Dans ce spectacle de marionnettes en deux parties, Paul Zaloom nous présente d’abord Mr. Butch Manly, une marionnette ventriloque restée enfermée dans une boîte pendant des années. Le comédien l’informe des actualités et la marionnette comprend que les choses ont bien changé depuis 50 ans… Paul Zaloom nous conte ensuite les aventures de White-Man, un héros intergalactique caucasien venu civiliser la Terre. Après avoir amélioré la vie des «indigènes», il devient un père Noël philanthrope, chassant les immigrants illégaux des États-Unis et combattant le socialisme. Il s’apercevra avec horreur que les Blancs deviendront une minorité dans les États-Unis de 2040. Que va faire White-Man?
Traduction Paul Zaloom et Lynn Jeffries
Photo Mark Brutché
Rencontre-débat avec le public après la représentation du 4 novembre « Discours racial et instrumentalisation politique. »
Plein tarif : 27 $
Production de Paul Zaloom et Lynn Jeffries
Spectacle codiffusé par Casteliers et le Théâtre Aux Écuries
Section vidéo
En cette ère où les angry white men font beaucoup parler d’eux pour leur soutien indéfectible à Donald Trump, et à quelques jours de la tenue des élections présidentielles américaines (au moment d’écrire ces lignes), White Like Me : A Honky Dory Puppet Show s’impose comme une satire politique incontournable.
Invité par Casteliers, le marionnettiste étatsunien Paul Zaloom débarquait Aux Écuries avec son spectacle, qu’il cosigne avec Lynn Jeffries, et tout un attirail d’objets et de références à la culture américaine. D’une poupée terrifiante aux petits bonshommes verts en passant par la menaçante perruque orange du candidat à la présidentielle américaine, dont les « wrong » résonnent comme le tonnerre.
White-Man est un héros de l’exploration spatiale en provenance de la planète Caucazoid. Guidé par Dieu, en barbe blanche et en personne, il va atterrir sur Terre dans le but de coloniser ses paysages et ses habitants. Après avoir amélioré la vie des indigènes, White-Man va se faire citoyen et philanthrope, combattra l’immigration illégale… pour finalement être assommé par la nouvelle selon laquelle les Blancs deviendront minoritaires au pays en 2042. Pauvre White-Man!
C’est dans un français parfois hésitant, mais toujours charmant, que Paul Zaloom joue pour nous le drame de White-Man. Sur scène, c’est un véritable bric-à-brac de figurines, d’objets du quotidien et de jouets. Au milieu de ce bazar, une toute petite boîte sert de castelet. L’inventif marionnettiste virevolte autour de cette boîte pour saisir les différents objets qui lui servent à raconter l’histoire et nous surprend chaque fois par son habileté à détourner l’usage de ces objets. Tantôt une vache se fait emporter par un Slinky, pour rappeler le passage des tornades, tantôt un poisson sage traverse la scène, prisonnier d’un emballage de plastique. Lorsqu’un morceau de décor refuse de tenir debout, qu’un objet se montre rétif ou qu’une prononciation française lui fait des misères, l’interprète se tourne vers le public et en fait son témoin, créant instantanément une complicité entre la scène et la salle (plutôt jeune le soir de la représentation à laquelle j’ai pu assister).
Avec White Like Me, l’auteur, satiriste et interprète américain se penche sur des sujets d’actualité et matières à débat de l’autre côté de la frontière comme ici : l’immigration, l’intégration, la notion d’identité culturelle, religieuse ou sociale et même le réchauffement climatique et la déforestation. Pas des sujets légers… mais que la production aborde avec beaucoup d’humour et d’intelligence. On rit beaucoup, souvent jaune, mais le spectacle soulève aussi habilement quelques questions sérieuses et envoie quelques flèches bien aiguisées. Cependant, au fil de la représentation, la critique s’éparpille et perd de sa force de frappe, tant le public attend la prochaine surprise tirée de la manche du marionnettiste.
Heureusement, le spectacle déborde de jeux de mots (parfois intraduisibles), de clins d’œil culturels, politiques ou sociaux qui déclenchent bien des rires, et de personnages savoureux (mention spéciale à Dieu, qui livre les meilleures répliques). Sous son allure loufoque et brouillonne, le spectacle propose une critique acerbe de la société américaine, mais sans jugement, dénonce les préjugés et plonge au cœur des craintes identitaires qui font tant les manchettes. Mais le plus grand plaisir de voir White Like Me est d’assister aux petits prodiges du marionnettiste derrière son castelet.