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Du 11 septembre au 6 octobre 2007
Présenté en tournée lors des Sorties du TNM du 13 au 27 novembre 2007 (salle Albert-Rousseau de Québec le 20 novembre) et au Théâtre français du Centre national des arts à Ottawa du 11 au 15 décembre 2007
Supplémentaires 10-11 octobre 20h

L'Iliade

D'après Homère
Adaptation et mise en scène d'Alexis Martin
Avec Vincent Bilodeau, Daniel Brière, Stéphane Demers, Patrick Drolet, Alexandre Fortin, Tania Kontoyanni, Jacinthe Laguë, Jean Maheux, Marie Michaud, François Papineau, Marthe Turgeon

Cap sur l’Homère patrie  
Revoilà donc Hélène, enlevée par Pâris et emmenée à Troie, que son époux Ménélas vient chercher avec l’armée des Grecs menée par Agamemnon qui, pour apaiser la déesse Artémis et calmer les vents, doit se résoudre à sacrifier sa fille aînée Iphigénie. Revoilà 50 000 Grecs débarquant d’un millier de bateaux pour affronter 25 000 Troyens, à la tête desquels se trouve Hector, fils de Priam et d’Hécube, qui témoigne d’une noblesse jamais atteinte par les divinités célestes. Et revoici Achille, l’homme tourmenté et imprévisible, le meilleur et le plus valeureux de tous les chefs, promis à une vie brève et à une gloire posthume, car les héros, on le sait, meurent jeunes. Achille est celui par qui s’ouvre L’Iliade, ce premier document écrit de la Grèce ancienne qui déploie une série de figures dont les histoires se mêlent pour dépeindre les ruses et les fureurs de la guerre. En lever de rideau de sa saison, le TNM vous invite à un retour aux sources, vers cette oeuvre qui nous redit combien les mythes fondateurs ont toujours aidé les hommes à mieux comprendre leur réalité présente. Il y a sept ans déjà, Alexis Martin adaptait L’Odyssée. Le voici qui fraternise de nouveau avec Homère et avec les premiers héros de la littérature occidentale. Il nous fait aimer leurs malices, leurs trahisons et leur complexité, et transforme ces dieux et demi-dieux en êtres de chair et de sang infiniment près de nous, porteurs de ce récit fondateur et confrontés à des choix moraux qui mettent en balance instinct de survie et sens du devoir. Relisant pour nous, avec nous, les chants de L’Iliade, Alexis Martin nous les raconte et nous en dévoile les secrets, les ellipses et la puissante modernité. Mais Alexis Martin, on le sait, est un ironiste patenté qui ne risque pas de faire de L’Iliade un péplum, avec glaives, boucliers, cuirasses et sandales lacées! Avec l’humour déjanté qui est le sien, accompagné de François Papineau, qui incarnait Ulysse avec fougue et qui ici défendra l’honneur d’Achille, Alexis Martin donnera à cette épopée divine et mortelle une vision amusée et toute personnelle! La guerre de Troie aura bien lieu, mais peut-être pas là où on le croit!

Les concepteurs : David Gaucher / Judy Jonker / Martin Labrecque / Denis Gougeon / Yves Labelle
Conseiller dramaturgique : Georges Leroux - Assistance à la mise en scène et régie : Claude Lemelin

Une création du TNM

Théâtre du Nouveau Monde
84, rue Sainte-Catherine Ouest
Billetterie : 514-866-8668

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par David Lefebvre

En 2000, puis en 2003 à la PdA, le Théâtre du Nouveau Monde nous présentait l'incroyable Odyssée, adaptée de main de maître par Dominic Champagne et Alexis Martin. Cette pièce avait touché tant d'âmes et de coeurs, que la télé de Radio-Canada avait présenté, en direct, la 103e représentation. Près de 8 ans plus tard, Alexis Martin nous propose l'Iliade, ses héros Agamemnon, Ménélas, Ulysse, Pâris, Hector, Nestor, Andromaque, Hélène, Patrocle, Achille, opposés dans la cruelle guerre de Troie. Bien entendu, les dieux, qui régissent en tout point le destin des hommes, supervisent, se contrecarrent, créent le déchirement des troupes pour des trésors de guerre, et favorisent un clan ou un autre. Oubliez l'enlèvement d'Hélène par Pâris ou encore le cheval de bois ; l'épopée ici présentée, séparée en 24 chants, se concentre sur la défection d'Achille des rangs grecs ; en perdant leur meilleur guerrier, les Achéens perdent du terrain. Le dernier chant se termine avec la mort d'Hector, le héros de Troie, infligée par un Achille en furie, vengeant la mort de son meilleur ami Patrocle.

