« La tradition la plus attendue du temps des Fêtes célèbre ses dix ans! Dix bougies sur le gâteau de la Revue, c’est surtout une preuve tangible que notre public, année après année, apprécie un humour incisif et débridé. Notre équipe d’auteurs est à l’œuvre toute l’année durant, scrutant dans les manchettes les frasques de nos politiciens et les déboires de nos vedettes, pour vous offrir le panorama humoristique d’une année riche en rebondissements. Après une décennie de rendez-vous sur notre scène, nos fidèles et talentueux interprètes sont toujours en pleine forme pour vous éblouir avec ce véritable marathon humoristique. La Revue demeure un feu roulant où s’enchaînent avec vitesse et précision les numéros, sketches, vidéos, chansons et imitations, pour votre plus grand plaisir! »
C’est Yvette Brind’Amour, en 1960, qui choisit d’intégrer les revues aux saisons du Théâtre du Rideau Vert. Ayant participé comme comédienne et danseuse aux Fridolinades de Gratien Gélinas, elle comprend la pertinence de ces spectacles à l’humour mordant, qui jettent un regard sur l’actualité d’une société en pleine Révolution tranquille. À son arrivée à la direction artistique, Denise Filiatrault décide de renouer avec la tradition en réinstaurant les revues annuelles satiriques à la programmation. Dix ans plus tard, sa vision s’est avérée très juste et ces spectacles jouissent d’une grande popularité qui ne se dément pas. Fort du succès de l’année dernière, Alain Zouvi nous revient afin de diriger avec enthousiasme cette fabuleuse et inépuisable équipe d’acteurs.
Assistance à la mise en scène Pascale D'Haese
Costumes Suzanne Harel
Éclairages et projections Lüz Studio
Musique Christian Thomas
Accessoires Alain Jenkins
Perruques et maquillages Jean Bégin
Chorégraphies Emily BÉgin
Mardis et mercredis 19h30, jeudis et vendredis 20h, samedi 16h et 20h30, dimanche 14 décembre 15h
Production de 9207-7569 Québec Inc.
par Geneviève Germain
Le Théâtre du Rideau Vert présente jusqu’au 4 janvier sa 10e revue de l’année. Fidèle aux éditions précédentes, 2014 Revue et corrigée met en scène une rafale de sketches joués, chantés ou filmés illustrant avec humour et caricature les événements marquants de l’année. La mise en scène est assurée pour une deuxième année par Alain Zouvi tandis que l’écriture a été confiée à un nouveau collectif formé de six auteurs.
Après 10 ans d’existence, le concept s’est-il essoufflé? Peut-être bien, quoique le mordant de certains constats de société vaut encore le détour. Ce bien cuit inspiré du théâtre des variétés suscite beaucoup de sourires hésitants et, malheureusement, peu de rires francs. Il faut dire qu’au fil des ans de nombreux personnages publics ont été imités, certains à plusieurs reprises, et cette récurrence n’est pas toujours heureuse. Par exemple, Céline Dion revient chaque année, peu importe si elle a fait partie de l’actualité ou non. Cette année, l’accent est mis sur sa voix nasillarde. Rien de surprenant. Même si l’imitation sentie de Julie Ringuette est juste, celle de Véronique Claveau, absente de l’édition 2014, est difficile à égaler. Un autre exemple est celui de Julie Snyder qui est également personnifiée à répétition. Son hyperactivité est caricaturée, tout comme l’année passée, ce qui enlève l’élément de surprise ou de nouveauté. Pourtant, certaines reprises sont heureuses : Benoit Paquette en Pierre Lapointe est savoureux à souhait et Suzanne Champagne en Pauline Marois est tout simplement irrésistible avec son rire retenu et pincé, ses yeux plissés et ses réflexions au bilinguisme douteux sur sa fin de carrière au Parti Québécois.
Plusieurs des revues offertes au fil des ans misaient sur les numéros chantés et dansés, lesquels ont toujours fait l’objet de talentueuses imitations. De ce côté, la revue de 2014 est plus faible. On peine à comprendre les mots des chansons qui nous sont présentées, soit parce qu’ils sont mal prononcés ou parce que le son fait défaut. Du coup, les gags tombent souvent à plat. Sans doute que cela peut s’améliorer au fil des présentations avec un peu de rodage et d’ajustements. Le sketch d’ouverture sur l’air de Papaoutai (Stromae) qui demande « Où est ton Québec? » est tout de même divertissant, de même que le numéro chanté dans lequel Bolduc, Couillard et Barrette, surnommé pour l’occasion Gros corps malade, où les trois médecins devenus politiciens traitent les Québécois de tatas sur l’air de « On leur a fait croire » d’Alex Nevsky. Aussi, Marc St-Martin impressionne en réussissant à imiter Ginette Reno qui chante l’hymne national et doit être ressuscitée à plusieurs reprises.
Enfin, la mise en lien de certains sujets ou personnages laisse souvent perplexe. Par exemple, un sketch mettant en scène une querelle montée de toutes pièces entre une compétitive et très anglophone Eugénie Bouchard et un Denis Lévesque carrément mesquin : l’objet de la querelle semble complètement injustifié et la saynète tombe à plat. Idem pour la cage de verre de Jean Airoldi, laquelle a bien fait jaser cette année, qui se retrouve en plein Lietteville avec les personnages d’Unité 9 dans une saynète qui tourne en rond. Heureusement, certaines liaisons sont plus heureuses, telle celle de l’animateur Charles Tisseyre de l’émission Découverte avec le Ice Bucket Challenge, ce dernier nous présentant ce « phénomène indigène » dans un numéro tordant à souhait. Aussi, l’hommage à Gilles Latulipe qui se retrouve au ciel aux côtés d’Olivier Guimond, de Manda et de la Poune est touchant et tombe pile.
Ce sont sans contredit les numéros à saveur politique qui sont les mieux réussis. Comment ne pas rire devant un Justin Trudeau (Benoit Paquette) complètement stone qui fait l’apologie du « pot », qui déclare que le Canada qu’il aime est un Canada avec des gens (!) et qu’il a des idées, pas de « s »? L’imitation de Jean Tremblay, maire de Saguenay, lequel déclare que « Trop de couleurs, ça écoeure » est également très réussie. Aussi, on est invités à rallumez nos cellulaires lors du sketch sur Denis Coderre (Martin Héroux) où l’ont rit de la multiplication des travaux routiers à Montréal avec le refrain « C’ta cause de Denis » sur l’air de Happy de Pharrell Williams. D’ailleurs, puisque le maire était présent à la première, la fin du sketch était particulièrement bien pensée avec un double-selfie des Denis.
Malgré ses défauts, il est difficile de ne pas applaudir l’ampleur du défi qui est relevé, année après année, par le théâtre du Rideau Vert en offrant une revue théâtrale de l’année. Éplucher les événements marquants, en retenir l’essentiel et les traduire en divertissement n’est pas une mince tâche. L’énergie des acteurs de Revue et corrigée est renouvelé à chaque fois et leur polyvalence impressionne. L’humour est parfois récurrent, souvent doublement souligné, le tout se passe à un rythme effréné, mais ça fait du bien de dédramatiser les situations déplorables de l’année par le rire, que ce soit avec une publicité des résidences Manigances Soleil, le bulletin de nouvelles TVA qui se transforme en jeu-questionnaire ou la Charte de la laïcité qui se retrouve à vendre dans les petites annonces. On ne peut que souhaiter que certains ajustements soient apportés au fil des représentations et que l’édition 2015 saura se renouveler davantage.