Sept individus survoltés ont une idée simple : faire un gâteau. Cherchant à créer la pâtisserie la plus originale, ils seront prêts à trahir les rudiments gastronomiques au profit d'un produit qui se vendra mieux. CAKE est un essai sur le politique et l’art, sur fond de satire contemporaine : une critique drôle et flamboyante, inspirée du succès médiatique des productions à caractère culinaire.
« Captivée par les couches de signifiant naissant du mélange entre corps théâtral et corps dansant, je m'intéresse aux procédés de mise en scène transposés dans la danse. Il en résulte un langage chorégraphique hybride où la scission entre danse et théâtre est difficilement perceptible. Ma démarche est également liée à mes questionnements sur le rôle de l'artiste en société. J’ai tendance à croire que lorsque la substance de l’oeuvre permet de « penser politiquement par le biais d'images » (Lucy Lippard), elle nous éclaire sur des champs d'action possibles de l'art qui m'apparaissent d'une grande pertinence. Je suis d’accord avec Bertold Brecht, qui prétend qu'il faut, en réponse aux perpétuelles et nouvelles questions posées par la société, « donner une forme telle qu'elle éveille chez le spectateur la joie d'envisager des réponses différentes que celles proposées par le monde où il vit. Une forme joueuse qui contraint à l'étonnement, déshabitue des fausses évidences, aide à désirer se libérer de ce qui empêche l'humain de vivre plus amplement». »
Audrey Rochette mène une carrière parallèle de chorégraphe et d'interprète. Depuis sa sortie de l'École de Danse Contemporaine de Montréal, ses pièces Poros (2010), In Vitraux (2013), A Rift in the Wall (2013) et CAKE (2012 et 2014) ont été diffusées à Tangente, au Festival Phenomena, au Théâtre Mainline et à Zone Homa (Maison de la culture Maisonneuve). En tant qu'interprète, Audrey collabore aux projets de Kondition Pluriel pour European/Mobile/Dome/Lab (Montréal et Dresden) et pour Enjeux qui sera présentée à La Chapelle en novembre 2015. Elle a dansé pour Lucie Grégoire, Isabelle Boulanger – Compagnie La Grande Fente, Rosie Contant - Nébuleuse, Bruno Dufort – BURN Créations Scéniques, et Vanessa Bousquet.
Section vidéo
Conception sonore Laurent Maslé
Lumières et direction technique Renaud Pettigrew
Direction de production et des répétitions Marie-Ève Archambault
Conseils artistiques Julie-Andrée T., Andrew Turner, Georges-Nicolas Tremblay, Sophie Michaud
Photo Charles Marquis
Sur place
Tarif régulier 29$
Tarif réduit 25$*
Abonnement de saison 300$
Forfait tout cru 96$
5 spectacles pour 100$
4 x 4 : voyez un spectacle entre amis 88$
3 spectacles et + 22$/billet
* 30 ans et moins + artistes membres d'une association professionnelle, sous présentation d'une carte valide.
En ligne
Tarif régulier 32,50$
Tarif réduit 28,50$*
Abonnement de saison 303,50$
Forfait 5 spectacles non-disponible en ligne
3 spectacles et + 25,50$/billet
* 30 ans et moins + artistes membres d'une association professionnelle, sous présentation d'une carte valide.
Une création d'Audrey Rochette
On parle souvent de la recette du succès, de ce qui fait qu’une œuvre connaîtra une grande popularité auprès du public alors qu’une autre connaîtra seulement un succès d’estime, auprès de la critique, mais on s’attarde moins souvent à la difficulté d’un artiste de résister aux chants de sirène de cette recette, de rester authentique et fidèle à son idée première. Olivier Choinière explorait de brillante manière ce thème avec Chante avec moi, où la beauté d’une création spontanée se faisait pervertir par le succès et la popularité au point de se dénaturer et de se vider de son sens. Cette fois, c’est en danse qu’on creuse le sujet.
Avec CAKE, qui mêle joyeusement « corps théâtral et corps dansé », la chorégraphe et danseuse Audrey Rochette se demande jusqu’à quel point les exigences du marché peuvent pervertir une œuvre et trahir la démarche initiale. C’est une troisième version de son spectacle créé en 2012 que l’artiste présente ces jours-ci à La Chapelle, une version plus longue et qui réunit six danseuses et un comédien.
Au centre d’une scène protégée sur trois côtés par de grandes bâches blanches qui donnent au lieu des allures d’abri Tempo, un homme, le chef pâtissier, frétille d’impatience, il tient une envie, celle de créer quelque chose de grand, de beau, de marquant. Let’s make something great, let’s make a cake! Autour de lui surgissent les interprètes, six danseuses désireuses d’être choisies pour participer à la création de ce gâteau qui s’annonce délicieux, provocateur, percutant. Voilà, la table est mise pour cinquante minutes de délire culinaire, d’emportement créatif, de surdose de sucre et de surenchère gastronomique.
Le sucre est partout dans cette production, microcubes de douceur et de saveur, petit péché dont l’être humain raffole et qui peut parfois le rendre complètement fou. On l’épand partout dans l’espace et les danseuses s’y jettent, s’y roulent, y perdent la tête et le contrôle tandis que leur peau se recouvre de cette drogue sucrée, comme le succès. Lentement, mais sûrement, le pâtissier lui-même délaisse son idée de gâteau pour glisser vers une volonté de charmer le public avant tout et s’y perd tout entier.
Audrey Rochette propose à ses interprètes un canevas de chorégraphies dynamiques et fascinantes à partir duquel improvisent ses interprètes et qui font défiler l’heure de représentation à toute vitesse. Captif, le public n’a pas assez d’yeux pour ne rien manquer des contorsions des danseuses et de leur lutte pour toujours un peu plus de sucre.
Musique rythmée et successions d’expressions faciales ou de positions corporelles poussées à l’excès : CAKE rappelle par sa formule la recette gagnante des infopubs. Et on ne peut s’empêcher de succomber à son charme. Production vitaminée, CAKE n’échappe pourtant pas au piège de faire une satire d’elle-même à force de jouer de ses mécaniques. La dimension plus politique souhaitée par Rochette se noie en effet rapidement dans les quantités d’ingrédients déversés sur scène et sous les couches d’allusions sexuelles, une hypersexualisation, certes, assumée, mais qui tourne vite à vide.
Spectacle ludique et dont on sort avec une grande envie de s’offrir un bon gâteau tartiné de glaçage, CAKE donne tout de même à réfléchir sur la recherche en création du succès instantané et du sensationnalisme pour vendre à tout prix.