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Du 15 janvier au 2 février 2008

Quand le sage pointe la lune,
le fou regarde le doigt

Idée originale et texte : Serge Bonin, Catherine Dorion et Nicola-Frank Vachon
Mise en scène : Marc Doré
Avec : Serge Bonin, Catherine Dorion et Nicola-Frank Vachon

Au milieu d’une sorte de dépotoir, vision apocalyptique de notre société de consommation en overdose, trois clowns plutôt décapants racontent l’histoire de notre époque. Ils s’y disputent, font l’amour, dansent, se font souffrir, s’émerveillent, meurent et nous décrochent la lune. Par des envolées loufoques et poétiques, ils s’amusent à dresser la liste des maux de notre âme et de notre planète. Plongeant allègrement la main dans les déchets de notre société, ils en ressortent les absurdités et les dérapages pour les recycler à leur façon. Ce trio nous entraîne dans son univers baroque à coup de « Pow! Pow! » et de « je t’aime ».

Avec Quand le Sage pointe la lune, le fou regarde le doigt, Le Soucide Collectif nous joue le monde. Sous son regard, la scène se transforme en un kaléidoscope infini qui nous redonne ce monde, entier, mais sans dessus et sans dessous.

Décor et maquillages : Vanessa Cadrin
Lumières et régie : Félix Bernier-Guimond
Costumes : Virginie Leclerc
Conception sonore : Nicola-Frank Vachon

Production Le Soucide Collectif
Codiffusion Théâtre Périscope

Périscope
2, rue Crémazie Est
Billetterie :418-529-2183

 

par Magali Paquin

Alors que la ville s’illumine au loin dans le crépuscule, trois bouffons pirouettent au milieu d’un dépotoir des illusions perdues. Le Théâtre du Soucide Collectif s’amuse ferme avec sa création «Quand le sage pointe la lune, le fou regarde le doigt », une pièce qui multiplie les propos irrévérencieux et ludiques sur la société de consommation, le monde du travail, la mort, le star-system ou l’intolérance. Ça tombe bien, le public aussi.

Arborant nez de clown et vêtements aussi farfelus que déguenillés, Serge Bonin, Catherine Dorion et Nicola-Frank Vachon s’imposent dans ce trio de comiques sympathiques et charmants. Ces clowns de l’âme culbutent d’une saynète à l’autre tout autant qu’ils jonglent avec les mots. Calembours et jeux d’esprits brillants se succèdent sans relâche, exigeant du spectateur une présence de tous les instants. Jamais celui-ci n’est toutefois traité en nigaud; on lui fait plutôt confiance pour saisir ce qu’il peut de cette kyrielle de critiques sociales et politiques, propulsées de tous cotés. Entre ces petites trouvailles, on a juste ce qu’il faut de grivoiserie et d’irrévérence pour plaquer un sourire au visage et rappeler qu’on a tout de même affaire à une bande de bouffons qui n’ont que faire de tourner sept fois la langue avant de parler.

La mise en scène de Marc Doré fait admirablement bien ressortir l’émotion et la tendresse qui se cachent derrière des apparences loufoques. Toujours, ce brin de poésie dans le mot et dans l’image attend au détour d’une phrase ou d’un geste. On y sent un plaisir fou de jouer, une authentique complicité et s’en extrait au final une fraîcheur qui se matérialise dans le rire du spectateur.

La pièce, présentée à Premier Acte en 2006, s’est peaufinée et renouvelée au fil de l’actualité, trouvant dans les événements politiques et sociaux récents matière à discourir. Certains de ces ajouts divergent quant à leur niveau de maîtrise; quelques représentations supplémentaires permettront certainement aux acteurs de mieux se mettre le texte en bouche. Certaines saynètes détonnent également d’avec l’ensemble, comme cette vieille dame qui râle contre les ethnies, dans un style qui s’apparente plus à l’humour à sketch qu’à la bouffonnerie. Mais d’autres scènes sont franchement épatantes. Nicola-Frank Vachon suscite d’ailleurs les applaudissements du public avec son lip-sync mémorable sur fond de musique classique.

Il est toujours intéressant pour le critique de  jeter un œil sur le cahier d’accompagnement d’une pièce et de comparer les ambitions des créateurs à sa perception personnelle du spectacle. Quand les deux s'accordent avec autant d’exactitude, c’est que les objectifs ont manifestement été atteints. N’est-ce pas là la véritable réussite ?

18-01-2008

 

par Yohan Marcotte (2006)

Ce spectacle vous sert de la folie en vrac. Trois clowns de théâtre disjonctés font une ronde et nous entraînent dans leur univers d’aliénation et aussi de créativité. Le décor qui est une accumulation d’objets divers sert de tremplin à l’imagination des trois comédiens. Parfois leur jeu devient très visuel : on s’amuse à créer des images en assemblant la matière disponible sous la main. D’autre part, le délire est aussi de l’ordre du langage. Il y a, entre autre, cette séquence où on vante l’importance d’avoir du « pow » et à partir duquel son, on fabrique les jeux de mots les plus farfelus.

À cette folie s’ajoute le regard sur ce qui rend fou, ce monde installé autour de nous. Les relations humaines, la solitude, la bureaucratie, l’amour sont tour à tour les déclencheurs des mécanismes de survie du trio de clown. Passant de moments cabotins à des moments tendres et même émouvants, Serge Bonin, Catherine Dorion et Nicola-Frank Vachon portent ce spectacle avec brio, dévoilant toute la gamme de leur talent. Le public ressent le plaisir que ce trio éprouve à jouer ensemble. Eux-même créateurs du spectacle, ils ont un regard particulier et surtout une manière originale de représenter l’existence. Ils sont aussi bien à l’aise avec la panoplie de propos qui constitue la mosaïque de ce spectacle échevelé. D’ailleurs, bien que ce spectacle soit court, environ une heure trente, il gagnerait en vigueur en resserrant quelque peu le nombre d’escapades que trace ce texte non-linéaire. Une réorganisation des séquences pourrait être un atout afin de permettre une certaine montée dramatique plus concise. Dans le présent spectacle, on sent que la recette s’étire à partir des deux tiers de la représentation.

Tout de même, il faut féliciter le tonus qu’a su insuffler Marc Doré à la mise en scène de ce spectacle, incarné de façon simple et juste par les comédiens. Plusieurs petits détails qui sont autant de trouvailles, tel le fauteuil funéraire, mais surtout l’incontournable prestation de Nicola-Frank Vachon en chef d’orchestre qui « dirige » la musique à partir de l’expression de son visage. Un tour de force qui suscite des applaudissements bien mérités.

Parfois sombre et parfois lumineuse, cette production fait du bien à l’âme. Elle permet de se placer à proximité d’une légèreté qui n’a rien de simpliste. On ouvre beaucoup de fenêtres. Sans aller à fond de tous les sujets abordés, le spectateur rencontre de la matière à digérer pour quelques temps. Payez-vous du bon temps avec ces gens au regard innocent et pas bête.

01-04-2006