Dans un pays insulaire nommé Matèvina, des vieux racontent certaines légendes inquiétantes à propos de l'avenir de leur nation et de ceux qui la gouvernent. Inspirés par ces légendes et pressentant la dérive de leur pays, de jeunes révolutionnaires tenteront par la force, la ruse et autres moyens plus drastiques de manifester leur colère et d'influencer le cours des choses. Une fois le mouvement de rébellion enclenché, jusqu'où ira la révolte?
Cette cinquième production du THÉÂTRE I.N.K. parle du temps qui passe, de cette période entre 16 et 35 ans où la façon de voir la vie change, où l'on passe du « tout est possible » à l'ère de l'expérience...
Fondé en 2002 par Marilyn Perreault et Annie Ranger, le THÉÂTRE I.N.K. crée et met en scène, pour les publics adolescent et adulte, des textes inédits d'ici tout en alliant poésie de l'image et théâtre de mouvement. Depuis 2003, il a créé : La robe de Gulnara, Roche, papier, couteau…, La cadette et Les Apatrides; fière de beaux succès, la compagnie a repris ces spectacles à Montréal et en tournée au Québec. Sa première création, Les Apatrides, a notamment récolté deux distinctions à la Soirée des Masques 2005 (révélation de l'année et meilleure conception du décor), et le spectacle La robe de Gulnara (coproduction avec le THÉÂTRE DE LA BORDÉE et la C.D.Q.) a quant à lui remporté le Prix de la critique (catégorie Québec) de l'AQCT.
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Costumes : Sarah Balleux
Décor : Geneviève Lizotte, Elen Ewing
Lumière : Martin Gagné
Musique : Martin Marier
Cartes Prem1ères
Date Premières : du 10 au 17 avril
Régulier 25$ – 30 ans et moins 20$ - 65 ans et plus 20$ -
Groupe de 15 personnes et plus 18$
Carte CAMPUS 18$
Carte Prem1ères 12,50$
Rallier: Projection du film République
Ce samedi, à 19h, venez voir et entendre le film d'Hugo Latulippe République: un abécédaire populaire. De Serge Bouchard à Dominic Champagne, de Christian Vanasse à Steven Guilbeault au rire cathartique de Brigitte Haentjens, médecins, politologues, anthropologues, sociologues, artistes se succèdent pour réfléchir à voix haute les possibles.
Après la projection, discussion avec Dominic Champagne qui sera présent pour échanger et proposer une mobilisation concrète dont l'objectif est de réunir 100 000 citoyens le 22 avril à 14h à Montréal.
Production Théâtre I.N.K.
par Pascale St-Onge
Le hasard fait drôlement les choses. Même si la plus récente pièce d'Annie Ranger a d'abord été écrite en 2008, il est difficile, voire impossible, de ne pas relater l'histoire de cette petite île imaginaire aux différents débats nationaux et internationaux auxquels nous sommes confrontés depuis quelque temps. Cette proximité troublante avec l'actualité, en ce printemps 2012, aurait pu nuire grandement au message de L'effet du temps sur Matèvina. Heureusement pour l'équipe, la production n'en souffre pas et réussit à sortir son épingle du jeu.
Matèvina est une île avec un gouvernement aux pratiques douteuses et à la limite du totalitarisme. Une partie de terre dont l'histoire a été manipulée et dont la mémoire des anciens héros a été bafouée. Un groupe de militants s'organise pour sauver leur patrie, principalement par l'organisation d'actions au coeur de grandes manifestations. Après un échec cuisant lors d'un sommet économique (qui rappelle systématiquement le dernier G20 à Toronto, par son nombre d'arrestations, notamment.), ils tenteront le tout pour le tout, soit l'infiltration du gouvernement. Un autre échec, par la faute du temps cette fois, lui qui a enlevé toute envie de révolution à cette jeunesse qui voulait tant donner à son pays, mais qui, finalement, s'est voué à la famille et autres obligations. Les jeunes révolutionnaires, une fois de plus, se sont conformés.
Annie Ranger, celle qui était déjà connue pour son écriture et son travail au sein du théâtre Aux Écuries nous offre une première mise en scène inventive et très près du travail chorégraphique. Le Théâtre INK était déjà connu pour son jeu physique exigeant et cette production ne fait pas exception. Des interludes presque dansés illustrent différemment des situations qu'on croit avoir vues déjà sous toutes les formes possibles grâce aux médias. Par exemple, cette manifestation qui se conclut en arrestations de masse : une scène très impressionnante malgré le petit nombre de comédiens.
La scénographie de Geneviève Lizotte et Elen Ewing, illustrant surtout le squat des jeunes militants, est certainement un point crucial de la réussite de cette production. Les échafauds qui occupent majoritairement la scène deviennent un véritable terrain de jeu pour toute l'équipe. Les éclairages magnifiques de Martin Gagné aident à sculpter cet espace, qui est utilisé au maximum de sa capacité - la hauteur ou la profondeur, le caché, les ombres, etc. - par la metteure en scène.
Si plusieurs comédiens sont connus pour leur excellent travail par le passé, une certaine incertitude semble planer sur l'équipe. Le bafouillage à intervalles un peu trop réguliers nous fait décrocher de cet univers créé de toutes pièces et nuit à la crédibilité de ses personnages, dont certains sont déjà contradictoires. Par exemple, celui d'Élise, principal pivot de cette pièce, semble d'abord refuser toute association au mouvement de révolte, mais se sacrifie pour lui à peine quelques répliques plus tard en se proposant pour infiltrer le gouvernement. Tout va trop vite dans cette pièce ; il est vrai que plusieurs années sont portées à la scène, mais des choix et des évolutions drastiques de personnages sont imposés au public sans que celui-ci n'ait pu voir venir quoi que ce soit. Les raisons profondes du débat social que tente de provoquer le groupe de militants sont donc floues et le dénouement est précipité, leur abandon de la lutte presque incroyable puisque inattendu par tous.
Théâtre INK ne pourra être indéfiniment à cheval entre deux publics cibles : les adolescents et les adultes. Cette pièce sied très bien à un public plus jeune, car il couvre largement le sujet du militantisme et fait appel à une actualité à laquelle on apprend à être sensible, mais elle manque de rigueur pour un public plus mature. On le sait bien, le débat est toujours plus pointu qu'uniquement entre la droite et la gauche. Une organisation militante est complexe et ses moyens de mobilisation aussi. Changer le monde, ça prend du temps. Il manque de détails, de consistance à cette histoire, car même si inventé, ce monde nous rappelle sans cesse notre propre réalité et le texte ne peut se permettre de tourner les coins ronds sur un tel sujet.
Au final, le temps, sous toutes ses formes, est un élément majeur de cette production. « L'effet du temps » est réfléchi et influence, mais le temps lui-même semble jouer contre la forme de la pièce. Mais avec une scénographie magnifique, un propos qui brûle d'actualité et une belle plume, c'est une pièce réussie et somme toute agréable pour un public surtout jeune.