Après L’assassinat du président et Épopée Nord, Guillaume Tremblay et ses comparses du Théâtre du Futur, Olivier Morin, Navet Confit et de véritables chanteurs lyriques font leur entrée à Espace Libre avec un opéra !
Dans un village de surf à Tahiti, John-Nathan et ses amis vouent un culte au corps et à la beauté. Leurs journées se résument à surfer, à faire l’amour et à contempler le paysage. Ce sont des douchebags qui chantent foutrement bien. Une journaliste japonaise débarque pour faire un reportage sur leur mode de vie. Hommes et femmes tombent amoureux d’elle et se lancent dans un rude combat de séduction. La même semaine, on annonce l’arrivée d’un tsunami.
La vague parfaite met en scène notre incapacité à réagir face aux formes de destructions actuelles engendrées par l’Homme. Un drink à la main, on nous parle de cette beauté que nous recherchons et que, pourtant, nous détruisons jour après jour. Bref, en janvier, apportez vos gougounes et votre Speedo, au son du bel canto, vous ne bronzerez pas idiot!
Section vidéo
Assistance à la mise en scène Mylène Caya
Musique élégante de Philippe Prud’homme
Ambiance sonore Navet Confit Orchestra
Scénographie Alexandre Paquet
Éclairages
Marie-Aube St-Amand Duplessis
Aide Technique Jean-Philippe Charbonneau
Les chicks
Hiather Darnel, soprano
Anne Julien, Mezzo
Cécile Muhire, Soprano
Les dudes
Sylvain Paré, Ténor
Mathieu Grégoire, Ténor
Antoine Gervais, Baryton
Musiciens
Philippe Prud’homme Piano
Navet Confit Guitares, claviers et ambiance
Mathieu Grégoire et Guillaume Tremblay Guitare
Une production Théâtre du Futur
Décidément, le chant est à l’honneur dans la métropole en ce début d’année : plusieurs productions le placent au cœur de leur démarche de création, comme Pelléas et Mélisande et des Événements, qui viennent de prendre l’affiche.Le Théâtre du Futur nous propose quant à lui sa nouvelle création, La vague parfaite, à Espace Libre.
Après avoir exposé les joyeusetés verbales et les hilarants travers de Clotaire Rapaille dans un opéra rock aussi échevelé que son personnage central, exploré le futur d’un chef d’État arrivé à son huitième référendum et décrit un Québec futuriste où Fred Pellerin guide la patrie dans son retour aux sources, Guillaume Tremblay et Olivier Morin plongent cette fois dans l’opéra-surf, un genre nouveau qu’il faut plutôt voir que s’entendre décrire!
Sur une île de l’océan Pacifique baignée de chaleur et de soleil, un groupe de jeunes et beaux surfeurs, venus là en quête de la vague parfaite, se la coulent douce, loin des soucis du monde. Autour d’eux gravitent des « wannabes » éperdus d’admiration. Leur petit univers sera chamboulé par le surgissement de la plus grosse vague de l’histoire, un tsunami. Voilà pour la prémisse.
Avec La vague parfaite, le duo d’auteurs s’éloigne de sa satire politique habituelle pour verser dans une critique sociale ciblant un groupe en particulier, celui des douchebags. Toujours sous le couvert de l’humour déjanté, qui fait la marque – si appréciée – de la compagnie, la production critique sans ménagement le culte de l’apparence et l’obsession du bien-être et d’un corps sain, beau, parfait. Les jus verts, les massages, les bronzages, la « coolitude », les belles phrases vides de sens : tout passe dans le tordeur de cette production à la forme franchement originale.
Les multiples références à l’actualité et aux personnalités québécoises dans un futur inventé (mais pas si éloigné de la réalité) cèdent cette fois le pas au chant lyrique. Le jeune compositeur et pianiste Philippe Prud’homme a réalisé un travail exceptionnel pour mettre en musique le texte. Ce sont ici les chanteurs qui prennent les devants de la scène tandis que les comédiens, les « wannabes » se retrouvent ironiquement bien en peine de prononcer plus que quelques répliques.
Les jeunes chanteurs lyriques brillent sur les plages dorées de cet opéra-surf. Ténor, baryton, mezzo-soprano, soprano, ils impressionnent par le sérieux avec lequel ils chantent des lignes absurdes ou qu’on s’attendrait plus à entendre dans une émission du style Occupation double. Projetées en surtitres sur un écran, comme à l’opéra, les paroles font crouler de rire le public, qui se délecte de la dichotomie entre la beauté du chant et la vacuité des dialogues.
Sur leur île, les surfeurs et leurs admirateurs ne s’intéressent d’ailleurs pas un instant au sort des habitants à l’approche du tsunami, se « torchent » complètement du réchauffement climatique planétaire et du sort des autres réfugiés du Pacifique. Leur manque de conscience sociale et environnementale évacue rapidement la question du tableau. La production y perd en mordant. De l’aveu de Tremblay lui-même, en discussion après le spectacle, plusieurs références comiques ont dû être sacrifiées pour faciliter le travail de mise en musique et en paroles.
Ainsi, en dépit des rires que font naître les chansons, hilarantes, on attend la vague parfaite qui nous emporterait complètement dans le délire futuriste, comme ce fut le cas pour Clotaire Rapaille, l’opéra rock et L’assassinat du président. Le spectacle déborde pourtant de pépites comme « Je vais pleurer tout seul dans la tente à cul », les multiples clins d’œil à la légende du surf « Pat Varotti », un superbe chant de désespoir du ténor sur son radeau de fortune, et la touchante confidence d’une femme désirant devenir une étoile (soit « journaliste pigiste de la télévision locale »!). On pourrait en nommer plusieurs autres, mais il manque toutefois à la production un peu de l’adresse du surfeur « cool » pour offrir une satire pleinement efficace.