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Du 29 septembre au 10 octobre 2015

Texte Mateï Visniec
Mise en scène Guillaume Pepin
Avec Amélie Laprise, Catherine Simard, Paul Fruteau De laclos, Guillaume Pelletier, Jocelyn Paré, Nicola Boulanger, Nadia Girard

Un bar en bordure de mer. Le tenancier, Bruno, reçoit la visite de Grubi, le gardien du phare. Les deux hommes discutent de la pluie et du mauvais temps, puis en viennent à parler de l'étranger qui réside à la pension de Bruno, juste au-dessus du bar. Grubi raconte la nuit qu’il a passé dans son phare à jouer aux dés avec l’homme. Mais voici que Bruno soutient lui aussi avoir passé la nuit à jouer au dard avec le même individu. Se joignent à eux Clara la prostituée, César le chauffeur de taxi et Njiami le balayeur de rue, tous jurant avoir passé les trois dernières nuits avec le même homme. Plus l’enquête avance, plus les témoignages semblent concorder. Devant l’incompréhension de la situation, la colère monte. L’heure de la vengeance sonne. Ne reculant devant rien, ils décident de prendre les armes et d'affronter l’étranger. Ce qu’ils découvriront dépassera tout ce qu’ils auraient pu imaginer… 

Une folie collective qui grandit, un délire créé par le mensonge, un jeu imposé par une volonté de paraître vivant devant ceux qui nous donnent l’impression d’exister. Un cercle vicieux qui amène les personnages à perdre leurs repères et à vivre l’impossible, le surnaturel. En fait, par cette œuvre théâtrale, l'auteur souhaite se moquer des travers que nous recréons tous, à notre façon, pour embellir notre existence. Un texte d’une grande humanité, rappelant l’univers beckettien et montrant l’homme dans toute la beauté de sa vacuité et de son désir de plaire. 

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Pour la première pièce de sa saison 2015-2016, le théâtre Premier Acte présente une production de la troupe de théâtre La Trâlée, soit Trois nuits avec Madox de l’auteur français d’origine roumaine Matei Visniec. La scène de Premier Acte, située normalement dans le Centre culture et environnement Frédérick Back au 870 Salaberry, se déplace pour l’occasion au 2e étage du bar L’Autre Zone, situé sur la 3e avenue à Limoilou.

L’endroit, bien qu’on puisse en douter aux premiers abords, présente tout de même des caractéristiques qui pourraient fort probablement convenir à une scène alternative pour les plus petites productions de théâtre à Québec. Cependant, la mauvaise insonorisation de la salle durant la représentation – on pouvait entendre à l’occasion la musique de club qui jouait au premier étage ainsi que les cris des clients – amène un certain bémol et porte à croire que certaines modifications devront être apportées afin d’optimiser l’expérience du spectateur à l’avenir.

La soirée débute avec Le deuxième tilleul à gauche, un court texte de Visniec joué juste avant le programme principal. Cette idée d’instaurer une première partie est venue du metteur en scène Guillaume Pépin qui souhaiterait que son idée soit reprise par d’autres théâtres pour ainsi permettre à de plus petites compagnies de se produire en avant-partie de plus grosses productions. Une idée intéressante qui pourrait amener certains problèmes en rapport à la logistique, surtout en ce qui a trait aux décors, dans certains cas. Par contre, une idée semblable est présentée au Périscope cette année, avec Les Écornifleuses qui envahiront les décors de différentes pièces de la saison avec leur spectacle en itinérance Le monde sera meilleur.

Suit, ensuite, le texte principal, Trois nuits avec Madox, qui nous transporte dans le bar d’une ville quelconque au beau milieu de nulle part. On y retrouve Bruno le barman (Jocelyn Paré), Gruby le gardien du phare (Nicola Boulanger), Clara une ancienne prostituée (Nadia Girard), Céssar le chauffeur de taxi (Paul Fruteau De Laclos) et Nijami le balayeur (Guillaume Pelletier). Tous clament avoir passé les trois dernières nuits avec un dénommé Madox. Mais qui dit la vérité ? Ce Madox ne peut tout de même pas avoir le don d’ubiquité. Comment est-il possible qu’il ait pu se retrouver à plusieurs endroits et avec plusieurs personnes différentes en même temps ? En tentant de démêler le vrai du faux, les cinq compagnons attendront que Madox descende de sa chambre louée juste au-dessus du bar afin de l’interroger sur ce qui s’est réellement passé durant les trois soirées précédentes.

Guillaume Pépin signe une mise en scène juste et parvient à tirer le maximum de l’espace mis à sa disposition. Le deuxième étage de L’Autre Zone possède deux bars et l’un d’eux est utilisé, ce qui ajoute cachet et réalisme au spectacle. Le sentiment d’immersion dans la pièce est décuplé par le fait que l’action se déroule sur presque 360 degrés. Toutefois, avoir fait joué deux comédiens derrière les spectateurs lors de la première partie Le deuxième tilleul à gauche n’était pas la meilleure idée et mériterait d’être remaniée, dû à l’orientation des sièges dans la salle qui empêchait de suivre adéquatement le jeu des comédiens à ce moment précis. Le jeune metteur en scène a été conseillé par Jacques Leblanc à la direction d’acteurs et le résultat parle de lui-même ; les comédiens sont tous excellents et force est d’admettre que la nouvelle cuvée est gorgée de talent et cognera très rapidement à la porte des plus grandes productions. On aime le jeu bien nuancé de Jocelyn Paré et Nicola Boulanger qui sont parvenus à créer des personnages attachants et profondément réalistes. Paul Fruteau De Laclos  et Guillaume Pelletier démontre quant à eux tout leur potentiel comique et génèreront à eux seuls la majorité des rires entendus durant la représentation. Mention spéciale à Nadia Girard qui dévore la scène et vole malgré elle le spectacle, et ce, en dépit de tout le talent présent sur scène.  

Pour leur première grosse production, la troupe La Trâlée démontre tout son savoir-faire et présente une pièce qui, sans être un incontournable de la saison, saura plaire à plusieurs, surtout aux amateurs d’absurde et aux admirateurs de l’imaginaire beckettien. Trois nuits avec Madox vaut assurément le détour, ne serait-ce que pour pouvoir apprécier le travail d’une jeune compagnie en devenir.

01-10-2015