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Du 29 novembre au 20 décembre 2015
Tribes
By Nina Raine
Directed By Sarna Lapine
Starring Daniel Brochu, Greg Ellwand, Toni Ellwand, Lisa Norton, Andrea Runge, Jack Volpe

“How can you feel a feeling unless you have the word for it?”
The only deaf member of an eccentric, intellectual family, Billy longs to be heard. When a romance with a woman who teaches him sign language opens him up to a new world of self-expression, Billy discovers that instead of trying to fit into his family's world, he can break out and find his own. Quick-witted, funny and moving Tribes is a powerful look at language, love, and what it truly means to be understood.


Décor et accessoires Lara Dawn de Bruijn
Costumes Louise Bourret
Éclairages Nicolas Descôteaux
Vidéo George Allister et Patrick Andrew Boivin
Conception sonore Dmitri Marine
Assistance à la mise en scène Jennifer Roberts

Tickets starting at $44

SUNDAY @ THE SEGAL Pre-show chat*: NOVEMBER 29 AT 11:00 A.M.
MONDAY NIGHT TALKBACKS post-show conversation*: DECEMBER 7 & 14

*Presented with ASL Interpretation

#SEGALTRIBES

A Segal Centre Production


Section vidéo


Théâtre Segal
5170 Cote St. Catherine Rd
Billetterie - Box Office: 514-739-7944

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Critique

Crédit photo : Andrée Lanthier

Sommes-nous capables de nous parler? Au-delà des codes et des langages, sommes-nous en mesure de communiquer les uns avec les autres? Comment exprimer ce qui ne se dit pas avec les mots? Tribes analyse ces questionnements à travers une pièce drôle et pleine de sens. Ce huis clos familial met en scène Billy, un jeune homme sourd qui vit avec ses parents - un couple de bourgeois intellos - son frère et sa sœur revenus habiter le cocon familial. Eux entendent et parlent normalement. Et surtout, ils crient.

Dans cette famille d'excentriques, tout le monde a la fibre créative: ça rédige une thèse sur le langage, ça chante, ça écrit des romans, ça apprend le chinois... Autant de façons de communiquer, pour des personnages paradoxalement incapables de se parler. La famille se dispute et se critique à longueur de journée. Ces chicanes interminables sont dans le fond une preuve d'amour: les membres de cette tribu sont incapables de se passer les uns des autres, et les joutes verbales sont leur moyen de communication. Le problème, c'est que Billy est exclu de ces disputes du fait de sa surdité.

Car, convaincus que le langage des signes est une façon d'enfermer la personne sourde dans son handicap et de renforcer sa différence, les parents de Billy ne lui ont jamais fait apprendre le langage des signes. Si le jeune homme a appris au fil du temps à lire sur les lèvres, il reste en dehors malgré lui de la plupart des conversations familiales de groupe. Il devient ainsi le membre à part, celui qui ne se dispute avec personne, mais sait déchiffrer mieux que quiconque le langage corporel et comprendre les sentiments par les expressions non verbales.  

Pièce à l'anglaise, fin à l'américaine


Crédit photo : Andrée Lanthier

Dans la famille, on a la pique facile et le trait d'esprit habile ; le tout assaisonné d'humour anglais, et cynique à souhait. On rit : on rit à regarder les personnages se confronter à coups d'excellentes répliques signées par l'auteure Nina Raine - on en aurait presque hâte au souper de Noël pour retrouver cette ambiance affectueusement acide et passive-agressive propre à toute famille. Tribes, c'est la tribu familiale qui a ses codes, son langage propre et son argot personnel. Et puis il y a une autre tribu. Celle des sourds, versus celle de ceux qui ne le sont pas.

Car un jour, Billy tombe amoureux de Sylvia, jeune femme issue d'une famille de sourds et qui est elle-même en train de perdre l'ouïe. Elle enseigne le langage des signes à Billy et l'introduit dans son groupe de sourds. Billy y découvre un nouveau niveau de langage, dans un groupe où il ne rate rien des échanges. Il amène Sylvia dans sa tribu à lui - la scène du souper de présentation officielle est génialement drôle -, et se rend compte que sa famille fait plus d'efforts pour se faire comprendre de Sylvia qu'elle n'en a jamais faits avec lui.

Si on a adoré cette pièce et son ton à l'anglaise, on regrette un peu la scène finale en happy ending à l'américaine. Mais c'est une belle mise en abîme que cette plongée dans le monde des malentendants, guidée par un comédien lui-même sourd - chapeau bas à Jack Volpe, le Montréalais interprétant Billy, qui fait ses débuts sur les planches. Le spectateur ne peut qu'imaginer les difficultés pour jouer et répéter avec les autres ; dur de ne pas rater son entrée en scène quand on n'entend pas les répliques de ses collègues! La pièce a été saluée par une ovation debout de la part du public, qui a même applaudi en langue des signes. Les tribus se mélangent.

07-12-2015