Voici la suite tant attendue des Lettres arabes, créées en 2011 ! Les fameux Rachid et Mouloud, deux jeunes de la banlieue française, sont donc de retour ! Croyant réserver un tout-inclus à Charm-el-Cheikh, ils se retrouvent dans un camp d’entrainement djihadiste en Afghanistan. Leur gentil organisateur, qui sera personnifié par un vrai Perse – car Les Lettres arabes s’inspirent des Lettres persanes de Montesquieu – compte en faire des kamikazes, mais Rachid et Mouloud croient que ce sont des jeux. Ils sont bien contents de devenir artificiers de ce qu’ils croient être un Club Med et de recevoir une mission : faire éclater des feux d’artifice dans une salle de concert à Montréal.
NB : toute ressemblance avec des élément de la réalité sera bien sûr forcée, grossière et malaisante. Il est préférable de ne pas avoir vu Les Lettres arabes 1, afin de ne pas se créer d’attentes.
Section vidéo
Assistance à la mise en scène et régieStéphanie Capistran-Lalonde
Régie Jean Gaudreau
Décor et costumes Romain Fabre
Lumières Erwann Bernard
Musique Philippe Brault
Salle principale
Billet régulier 33$
Billet 25 ans et moins | Étudiant 26$Studio
Billet du Studio Espace Libre 26$
Billet 25 ans et moins | Étudiant du Studio Espace Libre 22$Forfait PréVente* 25$
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Étudiants en théâtre 19$
Une production Trois Tristes Tigres, Théâtre Debout et Orange Noyée
En 2011, lorsqu’Olivier Kemeid et Geoffrey Gaquère présentaient leurs Lettres arabes, le Québec était plongé en plein débat sur les accommodements raisonnables, relancé par les discussions autour de la charte sur l’identité québécoise. Cinq ans plus tard, où en est-on? Les peurs identitaires, celles de l’autre, de l’étranger, la propension à vouloir fermer les frontières et se refermer sur soi… tout ça semble résonner plus fort que jamais, tant au Québec que dans le monde. Les migrants, les réfugiés, les jeunes djihadistes occupent plus que jamais l’espace médiatique, notamment celles des tribunes publiques et des radios populistes. Le contexte a changé toutefois, il est devenu plus grave, et pour beaucoup, le repli identitaire représente la seule façon de préserver leurs valeurs.
C’est Mani Soleymanlou, à qui l’on doit l’éclairante trilogie Un, Deux et Trois, puis Ils étaient quatre, 5 à 7 et bientôt 8, qui a relancé Kemeid et Gaquère pour qu’ils reprennent leurs personnages de Mouloud et Rachid, deux Arabes de la banlieue parisienne souhaitant fuir leur quotidien et se retrouvant catapultés au Québec, de Montréal à Hérouxville. Pour les trois créateurs, il semblait important de s’attaquer à nouveau, et toujours par l’humour, aux stéréotypes, à la radicalisation et à la peur de l’autre.
Cette fois, Rachid et Mouloud habitent Molenbeek, ce fameux quartier de Bruxelles d’où provenaient les terroristes qui ont frappé Paris en novembre 2015. Alors qu’ils pensent réserver un Club Med à Charm-el-Cheikh (oui, ils sont naïfs), ils se retrouvent en fait dans un camp d’entraînement djihadiste, en un lieu « assez moyen dans l’Orient » et sous les ordres d’Abu Minable (Soleymanlou). Le temps d’une traversée mouvementée en mer et d’un vol sur un tapis volant, ils se retrouveront à Montréal, où ils devront faire exploser ce qu’ils croient des feux d’artifice dans une salle de théâtre. Certes, on nage dans l’absurde, mais dans un absurde qui multiplie habilement les clins d’œil à l’actualité, à la société québécoise et au radicalisme, de quelque côté qu’il soit.
Lettres arabes 2 s’attaque à ce sujet sensible sans mettre de gants blancs, la naïveté de Rachid et Mouloud leur permettant d’aller parfois plus loin. Les deux apprentis terroristes débarquent ainsi en Italie sur une place où « dorment » plusieurs enfants, sont interviewés par un animateur de radio démagogue en cagoule du Ku Klux Klan à carreaux (une idée repiquée de leur premier spectacle, où un extrémiste d’Hérouxville portait le même habit), ou surgissent bardés d’explosifs dans une salle de théâtre… Des images fortes qui portent, surtout en deuxième partie.
Tout comme la précédente création, Lettres arabes 2 s’égare malheureusement au milieu de toutes ses bonnes idées. À force de tirer dans toutes les directions, il verse souvent dans la caricature, un travers déjà présent dans le premier opus. Le public rit beaucoup, accuse aussi un peu le coup, mais les trois artistes nous entraînent à une telle vitesse d’un sujet et d’un gag à l’autre qu’il n’y a guère le temps de se poser pour approfondir ou remettre en question certaines conceptions. Après les soixante et quelques minutes que dure la représentation, on sort de la salle la tête bourdonnante.
Finalement, ce qu’on retient surtout du spectacle, c’est la perte de repère de Rachid et Mouloud, qui représentent une jeunesse en quête d’identité et qu’on enjoint continuellement à se taire, à s’intégrer « mais pas trop ». Pour la charge contre les idées préconçues et la peur de l’autre, il faudra attendre une version approfondie de ces lettres arabes.