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Candide ou l'optimisme
Du 11 septembre au 6 octobre 2018

Voltaire a pris un plaisir inégalé à être férocement drôle, que ce soit pour combattre l’injustice ou ridiculiser les idées rétrogrades, conscient que ses moqueries étaient plus acérées que n’importe quelle épée. L’auteur Pierre Yves Lemieux, qui connaît si bien son Voltaire, a décidé d’adapter pour la scène le plus pétaradant de ses contes philosophiques, s’inspirant de la méthode de travail de l’écrivain qui, dans son château de Ferney avec sa maîtresse, son secrétaire et deux comédiens de ses amis, aimait mettre à l’épreuve ses écrits en les jouant comme au théâtre !

Le jeune, aimable et joli Candide grandit avec grâce au château de Thunder-ten-Tronckh où son précepteur, Pangloss, lui répète que « les choses ne peuvent être autrement », ce qui est juste et bien vu, et qu’ils vivent dans « le meilleur des mondes possibles ». Mais lorsque le baron surprend Candide en train d’embrasser sa fille Cunégonde, il le chasse à coups de pied. Et voilà Voltaire qui s’amuse à balloter Candide de désastres en catastrophes en compagnie de Cunégonde et de Pangloss — qui lui rappelle que les choses étant ce qu’elles sont, tout va pour le mieux dans l’ordre du possible !

L’étourdissant Emmanuel Schwartz fait de nouveau équipe avec sa complice de toujours, la metteure en scène Alice  Ronfard, pour jouer ce Voltaire qui entraîne Valérie Blais — enfin de retour au théâtre pour interpréter la truculente Madame Denis —, Benoît Drouin-Germain, Patrice Coquereau et Larissa Corriveau en Candide, Pangloss, et Cunégonde ainsi que des douzaines d’autres personnages.


Une création pour la scène de Pierre Yves Lemieux d’après le roman de Voltaire
Mise en scène Alice Ronfard
Avec Valérie Blais, Patrice Coquereau, Larissa Corriveau, Benoît Drouin-Germain, Emmanuel Schwartz


Crédits supplémentaires et autres informations

Conception Danièle Lévesque, Marie Chantale Vaillancourt, Cédric Delorme-Bouchard, Éric Gagnon, Tomas Furey, Julie Measroch, Angelo Barsetti
Assistance à la mise en scène Claude Lemelin

Mardis 19h30, mercredis au samedis 20h, certains samedis 15h

Discussion avec l'équipe du spectacle après la représentation du 3e mardi

Production Théâtre du Nouveau Monde


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Critique disponible
            
Critique

photos non traitées - Crédit photographe : Yves Renaud






Crédit photo : Yves Renaud

Nouvelle collaboration entre l’auteur Pierre Yves Lemieux et la metteure en scène Alice Ronfard après Tristan et Yseult en 2009, le spectacle Candide ou l’Optimisme ouvre la saison du TNM dans le rire et la simplicité.

Voltaire (Emmanuel Schwartz) et son entourage, qui incarne les personnages colorés du fameux roman philosophique de l’auteur, s’approprient une scène presque vide pour en faire une salle de répétition ou tout accessoire devient décor. « Le meilleur des mondes possibles » devient vite un vaste terrain de jeu où de fabuleux comédiens donnent à voir un spectacle d’une grande théâtralité qui propose une mise en abîme bien claire. Le public est donc invité à être témoin d’une répétition de Candide, comme Voltaire semblait le faire de son vivant, afin de faire avancer son écriture. Ainsi, le secrétaire du célèbre écrivain (Benoît Drouin-Germain) deviendra son Candide, sa compagne (Valérie Blais) se donnera corps et âme pour narrer quelques passages du texte tout en défendant les rôles de femmes nobles qui croiseront la route du protagoniste à la recherche de sa Cunégonde, personnage joué par une précédente conquête du romancier, soit Mademoiselle Adrienne (Larissa Corriveau). Quant au personnage de Pangloss, il est assuré par Armand Lebault (Patrice Coquereau) qui, en plus de conseiller Voltaire à maintes reprises, se révèlera doué pour apporter une touche d’humour au texte du philosophe malgré les réticences de ce dernier.

« Le meilleur des mondes possibles » devient vite un vaste terrain de jeu où de fabuleux comédiens donnent à voir un spectacle d’une grande théâtralité...

Si le scénario d’un auteur qui coexiste avec ses personnages reste du déjà-vu, il n’en demeure pas moins que le texte de Lemieux permet largement à Ronfard de mettre en lumière l’aspect ludique du conte. Même si un jeu un peu plus senti, moins caricatural, aurait certainement servi à honorer davantage la richesse de chacun des personnages de l’œuvre originale, force est d’admettre qu’une telle direction d’acteurs s’avère efficace pour transmettre le désir de divertir présent dans le récit que Voltaire avait, semble-t-il, tant cherché à faire valoir de son vivant dans une époque où l’intellectualisation de l’art paraissait être une obligation. Malgré quelques longueurs en raison d’une accumulation trop nombreuse d’effets comiques enchaînés un à la suite de l’autre, il est impossible de nier que la metteure en scène a réussi à exprimer tout ce ludisme alors que l’amusement ne cesse d’animer les traits de la foule de manière générale. Sur ce point, il faut dire que toute la distribution a son moment de gloire. Alors que les spectateurs s’esclaffent devant les colères de Voltaire, l’accent de Cacambo, interprété par Coquereau, en fait rire plus d’un, de même que la drôle de voix de la sage d’Eldorado, figure personnalisée par Blais très représentative du lieu mythique que Candide, ne manquant jamais la chance de divertir par son enthousiasme débordant, a le plaisir de visiter dans sa quête. Attriqués de costumes conçus par Marie-Chantale Vaillancourt dont les teintes sont, sans surprise, très explicites sur le caractère des personnages, ils ne peuvent être que plus comiques.

Ayant pour toile de fond, une animation vidéo projetée sur grand écran réalisée par Danièle Lévesque, rappelant l’aspect onirique d’un conte, l’espace scénique n’est habité que par une grande table, un fauteuil et quelques sièges, de véritables jouets dont les acteurs dispose à leur guise pour suggérer les différents lieux du texte. À cela, il a été intégré un majestueux lustre illuminé, fabuleux travail de Cédric Lord, Danièle Lévesque et Gabriel Duquette, planant au-dessus des acteurs qui descend progressivement à la toute fin comme pour exprimer l’illumination des esprits ou encore accuser plus clairement cette théâtralité qui permet un discours final assez engagé sur la liberté d’expression souvent punie au temps de Voltaire et sévissant encore aujourd’hui. Appuyé par la lourdeur de la musique originale de Tomas Furey, ce passage constitue un beau moment de réflexion après tant de folies.

Après près de deux heures à être spectateur du talent de si bons interprètes, il est évident que ce spectacle saura satisfaire les amoureux de cet art même si la mise en scène amène l’absurdité à un point tel que le Candide qui en a fasciné plusieurs, à la lecture du roman, perd un peu de sa substance. Ronfard présente tout de même Candide et l’Optimisme avec un regard qui invite au divertissement et qui mérite de sincères applaudissements.

14-09-2018


TNM
84, rue Sainte-Catherine Ouest
Billetterie : 514-866-8668 ou en ligne

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