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Festival TransAmériques - Du 31 mai au 2 juin 2016, 19h
Nos serments
Théâtre
En français
Un spectacle de L’In-quarto
Mise en scène Julie Duclos
Textes Julie Duclos, Guy-Patrick Sainderichin
Interprétation Maëlia Gentil, David Houri, Yohan Lopez, Magdalena Malina, Alix Riemer

Julie Duclos en est seulement à sa troisième mise en scène. Déjà, par le raffinement de son travail, et le jeu subtil et suave de ses acteurs, on dit qu’elle touche à la grâce avec Nos serments. Ils n’ont pas 30 ans et se bercent d’utopies sur l’amour, le désir et la liberté. 40 ans après Mai 68, ces amoureux insolents et fragiles s’autorisent à vivre hors des carcans. Jusqu’où tiendront-ils ?

« C’est bien d’être libres, mais faut pas non plus tout foutre en l’air », lance Esther. Ce cri d’une génération vantant une dangereuse désinvolture évoque l’amour tumultueux vu de l’intérieur, géométrie complexe dessinée par cinq jeunes à la sincérité désarmante. Dérivé imaginaire du film La maman et la putain de Jean Eustache, la pièce fait évoluer les personnages à la fois sur scène et à l’écran. Cruels et tendres, ils échangent un flot de dialogues au verbe affûté. Humour incisif, répliques mordantes, duels passionnés. Un portrait doux-amer sur l’inconstance de l’amour.

Julie Duclos (Paris)

Projections sur scène, voix off, montage, autofiction et fragmentation, le théâtre intime de Duclos s’affranchit du cinéma, mais le convoque aussi dans un jeu qui remet en question sans juger les conduites humaines pour mieux les comprendre.

Après deux pièces remarquées — Fragments d’un discours amoureux, d’après Roland Barthes (2011), qui évoquait la solitude universelle de l’amoureux, puis Masculin/Féminin (2012), qui interroge le couple —, la comédienne Julie Duclos poursuit son étude sur le désir en signant une troisième mise en scène, Nos serments, créée au théâtre de La Colline en 2014 et coécrite avec Guy-Patrick Sainderichin. La pièce, reprogrammée après un succès fulgurant, est très librement inspirée du film de Jean Eustache, La maman et la putain. Duclos n’était pas née en 1973, année de la sortie du film, contrairement à Sainderichin. Il a vécu de près la révolution de Mai 68 et la Nouvelle Vague. C’est à travers leurs regards croisés que se rejoue dans Nos serments l’histoire de couples expérimentant l’amour libre, avec ce qu’il a de provocant, contradictoire et drôle pour parler du désir, de soi et de l’autre.


Section vidéo


Assistance à la mise en scène Calypso Baquey
Scénographie Paquita Milville
Lumières Jérémie Papin
Vidéo Emilie Noblet
Son Quentin Dumay, Pascal Ribier
Costumes Lucie Ben bâta, Marie-Cécile Viault
Conseil scénique et régie générale Mathilde Chamoux
Photo Elisabeth Carecchio

Durée : 2 h 30 incluant entracte

Tarif 34 $ à 40 $

1er juin, rencontre après la représentation

Création au CDN de Besançon, le 14 octobre 2014

Coproduction CDN de Besançon, La Colline – Théâtre national, CDN Orléans Loiret Centre, Le Mail – Scène Culturelle de Soissons, MA scène nationale – Pays de Montbéliard, Célestins – Théâtre de Lyon, Théâtre le Poche (Genève) avec le soutien de DRAC Île-de-France et la participation artistique de Jeune Théâtre National

Présentation avec le soutien de l’Institut français, Service de coopération et d’action culturelle du Consulat général de France à Québec

in-quarto.com


FTACentre du Théâtre d'Aujourd'hui
3900, rue Saint-Denis
Billetterie : En ligne : fta.ca
Par téléphone 514 844 3822 / 1 866 984 3822
En personne :
La Vitrine, billetterie officielle du FTA* - 2, rue Sainte-Catherine Est (métro Saint-Laurent)
*En personne, les billets pour les spectacles présentés à la Place des Arts ne sont pas en vente à La Vitrine, mais exclusivement à la PDA.

