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27 novembre 2016, 15h* (*rencontre avec les artistes)
Matinées scolaires : du 22 au 25 novembre
Les grands-mères mortes – une fête!
Dès 9 ans
Texte David Paquet et Karine Sauvé
Création Karine Sauvé, en collaboration avec Nicolas Letarte et David Paquet
Avec Nicolas Letarte et Karine Sauvé

Les Grands-mères mortes – une fête! propose à chacun de célébrer en musique, en folies douces et en autant de petits autels de fortune le souvenir et le legs d’une personne qu’on a aimée. Karine Sauvé a fabriqué ce spectacle dans une grande complicité avec David Paquet, pour le texte, et Nicolas Letarte, pour la musique. Elle nous convie à une véritable fête, une fête des morts comme il s’en vit dans certaines cultures.

Magnifique performance multidisciplinaire, elle dédie le spectacle à sa grand-mère et à deux de ses amies qui ont fait une différence dans sa vie. Elle fait plus que ranimer le souvenir de ces grands-mères. Elle nous les fait apparaître à partir d’objets et de matières, d’anecdotes pleines de tendresse et d’humour. Elle célèbre la douceur de leur relation et crée de toutes pièces un rituel nouveau pour se souvenir d’elles dans la vie, avec la vie.

Tout comme les enfants avec qui elle a discuté, Karine Sauvé a une réelle envie de réfléchir et de réinventer les rites qui sont rattachés à la mort. Cet artiste a plusieurs cordes à son arc, a étudié l’art de la marionnette et travaillé avec plusieurs maîtres, dont Nathalie Derome, bien connue pour ses performances multidisciplinaires.


Section vidéo


Musique : Nicolas Letarte
Installation : Karine Sauvé
Lumières : Thomas Godefroid
Direction de production : Manon Claveau
Régie : Amélie-Claude Riopel
Conseils à la scénographie : Julie Vallée-Léger
Conseils artistiques : Mélanie Charest, Sylvie Cotton, Maude Labonté et Émilie Laforest
Photo : Patrick Laroque

Durée environ 50 minutes

Sera aussi présenté à la Maison Théâtre du 13 au 23 octobre 2016

Production Mammifères


Les Gros Becs
1143, rue Saint-Jean
Billetterie : 418-522-7880 poste 1

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Dates antérieures (entre autres)

Résidence Aux Écuries en février 2013
Création évolutive 31 mai 2014, Maison de la culture Plateau-Mont-Royal
Du 12 au 21 mars 2015, Aux Écuries

 
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Critique

Entre la performance, la confidence et l’installation théâtrale, la toute première création de la jeune compagnie Mammifères, présentée ces jours-ci aux Gros Becs, aborde un thème universel à priori affligeant, celui de la mort. Pourtant, c’est sous une lumière joyeuse et sereine que la petite équipe saura parler de cet inéluctable événement.


Crédit photo : Crédit photo : Patrick La Roque

En trois actes, Karine Sauvé, magnifiquement à l’aise devant un jeune auditoire captivé précédemment par la musique aux accents de hip-hop produite en direct par Nicolas Letarte, nous présente trois dames d’un certain âge, décédées plus ou moins récemment. Il y a d’abord Simone, celle qui s’habillait chic pour regarder la télé ; Lucille, qui troquait les câlins contre les meilleurs sandwichs au monde, et Thérèse, sa grand-mère, aux oreilles bioniques. Trois femmes à la joie de vivre incontournable, aimant danser, maintenant parties vers un autre ailleurs. Karine, laissée seule derrière, propose alors au public de faire une fête pour se remémorer avec tendresse et un brin de folie ces personnes qui l’ont profondément marquée.

D’entrée de jeu, la comédienne (épaulée à l'écriture par David Paquet) raconte que c’est lorsqu’elle affronte la mort qu’elle se sent le plus vivante. Vivante : elle le sera, cette fête bien singulière, avec un brin de mélancolie, mais beaucoup de sourires. Avec douceur, elle plonge dans ses souvenirs pour mieux rendre hommage à Thérèse, Lucille et Simone, à qui elle a écrit des cartes postales d’adieux. Elle mentionnera quelques anecdotes, dont ce reportage animalier sur Coco la gorille qui savait signer mille mots et qui aimait danser au son de plusieurs musiques (disco, reggae, rock, techno, heavy metal, jazz – une vraie leçon musicale que propose Nicolas Letarte derrière sa batterie!). Coco aurait alors expliqué, en trois mots, ce qu’était la mort : confortable, caverne, au revoir. Et les trois mots de Simone furent : talons, hauts, blancs! Plus tard, guitare électrique en main, la jeune femme entonnera une composition personnelle, rappelant quelque air rock des années 80 avec un refrain des plus accrocheurs, qui parle des fameux sandwichs hors-norme de Lucille. Karine montera d’ailleurs le plus bigarré d’entre tous, à partir de tout ce qu’elle trouve dans un carré de terre, au grand dam des petits spectateurs qui font entendre – yark ! – leurs désapprobations.

