MonTheatre.qc.ca, votre site de théâtre
Du 12 au 30 avril 2011
DominoDomino
Texte de Érika Soucy
Mise en scène Patric Saucier
Avec Patric Saucier, Caroline B. Boudreau, Caroline Stephenson, Jeanne Gionet-Lavigne, Hubert-C. Bolduc, Danièle Belley

Domino, ce sont deux enfants mal élevés qu'on a abandonnés dans un univers silencieux et froid et qui veulent à tout prix foutre le camp vers un monde meilleur. Un monde normal où l'amour et les mots ne sont plus des tabous.

La sœur, qui porte depuis peu le nom de « sœur du tireur fou du cégep», fouille dans les événements antérieurs pour s'expliquer le geste qui a été commis. La mère, elle, visionne en boucle des vidéos-souvenirs des anniversaires de son fils pour vivre encore un peu à ses côtés.

Ce portrait de famille déchirée est regardé par le chœur : tantôt peuple, tantôt médias, tantôt père et frère disparus.

Domino n'est pas une pièce sur une tuerie dans une école. C'est un drame familial, une tragédie contemporaine.

 

Décor et costumes Élyane Martel 
Éclairage Jérôme Huot

Carte Premières
Cartes Prem1ères
Date Premières : 15-16-22-23-29-30 avril 2011
Régulier 26$
Carte premières : 13$

Une création de L'ancre rouge

Premier Acte
870, de Salaberry
Billetterie : Réseau Billetech 418-694-9656
Delicious
______________________________________
 Critique
Critique
Imprimer la critique

par Odré Simard

Pour cette fin de saison, Premier Acte nous convie à un drame familial possédant aussi une grande portée sociale. Avec un début fracassant, Domino nous entraîne dans un tourbillon où  l’urgence de vivre, la banalité de tous les jours et les problèmes familiaux se croisent autour d’une tuerie dans un établissement scolaire effectuée par le frère jumeau. Le couple frère et sœur rêvait depuis longtemps déjà de tout laisser derrière eux afin de gagner leur liberté en voyage, loin du marasme de leur quotidien. Au fil de la pièce, nous découvrons comment la morosité et l’abandon ont pu germer dans le cœur du frère, trahissant sa sœur et par le fait même leur rêve commun.

Le jeu d’acteur assure un fil conducteur empreint d’émotion. Patric Saucier fait un père distant plus que touchant dans sa naïveté et sa simplicité. Caroline Stephenson rend sur scène une mère plus vraie que nature, que l’on déteste ardemment pour son indifférence envers sa fille jusqu'à ce que l’on découvre le nœud de cette tension. Une belle complicité anime le duo des jumeaux, Caroline B. Boudreau et Hubert Bolduc, assoiffés qu’ils sont de vivre sous de meilleurs augures que leur quotidien grisâtre, où l’amour de la mère est étouffant pour l’un et absent pour l’autre.

Du côté de la distribution des rôles, il aurait été intéressant de ne conserver que les acteurs jouant un personnage de la famille. Ils auraient pu endosser des personnages extérieurs à certains moments, comme la scène initiale où tous sauf « le tueur » sont des étudiants de l’école réagissant à la tuerie. Non pas que leur jeu soit à questionner en tant que tel, mais la présence des deux autres actrices venait affaiblir la tension familiale et diluer notre attention. Les rôles qu’elles endossent ne font pas particulièrement avancer l’action et sont plutôt fades par rapport à la teneur des personnages principaux.

Patric Saucier crée, tout au long de la pièce, une mise en scène vivante, dynamique et très ingénieuse dans la mise en espace des cadres-objets. Au tout début, une trentaine de cadres de toutes les grandeurs sont accrochés au mur du fond ; plus la pièce avance, plus on découvre que les cadres sont utilisés pour la fonction de l’objet qu’ils représentent. Ils sont ensuite disposés debout un peu partout sur la scène, ce qui construit l’espace peu à peu. Cela engendre une très belle poésie et plein de petits  bijoux d’idées sont dévoilés, tel que le cadre cadeau à double face (d’un côté le cadeau emballé et une fois retourné il s’agit de la cassette VHS offerte), la robe qui s’enfile en plaçant le cadre devant soi, le cadre caméra qui tient tout de même sur son trépied, la massive pelle nécessaire à l’enterrement ainsi que la fameuse arme à feu très imposante dans son cadre.

Domino est donc un drame familial qui se transforme en un drame social. Le gouffre dans lequel tombe le frère jumeau est en fait sa perception de l’humain qui ne peut arriver à se sentir vivant de façon continue, qu’il finira toujours par banaliser son environnement et que les choses perdront de leur intérêt et de leur valeur graduellement. Que voyager ne réglera pas le problème de ce mal qui lui ronge l’intérieur, mais le changera de place, simplement. Il décide donc de partir pour un ailleurs définitif, et que la seule chose qui compte rendu là est de laisser sa trace. Le texte d’Érika Soucy résonne comme un cri d’une génération qui ne trouve pas sa place et dont l’avenir trop flou fait perdre tous repères.

19-04-2011

Retour à l'accueil