Du 3 au 21 février 2009
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Je voudrais me déposer la tête

Texte : Jonathan Harnois
Mise en scène : Claude Poissant
Avec : Chantal Baril, Christian Baril, Sylvie de Morais-Nogueira, Étienne Pilon et François Simon T. Poirier.

À la fin d’une nuit bien arrosée, Félix, 20 ans, choisit de fermer les yeux pour une dernière fois. Son meilleur ami Ludovic demeure derrière, foudroyé. De durs moments d’incompréhension, d’enfermement et de défoulement se succèdent. Puis, il entame un pèlerinage salvateur en compagnie d’Andelle, son amour. À pied, ils se rendent dans la banlieue où Félix a vécu, cette ville qui l’a étouffé jusqu’à le perdre. Au cours de ce tortueux périple, on niche au coeur de la souffrance de Ludovic, on accompagne chacune de ses pensées alors qu’il se retrace lentement un chemin vers la vie.

D’une plume puissamment poétique, l’auteur Jonathan Harnois remonte le temps de cette histoire fatale. Avec Je voudrais me déposer la tête, le Théâtre PÀP nous propose un spectacle à la fois happant et lumineux, qui nous lègue une envie irrépressible de vivre.

Texte publié : Je voudrais me déposer la tête, Les éditions Sémaphore (2005)

Scénographie : Romain Fabre
Lumières : Erwann Bernard
Musique originale : Nicolas Basque
Maquillages et coiffures : Angelo Barsetti
Accessoires : Jasmine Catudal
Costumes : Caroline Poirier
Concepteur vidéaste : Stefan Miljevic
Mouvements : Caroline Laurin-Beaucage
Direction technique : Patrick Belzile
Direction de production : Catherine La Frenière

Production Théâtre PÀP
Codiffusion Théâtre Périscope

Cabaret Tard–Tard

Des mots plein la bouche – recette de poésie à saveur de théâtre

Pour le dernier Cabaret Tard-Tard de la saison 2008-2009 au Théâtre Périscope, Le Théâtre Jésus, Shakespeare et Caroline, une toute nouvelle troupe fondée par Steve Gagnon, Jean- Michel Girouard et Claudiane Ruel land, vous convie à une soirée chaleureuse où poésie rime avec simplicité et vérité.

Une soirée de découvertes et de dégustations pour les amoureux des mots.

Au menu :
Ganache d’images et d’émotions, servie sur croquant comédien et coulis de voix mielleuses avec les craquants : Steve Gagnon, Eliot Lapr ise, Jean-Michel Girouard, Joël le Bond, Claudiane Ruelland, Sophie Thibault et Mar ie-Soleil Dion.

Ingrédients :
Un thème, Me déposer la tête en hiver, au printemps, en été ou à l’automne
Des poètes, Joëlle Bond — Mar ie-Soleil Dion — Catherine LaRochelle — Véronique Côté — Michel Nadeau — Marie- Josée Bastien — Jonathan Gagnon — Mar ie-Pierre Girouard — Mélissa Verreault — Jean-Michel Girouard — Steve Gagnon — Claudiane Ruelland

Samedi, 7 février 2009 vers 22 h – Foyer du théâtre Périscope — 2, rue Crémazie Est
Entrée libre

Lundi-causerie

Suicide et ondes de choc

«Et maintenant moi je suis une ombre givrée, en alerte. Je clignote comme un morceau de panique. » Voilà comment parle Ludo à la suite de la mort de son ami.

Toutes les questions sans réponse que laisse son ami, toutes ces questions le hantent. Y a-t-il une réponse? Peut-être plusieurs? Comment y répondre? Vers qui se tourner pour comprendre le geste fatal, l’inexplicable, l’insupportable réalité de ce brusque départ? Pour aborder ce sujet délicat du suicide, Marc Chabot, philosophe et auteur d’un ouvrage sur le suicide des jeunes garçons : En finir avec soi : Les voix du suicide; Jonathan Harnois, l’auteur du roman Je voudrais me déposer la tête et de la pièce du même nom, et Dominic Parisé, intervenant au Centre de Prévention du Suicide de Québec. À travers l’analyse et l’expérience des panélistes, nous tenterons d’en comprendre le processus et peut-être pourrons-nous nous rapprocher de cette réalité si difficile à prendre et à comprendre pour les proches et pour toute une société. Cette causerie animée par Marie-Ginette Guay se tiendra dans l’intimité du Foyer.