Ce récit en est un sur le courage, les valeurs héroïques et patriotiques, l'honneur : l'honneur du chef (Agamemnon), du guerrier (Achille) et de la force qui donne (tous) les droits. Sur la colère aussi, la vengeance, l'orgueil. De ce côté, Alexis Martin a réussi l'exploit de bien cerner les enjeux, de les rendre compréhensibles, accessibles, et de synthétiser, dans une langue tragique, cette histoire complexe, politique et militaire, mortelle et divine. C'est au niveau de la mise en scène et des choix dramaturgiques que le bât blesse. Alors qu'on conserve l'essence du récit dans un texte poétique, homérique, l'équipe a pris la décision, sans contredit audacieuse, de moderniser les traits, les habits et les lieux. La guerre légendaire, par les costards et les chapeaux de laine, par cet espace unique aux airs de taverne (pour le clin d'oeil à la tradition orale), devient une querelle entre clans de gangsters. Il faut noter les échafaudages qui permettent deux niveaux, un pour les dieux, l’autre pour Troie, et le tout pour les remparts de la ville. Des mots comme «bouclier», «lance» et autres liens directs avec l'Antiquité deviennent anachroniques. Le lien entre ces gangsters et les dieux, omniprésents dans les injures ou les prières, semble aussi déplacé. On a bien voulu symboliser les traits humains, certes, comme la jalousie, le pouvoir, la passion, au travers des querelles amoureuses et incestueuses de Zeus et d'Héra, des agissements d'Aphrodite ou d'Athéna, mais la présence de ces derniers, représentés de diverses façons (Zeus en costume chic et cigarette au bec ou Héra en hystérique, aux cheveux et robes appropriés) forment, avec le reste, un tout si hétérogène qu'on tue à plusieurs niveaux les émotions, le suspense et la tragédie. Certaines scènes nous paraissent alors ridicules, d'autres deviennent de mauvais compromis. Quelques projections (images d'ombres, marionnettes) sont utilisées, mais n’apportent que peu de choses au spectacle. Certaines d’entre elles sont étonnamment «low tech» et nous plongent encore plus profondément dans notre hébétude et nos doutes.

Au niveau de la narration active (confiée à l'actrice Marthe Turgeon), le ton se situe entre le drame et la fausse ironie. Malgré toute la bonne volonté, elle n'arrive pas du tout à nous convaincre, ni à nous intéresser outre mesure à l'histoire en cours. Ce rôle est pourtant l'un des plus importants, faisant office de messager, d'explications, de liens entre les événements. C'est navrant.

Par chance, le talent au niveau du jeu de la plupart des comédiens sauve la mise in extremis. François Papineau interprète un Achille habité uniquement de sa colère. Il bout, gueule, reste entêté, mais avec gloire. Jean Maheux, du haut de sa grandeur physique et morale, personnifie et impose le roi Agamemnon avec panache, sans rivalité. Certains nous offrent des rôles diamétralement opposés et surprennent, comme Jacinthe Laguë (une Andromaque qui a peur pour son mari et son enfant, et une Aphrodite des plus allumeuses) ou Tania Kontoyanni (en Athéna et Hélène).

L’Iliade est assurément l’un, sinon LE texte majeur de la littérature grecque ancienne. Est-ce qu'après l'Odyssée, la barre et nos attentes étaient trop hautes ? Il est tragique de voir à quel point le spectacle prend une tournure dérisoire, à cause de certains choix, et cause une amère déception. Ce qui est certain, c’est que cette version de l’Iliade ne fera pas l’unanimité et causera plusieurs débats.

15-09-2007