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Mythomania
16-17 novembre 2017, 19h, 21, 23 et 24 novembre 20h, 25 novembre 16h - théâtre multidisciplinaire

Mythomania plonge le spectateur dans les mutations de nos relations amoureuses, en confrontant sur scène l'univers du merveilleux et l’autoreprésentation sur le web. La croissance phénoménale des pathologies mythomanes permises par la distance physique d’Internet et combien ces pathologies affectent aujourd’hui nos récits et expériences sur l’amour sont au cœur des questionnements de ce spectacle.

La mythomanie est à l’origine un processus psychologique formateur chez les jeunes enfants qui leur permet de s’inventer du rêve, stimuler leur apprentissage et accentuer leur prise sur le réel. Or, cette mythomanie d’apparence « inoffensive » peut continuer à se développer chez le jeune adulte et s’amplifier dans une pathologie compulsive (dans les pires cas, le mythomane croit à ses propres mensonges). C’est ce phénomène maladif qui prend aujourd’hui des proportions nouvelles et encore peu connues dont ce spectacle interroge les répercussions sociales et psychologiques.

Mythomania est une oeuvre scénique qui a été développée avec le sentiment d’urgence d’interroger les mutations actuelles de nos rapports amoureux à l’ère de la rencontre et de la socialisation numérique et des nouveaux comportements mythomanes qui en découlent. Nos recherches nous ont révélé que la mythomanie, cette pathologie du mensonge compulsif qui s’aggrave aujourd’hui par l’entremise des sphères virtuelles, est d’abord un phénomène psychologique inoffensif et formateur chez les enfants en bas âge. Les jeunes enfants sont tous mythomanes, ce qui leur permet de s’inventer du rêve, stimuler leur apprentissage et accentuer leur prise sur le réel, une piste pour expliquer leur puissant attrait pour les contes. Cela nous a engagés dans une recherche dramaturgique, musicale et scénographique sur les façons que nous cultivons à se mentir sur l’amour, dans les récits comme dans nos vies intimes, pour en extraire des mécanismes narratifs et artistiques à transposer sur scène.

Troupe Artiste Inconnu est fondée en juillet 2013 par Nicolas Berzi qui en assure depuis la direction générale et artistique. Il s’associe dès le départ à Livia Sassoli (comédienne), puis en 2014, à Jean-François Boisvenue (scénographe, vidéaste). À sa fondation, la compagnie crée le solo pour un personnage féminin PEEP SHOW lors des éditions 2013 du Zoofest et du Festival de théâtre de rue Lachine. Repris dans la programmation officielle de La Chapelle Scènes Contemporaines en janvier 2015, la compagnie présente une version étoffée du spectacle en poussant la réflexion jusqu’à la dématérialisation de la consommation érotique sur Internet. Sa deuxième création, Héroïne(s), un chœur à trois voix féminines sur la dépendance à l’héroïne, fut présentée à l’automne 2015, également à La Chapelle. Avec cette méga-installation multimédia, Troupe Artiste Inconnu transfigure avec deux tonnes de contreplaqué tout l’espace scénique du petit théâtre de la rue St-Dominique.


Auteur, metteur en scène et concepteur général Nicolas Berzi
Interprète Livia Sassoli


Crédits supplémentaires et autres informations

Scénographe et vidéaste Jean-François Boisvenue
Musique et conception sonore Simon Chioini
Photo Justine Latour


Production Artiste inconnu


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Critique disponible
            
Critique

Avec Mythomania, Nicolas Berzi poursuit l’exploration de la pathologie et de la marginalité humaine amorcée avec Peep Show et Héroïne(s), deux spectacles présentés à La Chapelle en 2015. La pièce cherche à initier une réflexion sur l’influence du web et du conte merveilleux sur nos relations amoureuses. En ce sens, l’idée de traiter de la mythomanie est intéressante : exacerbé durant l’enfance, ce trait de caractère tend à s’atténuer à l’âge adulte. Nicolas Berzi remarque une tendance de la société occidentale à l’idéalisation des histoires amoureuses, conditionnée notamment par le cinéma hollywoodien et par l’avènement d’Internet. La possibilité de développer des relations virtuelles fait en sorte de favoriser le mensonge compulsif dans l’autoreprésentation que les gens se construisent sur le web.




Crédit photos : Justine Latour

Or, Mythomania n’arrive pas à susciter une réelle réflexion chez le spectateur. Puisant dans les mythes d’Eros, d’Androgyne et de Cupidon tout autant que dans la neurobiologie, Berzi se perd dans un récit parfois cliché auquel le public peine à s’accrocher. À force de vouloir montrer les mécanismes de fabulation de manière fragmentée, Berzi installe une distance avec le public et l’empêche de se laisser véritablement porter par l’histoire.

La pièce consiste en un solo porté par Livia Sassoli (codirectrice de la compagnie Artiste Inconnu), qui raconte l’histoire d’Alex, depuis son enfance, jusqu’à ses premiers ébats amoureux. Sassoli offre une interprétation assez juste – quoiqu’un peu éteinte – d’un personnage féminin qui recherche son âme sœur tout en réfléchissant aux facteurs qui font que l’on tombe amoureux. Si le recours aux talents de pianiste de l’actrice permet de belles transitions entre les différents tableaux de la pièce, on ne peut pas en dire autant des passages maladroitement chantés et dansés par la comédienne.

La scénographie de Jean-François Bienvenue permet d’évoquer à la fois un espace réel et un espace imaginaire. Des projections vidéo investissent cet espace pour y faire apparaître des flocons de neige, des photos d’enfance, des portraits déformés du visage de la comédienne, ou encore des fragments de texte. Si dans les premières scènes, les éclairages créent un jeu de transparence intéressant qui dévoile tranquillement la construction du décor, les projections tombent rapidement dans une série d’effets plaqués et banalement illustratifs. La lente multiplication de la formule « il était une fois » sur l’ensemble du décor et sur le corps de la comédienne en est un bon exemple. Le costume de l’actrice – une robe de princesse de conte de fées – et le récit qu’elle raconte dans ce passage étaient déjà assez évocateurs sans que le metteur en scène ait besoin de redoubler son propos avec des projections.

Heureusement, la musique électroacoustique de Simon Chioini arrive à dynamiser un peu le spectacle, qui souffre d’un sérieux problème de rythme. Sa conception musicale convoque le lyrisme exacerbé de certains films d’amour, mais aussi les motifs répétitifs associés aux jeux vidéo. Le choix d’installer Chioini sur scène sans tenter de camoufler les manipulations techniques ajoute un caractère ludique à la pièce et offre un contrepoint réel aux réflexions philosophiques formulées par la comédienne. Or, malgré la pertinence des réflexions à la base du spectacle, Mythomania reste trop hermétique pour que le public y trouve sa place. Plutôt que de renforcer le portrait critique que Berzi présente de la société occidentale, la densité du travail visuel et musical en vient à éclipser le propos.

21-11-2017
 
La Chapelle
3700, rue Saint-Dominique
Billetterie : 514-843-7738

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