 
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Critique

Crédit photo : Elisabeth Caracchio

Nuit. Intérieur d’un appartement de classe moyenne. Un homme affalé sur un sofa, une femme attablée. Un premier couple en crise. Nos serments, de la compagnie française L’In-quatro, déballe d’emblée son scénario.

Marquée par le film de Jean Eustache La maman et la putain, la jeune metteure en scène Julie Duclos s’en est très librement inspirée pour sa troisième production, Nos serments (coécrite avec Guy-Patrick Sainderichin). La piècepoursuit l’enquête sur le désir amoureux amorcée dans Fragments d’un discours amoureux et Masculin/Féminin. Les personnages et les situations de La maman et la putain ont servi de base à des improvisations avec les comédiens, qui, à leur tour, ont servi à créer le spectacle.

Plus de quarante ans ont passé depuis la sortie du film d’Eustache, et pourtant, les thèmes abordés, la quête des personnages et leurs angoisses paraissent toujours d’actualité. Ils ont la trentaine, vivent à Paris, ne manquent pas d’argent (Mathilde, Esther et Oliwia travaillent, François vit aux crochets de ses amoureuses, Gilles est riche, travailler serait pour lui une obscénité). Leur histoire tourne autour de la recherche d’équilibre dans la relation amoureuse, d’une liberté revendiquée, mais pas toujours assumée, de la marchandisation de l’affection, de l’amour qui étouffe, et de l’authenticité (mais comment rester fidèle à soi-même quand toute relation nous change forcément?).

Prenant le parti d’une interprétation au plus près du « vrai », du « non-jeu », Duclos a fait un magnifique travail à la direction d’acteurs pour ce spectacle de près de 2h30. Rempli d’humour et sans temps mort, même dans le silence, Nos serments a vite fait de charmer son public. D’un naturel déconcertant, les cinq acteurs  font preuve d’une grande virtuosité. Comme dans la réalité, les échanges sont parfois faits de silence, parce qu’il n’y a simplement rien à dire ou parce qu’il y a des choses qu’on n’ose pas dire, même avec la totale franchise dont on se réclame. Le quotidien amoureux est là, sur scène, sans flaflas. Dans les rôles d’Esther et de François, Alix Riemer et David Houri se distinguent particulièrement, si bien que malgré les contradictions évidentes de leurs personnages, malgré l’égoïsme de François et l’inconstance d’Esther, le public tantôt penche pour l’un tantôt soutient l’autre. Impossible de départager entre qui a raison et qui a tort.

L’ultraréalisme et l’intimité des dialogues et de l’interprétation sont habilement pris à contrepied par la scénographie qui, avec ses projecteurs, ses pans de murs et ses accessoires de plateau de tournage, déconstruit à tout instant le réalisme de l’histoire. En milieu de scène trône même un grand écran où sont projetées certaines scènes tournées en extérieur. Tandis que les acteurs incarnent leurs personnages avec un grand naturel, tout le reste nous crie que l’on fait face à une fiction. Un jeu sur deux niveaux simple, mais maîtrisé et redoutablement efficace.

Véritable étude sociologique des relations amoureuses, humaines et donc évidemment complexes, Nos serments parle tout autant du désir et de la volonté de rester fidèle à soi-même que de la difficulté à se quitter. Si la liberté sexuelle que revendiquent ces jeunes trentenaires paraît triste et vouée à l’échec, la pièce se termine sur une scène très touchante qui redonne un peu d’espoir. Certaines personnes évoluent, d’autres ne changeront jamais, mais l’important, après tout, c’est de se sentir en paix.

01-06-2016