Lundi, 9 février 2009 à 19 h 30 – Foyer du théâtre Périscope – 2, rue Crémazie Est

Entrée libre

Théâtre Périscope
2, rue Crémazie Est
Billetterie :418-529-2183

par Laurence Primeau-Lafaille

C’est l’histoire de deux bons amis qui, entre les lendemains de veille au cégep et le boulot de nuit à l’usine, font les quatre cents coups. Un beau jour, Ludo reçoit la mort en pleine face : Félix, son grand complice, son bel ami, «a trop respiré le monoxyde». Au lendemain d’une fête allumée comme les autres fêtes, au beau milieu d’une banlieue étouffante comme les autres banlieues, Félix s’est suicidé. Au petit matin, devant le fleuve, il a abandonné sa vie. Et Ludo, son ami. Tout vole en éclats : les repères sont perdus, la raison tente de prendre le bord, tout n’est plus que flou. Ludo nage dans un magma de culpabilité, de rancœur et d’une immense tristesse. On assiste donc à ce coup de masse dans l’univers d’un jeune homme qui cherche à reconstruire après la catastrophe, s’accrochant à ce qu’il a de plus solide : ses rêves et sa blonde, Andelle.
Je voudrais me déposer la tête, roman de Jonathan Harnois, porté à la scène par le Théâtre PàP, est un cri des tripes, presque silencieux. De ces cris qui restent dedans, un cri tellement déchirant qu’il n’arrive même pas à sortir. Si «la jeunesse est vieille comme le monde» comme le gueule Jérôme Minière, elle a une sœur siamoise qu’on appelle Douleur. Ça vient avec, comme un «package deal». Pas le choix. Tu vis avec, sinon…

C’est avec une grande sobriété que Claude Poissant a choisi de monter l’adaptation de ce roman, hautement poétique, laissant aux mots de Jonathan Harnois toute la liberté d’évoluer dans une esthétique sans artifices. Beaucoup de délicatesse et de douceur pour exprimer toute la lourdeur du suicide de Félix, et le poids qui pèse sur Ludo. On aurait pu s’attendre à un spectacle très dur et bouleversant, à cause de la brutalité d’un thème comme le suicide. Mais non. La forme narrative du texte, que les créateurs ont tenu mordicus à conserver, permet une certaine distance, qui donne au spectateur l’occasion de voyager sans trop de heurts dans l’univers pourtant torturé de Ludovic. Le public devient alors témoin d’un long monologue intérieur incarné par un chœur à trois voix, celles de Christian Baril, Étienne Pilon et François-Simon T. Poirier, qui livrent tous trois une interprétation tout en subtilité, donnant chacun leur couleur personnelle à Ludo, nous rappelant toute la complexité de la souffrance humaine. Une déception : l’Andelle de Sylvie De Morais-Nogueira, qui malgré la justesse du ton et un talent évident, semble un peu monolithique, dans sa gentillesse et sa candeur.

Tous les artisans de ce spectacle ont mis leurs propositions au service du texte, avec un respect qui inspire presque à l’hommage. Le jeu des comédiens et toute en sobriété, et on entendrait voler les mouches dans la salle tant on ne veut rien perdre de la poésie de Harnois. Les éclairages soignés d’Erwann Bernard donnent juste ce qu’il faut d’humanité au décor gris, glacial, minimal, de Romain Fabre. Autre déception cependant, soit l’utilisation de la vidéo scénique. L’écran n’est que très peu utilisé; on se questionne donc sur la réelle nécessité de son intégration. Ensuite, le choix d’y exposer l’intériorité de Ludo, figurée par des images du jeune homme nu, ne renforce en rien notre compréhension du personnage, puisque nous nageons déjà dans les méandres de son âme grâce à la forme narrative du texte. La vidéo n’apporte donc rien de nouveau à l’œuvre, elle gêne même, un peu, mais on a vite fait de l’oublier.

