plus de révéler leur véritable nature. La dynamique change du tout au tout. Commence alors un étrange jeu de survie, genre de sélection naturelle où le plus fort restera dans le bureau alors que tous les autres se seront éliminés. « Fin de partie. T’es out », déclarera ainsi la dernière résistante.

La première partie du spectacle d’à peine une heure dix fait rire à plusieurs reprises (parfois jaune) les spectateurs, qui peuvent reconnaître dans cet univers robotisé les travers des relations humaines en milieu de travail et leur lot d’irritants potentiels. Le texte, réduit à très peu de mots, fonctionne bien dans un premier temps, car la critique du monde du travail aliénant passe par la pantomime des comédiens. La seconde partie est beaucoup plus décalée, voire onirique, brisant le rythme et laissant quelque peu en plan le public, qui tente de suivre l’action. La remise en question du dogme de la liberté par le travail frappe alors moins fort.

Heureusement, les comédiens, impliqués dès le départ dans le processus de création grâce à des improvisations, s’en sortent bien, surtout André Robitaille, qu’on voit trop peu au théâtre, et Renaud Lacelle-Bourdon, qui n’a pourtant pas un mot à dire de toute la pièce. Il a une présence magnétique, rendue quasiment obsédante par sa manière de surgir de tous les recoins du décor.

Survivre contient une critique virulente de l’aliénation en milieu de travail, mais manque finalement de mordant.

À noter que la représentation du 25 avril était précédée d’une courte pièce écrite par Simon Lacroix, auteur en résidence au Quat’sous, et créée spécialement dans le décor de Survivre. Histoire de concierges et d’espionnage, Cleaning démontre à nouveau le talent de l’auteur pour l’humour absurde.

29-04-2013