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Du 11 au 29 mars 2014, du mardi au vendredi 20h, samedi 16h
AVALeAVALe
Conception et mise en scène Catherine Bourgeois
Texte collectif avec la collaboration de Jean-François Nadeau
Avec Anthony Dolbec, Michael Nimbley et Jacqueline van de Geer

Avaler, verbe
Faire descendre dans le gosier. Absorber, s’approprier. Accepter sans critique, supporter.

Aval, nom masculin
Le côté vers lequel descend un cours d’eau ; la partie inférieure d’un cours d’eau, d’une vallée. Ce qui vient après le point considéré, dans un processus.

Qu’arrive-t-il quand on a avalé trop de promesses et de mensonges? Quand on a accumulé en silence et qu’on s’est raconté trop d’histoires? L’aval devient colère.

AVALe suit la vie de deux quinquagénaires qui accumulent frustrations et désabusements, jusqu’au jour où une petite goutte fait déborder le vase de leur quotidien. Le bruit constant, les rénovations, la paperasse, une visite inattendue, une santé fragile, transforment un rouleau de papier de toilette vide en prétexte pour une séparation.

AVALe se penche sur la colère, celle qui, avant d’atteindre la sphère publique, prend forme dans l’intimité.

L’équipe s’est donc lancée dans l’investigation des petites colères personnelles qui souvent témoignent du néant qui habite les êtres humains. La compagnie poursuit son travail de recherche à travers des distributions atypiques, entre autres via des acteurs ayant une déficience intellectuelle. Leur voix écorchée, leurs rêves inatteignables, leurs limitations sociales et financières nourrissent le processus dramatique.

Explorant les frontières entre théâtre et performance, Catherine Bourgeois et l’équipe de Joe Jack et John proposent à travers un théâtre de recherche et de création à l’écriture collective, un questionnement sur un aspect propre à notre contemporanéité : la colère.

Le rythme cardiaque se précipite, le sang monte au visage, la respiration devient rapide, les mains se contractent, les sourcils se froncent, les mâchoires se serrent, les narines se dilatent et la voix s’amplifie. Être en colère jusqu’à en perdre les mots. Jusqu’à déblatérer des inepties en monosyllabes. Être en colère au point où l’on a l’impression de chuchoter, alors qu’on crie. Être en colère jusqu’à en perdre pied.

La colère, un des sept péchés capitaux, est pourtant un sentiment qui propulse et transforme. Une personne en colère est une personne qui n'a pas renoncé, elle est vivante, elle est porteuse de changement.


Collaboration au décor et conception des costumes Julie Emery
Musique Jez
Assistance et accompagnement Marilyne Fournier
Régie et direction technique Jeanne Fortin-L.

Carte Prem1ères
Cartes Prem1ères
Date Premières : du 11 au 15 mars
Régulier : 25$
Carte premières : 12,50$
30 ans et moins 22 $

Une production Joe Jack et John


Aux Écuries
7285, rue Chabot
Billetterie : 514 328-7437

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Dates antérieures

Présenté lors des chantiers du Carrefour international de théâtre 2013 (Québec)

 
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 Critique
Critique

par Gabrielle Brassard-Lecours


Crédit photo : Adrienne Surprenant

Les Écuries accueille ces jours-ci la nouvelle création de Joe, Jack et John (Just fake it), AVALe. Comme toutes les productions de la petite compagnie de théâtre atypique, AVALe est inclassable, et fait appel à des comédiens et à des formes hors normes.

La colère, les frustrations, les déceptions. Ce sont les thèmes prédominants de AVALe, un texte collectif, écrit avec la collaboration de Jean-François Nadeau. Ces thèmes ont une double signification, puisqu’ils parlent sans aucun doute aux acteurs qui interprètent cette pièce qui n’en est pas vraiment une. Chacun d’eux a une particularité, sur la scène comme dans la vie. Jacquie est une actrice trop vieille, trop moche, qui tente de se recycler en confectionneuse de cupcakes. Dans la vie, Jacqueline van de Geer est étrangère, et le français est sa troisième langue. Jacquie vit avec Michael dans une maison de carton. Michael (très bon Michael Nimbley, notamment avec sa voix unique) est un chômeur qui passe beaucoup de temps au téléphone et à flatter sa poule dans son jardin. Son personnage n’est pas si loin de son alter ego, qui est comédien au théâtre Les Muses depuis 10 ans, qui rêve d’habiter dans sa propre maison et qui voudrait travailler, mais ne peut pas, à cause de son handicap. Quant à Anthony Dolbec, artiste autiste, conscience de l’histoire, incarnée métaphoriquement dans un tigre, ultime représentation de la colère et de la rage qui les habitent tous, il interprète son rôle de narrateur et de chanteur, ce qu’il fait également dans la vie.

Tous, à leur façon, expriment à travers leurs personnages une partie de leur réalité quotidienne ; la colère de la différence, l’incapacité de faire certaines choses, de « rentrer dans le moule », l’accumulation de frustrations, de non-dits, jusqu’à l’explosion. La mise en scène de Catherine Bourgeois nous montre les trois personnages, ensemble, mais isolés, vivant chacun de leur côté leur colère en l’avalant, jusqu’à une scène complètement chaotique, où les cupcakes fendent l’air, un immense tigre gonflable fait exploser le toit de la maison, littéralement, et son rugissement se fait entendre à travers une scie mécanique. Le tout se termine par une douce chanson, comme pour rappeler une certaine nostalgie d’un temps plus serein.

Joe Jack et John s’est toujours démarqué dans ses créations par un théâtre non conventionnel, dans sa forme comme dans son contenu et par les comédiens choisis, qui viennent toujours d’horizons différents, que ce soit dans l’origine, le handicap ou la discipline. Ce trait est une fois de plus bien incarné dans AVALe, qui brise les conventions d’une histoire classique, d’un déroulement logique et d’une unique forme. Il s’agit en effet plutôt d’une performance ; le jeu est très physique et est mêlé à la musique (Jez), à la chanson, et à des éclairages (Martin Sirois) psychédéliques par moments, mais qui rendent bien le moment de l’histoire.

Un groupe de jeunes ayant une déficience a accompagné les comédiens tout au long de la démarche, commencée à l’automne. Présents dans la salle le soir de première, ils semblaient admirer et voir l’espoir que faire de l’art, quand on est différent, c’est possible, et ça donne quelque chose de tout à fait original et unique.

17-03-2014