La scène est remplie d’objets hétéroclites, symbolisant les traces du passage des gens maintenant décédés. Ces objets ont aussi une âme, que Karine saura (trop peu souvent, malheureusement) faire parler. Si certains (rares) moments évoquent davantage l’expérimentation scénique sans sens précis, la création est tout de même empreinte d’une jolie poésie déjantée, doucement audacieuse. Les nombreux câbles à vue soulèvent autant de questions que d’objets, dont de longs filaments reproduisant de grandes nattes, pour les quatre femmes en scène, qui onduleront pour une dernière danse, sous les mains d’une petite marionnettiste.

Les grands-mères mortes – une fête! tente (et réussit), d’une manière bien personnelle, d’amadouer la mort et l’absence, grâce à la mémoire et à l’amour. Michel Montaigne disait : philosopher, c’est apprendre à mourir. Je ne sais pas si on peut apprendre à mourir, mais on peut accepter son incontournable présence – autant alors s’inspirer des Haïtiens ou des Tibétains et en faire une fête !

23-11-2016


critique publiée en 2015

Après deux ans de résidence aux Écuries et un bref passage au festival Coups de théâtre, Les grands-mères mortes, de la compagnie Mammifères, prend enfin son envol dans la métropole.

Si le titre fait naître points d’interrogation dans le regard et haussements de sourcils, ne vous laissez pas pour autant rebuter par le spectacle, car cette « fête bricolée avec amour par deux vivants » est à la fois drôle, intelligente et touchante. Pour tout dire, Les grands-mères mortes vibre d’un amour grand et fort qui vous réconciliera presque avec la mort, celle qui s’invite quand on s’y attend le moins.

Loin d’être une production déprimante, Les grands-mères mortes chante la vie de trois charmantes vieilles dames et leurs petits bonheurs (danser, cuisiner, s’habiller chic pour regarder des documentaires animaliers à la télé…). Notre hôtesse, Karine Sauvé, nous convie à une célébration de la vie tout en respect et en sensibilité. Elle s’adresse directement au public pour mieux raconter cette relation de tendresse et d’amitié qu’elle partageait avec les vieilles dames. « C’est quoi la mort? » demande-t-elle dès le début. Une question à laquelle le spectacle répond de très belle manière : la mort est une somme de souvenirs, de petits et grands moments qui continuent de vivre en nous même après la disparition des êtres aimés. Sur scène, les trois chaises qui symbolisent les trois disparues sont peu à peu habitées, transformées, par ces souvenirs.

En musique et en chansons, Karine Sauvé et le musicien Nicolas Letarte nous font faire la connaissance de Lucille, qui échange des sandwiches insolites contre des câlins, de l’élégante Simone aux souliers blancs à talons hauts, et de grand-mère Simone, qui aime par-dessus tout danser. Avec quelques micros et des objets hétéroclites, les deux artistes créent par petites touches un univers sonore fascinant qu’ils émaillent de chansons tantôt très rythmées, à la guitare électrique notamment, tantôt plus douces, comme des ballades.

Même les objets racontent des souvenirs. Pour la jeune femme, la mort de Simone se définira toujours en trois mots : talons hauts blancs, comme ceux que portait la vieille dame. Quand ce ne sont pas les objets ou les sons qui évoquent la joie de vivre de ces chères disparues, ce sont les textures : tulle, pain tranché, pâte à modeler, terre, chevelure… Le spectacle a un côté ludique réjouissant et joue avec les sens du toucher et de l’ouïe auquel se mêle celui de l’odorat quand le récit évoque tous les étages d’odeurs traversés pour se rendre au logement de Lucille.

Les grands-mères mortes est une belle et touchante célébration de la vie, un hommage à ceux qui ont traversé notre existence. « La mort, ça réveille! » chante la jeune femme sur scène, et en effet, on se sent particulièrement et joyeusement vivant après avoir vu spectacle. La fête donnée Aux Écuries jusqu’au 21 mars est de celle qu’on ne veut pas manquer!

13-03-2015