Si l’on ne sort pas de la salle dérouté, déchiré, on n’en est pas moins touché par une œuvre-récital dont la finesse des images scéniques et littéraires nous amène à réfléchir sur ce que nous rencontrons tous, un jour ou l’autre. Le deuil, la mort, l’absence.

09-02-2009

par Geneviève Germain

Claude Poissant a effectué un grand pari en voulant adapter le roman du jeune auteur Jonathan Harnois au théâtre. Remplie de métaphores imagées et de mots qui pèsent lourd, l’écriture de ce finaliste au prix Anne-Hébert 2006 peut sembler difficilement transposable sur les planches. Toutefois, le metteur en scène Claude Poissant n’en est pas à ses premières armes en matière d’alliances avec de jeunes auteurs, ayant notamment permis de révéler au public François Létourneau (Stampede, Espace Go, 2001) et Geneviève Billette (Crime contre l’humanité, Espace Go, 1999 et Le goûteur, Espace Go, 2002). Certainement fort de cette expérience, il réussit à livrer la réflexion intimiste de Harnois sur le suicide et ses contrecoups en toute théâtralité dans une adaptation scénique à cinq voix, dont trois composent le personnage central de la pièce, Ludovic.

Je voudrais me déposer la tête raconte le parcours de Ludovic suite au suicide de son meilleur ami Félix. Jeune cégépien à peine embarqué dans la vie, il se retrouve confronté à la douleur qu’engendre la mort d’un proche et à la reconstruction personnelle qui doit s’en suivre. Touchant à l’épineuse question du suicide, sujet malheureusement encore d’actualité au Québec, l’histoire touche également à la vie en banlieue, à l’amitié, à l’amour et, bien sûr, à la période de deuil.

Sur scène, on retrouve d’abord Christian Baril, Étienne Pilon et François Simon T. Poirier, les trois Ludo. D’abord un peu déroutés par ce triple personnage, lequel est interprété parfois séparément et d’autres fois à l’unisson, on comprend rapidement que cette narration divisée en trois sert judicieusement le propos, permettant de dynamiser le récit. À la fois sobres, mais jouant avec aplomb, les trois jeunes comédiens assurent une belle continuité dans l’interprétation. À leurs côtés, on retrouve Sylvie De Morais-Nogueira, dans la peau de l’étincelante Andelle, la petite amie de Ludo. Plus tard dans le récit, on retrouve également l’émouvante Annick Bergeron, la mère de Félix, qui nous livre presque stoïquement sa douleur depuis le suicide de son fils, chargée d’une émotion refoulée palpable et poignante.

Le décor est simple, composé d’un plancher gris en pente avec une porte au tout milieu, accompagné d’un fauteuil orange allongé sur le dossier et un écran où quelques répliques et images sont diffusées. L’éclairage est utilisé avec autant de parcimonie, éclairant souvent principalement l’acteur qui prend la parole, créant une ambiance intime et souvent sombre. La mise en scène use toutefois avec beaucoup d’imagination de ces quelques éléments, la porte se soulevant pour créer une entrée ou s’ouvrant du plancher pour imager un trou. Quelques objets font leur apparition, relatant en miniature certains détails du récit.

Tout semble mis en place pour laisser le champ libre aux mots percutants et évocateurs de Jonathan Harnois. Ce sont d’ailleurs ceux-ci qui captivent et émeuvent, tout en laissant place à la réflexion. La mise en scène demeure accessoire, du moins en apparence, car ce sont les répliques qui nous trottent dans la tête après la présentation. Claude Poissant réussit à rendre cette histoire de peine et de cheminement accessible avec beaucoup de simplicité, sans flaflas. Bien qu’il n’y ait aucune effusion émotive sur scène, les mots sont sincères et touchants, créant un émoi parmi le public qui était manifeste au sortir de la pièce.

30-03-2007