Mon(Theatre).qc.ca, votre site de théâtre

Festival TransAmériques - 23 et 24 mai 2014, 20h

Snakeskins

Danse
Un spectacle de Par B.L.eux
Concept, chorégraphie et interprétation Benoît Lachambre avec la participation de Daniele Albanese

De longs cordages s’étirent en point de fuite vers l’infini, vers le mystère des origines et du devenir. Paysage scénique hallucinatoire, où le magnétique Benoît Lachambre se livre à de troublants rites de passage. Serpent à plumes, super héros habillé de latex, aigle majestueux, hargneux clochard ou insecte piégé dans une toile d’araignée, il s’abandonne à une série de mues avec une mobilité impressionnante. Sculpté par d’invisibles forces, traversé par les bruines et orages sonores orchestrés en direct par Hahn Rowe, son corps est le vaisseau d’un voyage sensoriel qui déforme subtilement le cadre du réel.

En 2013, le succès éclatant de Snakeskins a été couronné par le prestigieux Grand Prix de la danse de Montréal, attribué à Benoît Lachambre pour son apport exceptionnel à l’art chorégraphique. Insatiable défricheur des territoires du corps, il revient au FTA pour une cinquième fois avec ce « faux solo » où l’accompagne aussi le performeur Daniele Albanese. D’une spectaculaire intensité.

Fort réputé en Europe où ses ateliers sur l’hyper éveil des sens font fureur depuis une quinzaine d’années, le Québécois Benoît Lachambre s’inscrit à l’avant-garde de la danse qui mise sur la présence, les états de corps et la recherche de l’authenticité du geste, plutôt que sur la forme et la plastique. Formé aux Ballets Jazz de Montréal, il s’intéresse dès les années 1980 aux approches somatiques et à l’improvisation. Peu à peu, il développe une pratique fondée sur la conscience corporelle, se concentrant sur l’énergie, la circulation des fluides, la tension musculaire ou la température. En 1996, il fonde Par B.L.eux (Benoît Lachambre et eux), plateforme de recherche où il crée une quinzaine d’œuvres interdisciplinaires réalisées avec des artistes d’horizons divers, dont Boris Charmatz, Sasha Waltz et Marie Chouinard. Le prestigieux prix Bessie est venu récompenser Forgeries, Love and Other Matters, créée avec Meg Stuart et le compositeur-interprète Hahn Rowe, qui l’accompagne également dansSnakeskins. Déjà programmé au FTA avec 100 rencontres (2005), Is you me (2008, avec Louise Lecavalier, Hahn Rowe et Laurent Goldring), Body-Scan(2009, avec Su-Feh Lee) etChutes Incandescentes (2012, avec Clara Furey), le chorégraphe-interprète a aussi participé à plus de 20 autres productions et reçu plus de 25 commandes chorégraphiques parmi lesquelles « I » Is Memory pour Louise Lecavalier ou les œuvres JJ’s Voices et High heels toopour le Cullberg Ballet à Stockholm. Lauréat du prix Jacqueline-Lemieux en 1999, il a vu sa carrière couronnée du prestigieux Grand Prix de la danse de Montréal en 2013.

---

  Tweet

______________________________________

 Critique

Critique

Imprimer la critique

par Pascale St-Onge

À la demande générale, Benoît Lachambre fait un retour au FTA avec sa création Snakeskins, récipiendaire du Grand Prix de la danse de Montréal en 2013. Cette étude du mouvement, basée sur celui du serpent, se nourrit également des formes mythiques et spirituelles que le chorégraphe a prises dans la culture maya, notamment, donnant au spectacle, par moments, des allures de rituel.

Un échafaudage au centre de la scène soutient des dizaines de cordes qui sont elles-mêmes attachées à un cadre plus large à l’avant de la scène. Le tout donne un effet de perspective saisissant au moment d’entrer dans la salle, mais aussi tout au long du spectacle. À plusieurs moments, le public peut se confondre sur la notion de distance entre le danseur et les cordes, mais ce point de fuite qu’est l’échafaudage crée aussi un effet plastique très intéressant ; Benoît Lachambre se confond aux cordes, jouant avec notre vision en trois dimensions. Ces cordes sensibles, lorsque manipulées, réagissent au moindre mouvement, créant des effets ondulatoires impressionnants ; elles découpent la chorégraphie en la rendant concrète à un autre niveau que celui du corps. Avec la complicité d’un musicien sur scène, Hahn Rowe, le danseur travaille le micromouvement, majoritairement centré autour de la colonne vertébrale et de son effet sur son dispositif scénique. Ajoutons à cela des éclairages dynamiques et en symbiose avec son décor, et le tout se solde par une expérience sensorielle hors du commun.

Malgré certains moments difficiles à décrypter et son aspect rituel parfois inquiétant, Snakeskins demeure un grand spectacle. Sans aucun doute, la finale est un sublime moment qui restera gravé dans vos mémoires, alors que le danseur semble renaître à la suite du spectacle, dansant jusqu’à ce que tous les spectateurs sortent de la salle. Son retour au FTA n’est donc pas étonnant. Il sera intéressant de voir Benoît Lachambre dans un autre spectacle du festival cette année, Phèdre plus précisément, où il prendra cette fois le rôle de comédien.

24-05-2014