La route est longue d'un sous-sol de Repentigny jusqu'à la planète Tatouine. Surtout si l'on passe par le Super C, Central Park et le seizième étage du CHUM. Mais, pour l'esprit obsessif, rêveur et décalé du narrateur, ces détours sont autant d'aventures salutaires.
Texte Jean-Christophe Réhel
Mise en scène et montage Olivier Arteau
Avec Marc-Antoine Marceau, accompagné de Stéfanelle Auger et Olivier Forest
Crédits supplémentaires et autres informations
Assistance mise en scène Lé Aubin
Scénographie et costumes Élène Pearson
Musique Olivier Forest
Éclairages Keven Dubois
Les billets pour les cinq spectacles en salle seront en vente dès le vendredi 12 mars 2021, au coût de 25$ taxes et frais de service inclus et en admission générale
Durée : 1h10
Sous toute réserve, le spectacle devrait avoir lieu dans la salle John-Applin
Production Le Trident
Avant l’adaptation cinématographique annoncée en juillet 2020 par le réalisateur Ian Lagarde et la productrice Gabrielle Tougas-Fréchette, le Trident propose en ce début d’automne « déconfiné » la version théâtrale de Ce qu’on respire sur Tatouine, tiré du premier roman de Jean-Christophe Réhel. Depuis sa sortie, le livre a suscité un certain « buzz » dans le milieu littéraire, en plus de remporter le Prix littéraire des collégiens en 2019.
Selon plusieurs, Ce qu’on respire sur Tatouine est le genre de bouquin que l’on déteste ou que l’on adore. Chroniques banales d’un malade chronique, l’histoire se résume ainsi : atteint de fibrose kystique, Christophe, jeune homme vivant dans un sous-sol de Repentigny, navigue entre son job au Super C, son amie avec bénéfices, sa sœur new-yorkaise et le 16e étage du CHUM, tout en amalgamant sa réalité à celle de la série Star Wars.
Sans être misérabiliste, la mise en scène d'Olivier Arteau fait ressentir toute cette tristesse, cette fatigue latente et cette souffrance qui habitent et immobilisent physiquement et mentalement le narrateur, jusqu'à la finale tout aussi affligeante que possiblement lumineuse.
Ce qui aurait pu être ennuyant à mourir devient fascinant, grâce au collage et au travail d’Olivier Arteau. Ce dernier signe une mise en scène réfléchie, inspirée et sans compromis (pour les quatre spectacles en cours, il faut avouer que le Trident n’a pas lésiné sur les moyens, malgré la petitesse des jauges et des scènes). À demi enterré dans une sorte de litière géante, le comédien Marc-Antoine Marceau incarne Christophe avec autant de candeur que de profondeur. Se cachent dans la rocaille tous les accessoires dont il aura besoin, des vêtements aux cannettes de bière, causant parfois des moments comiques accidentels. Cette dune qui le maintient en place devient le symbole de sa maladie qui lui fait cracher le sang, son immobilité mentale ou encore la planète idéale dont il rêve, Tatouine. Si visuellement la scénographie d’Élène Pearson et les éclairages de Kevin Dubois définissent la psyché du personnage, la trame sonore d’Olivier Forest (côté jardin) vient compléter la théâtralité de la proposition. Percussion et cloches sont mises de l’avant, avec un souci d’utiliser des instruments à vent « patentés », comme des tuyaux que l’on fait tournoyer ou dans lesquels on souffle, pour incarner la respiration quasi inexistante du personnage, dû à sa condition médicale. Côté cour, Stéfanelle Auger, qui occupe le poste de deuxième bruiteuse, prend une tout autre place au cours de la représentation en incarnant avec sensibilité une multitude de personnages en voix hors champ, de la sœur aux employés du Super C, du propriétaire Normand à la pseudo-amoureuse de Christophe.
Grâce à l’humour qui flotte ici et là dans le récit et aux quelques pépites poétiques, Ce qu’on respire sur Tatouine se veut une adaptation plutôt réussie d’un roman obsessif et singulier, malgré une trame narrative somme toute cocasse ou anecdotique. Sans être misérabiliste, la mise en scène d'Olivier Arteau fait ressentir toute cette tristesse, cette fatigue latente et cette souffrance qui habitent et immobilisent physiquement et mentalement le narrateur, jusqu'à la finale tout aussi affligeante que possiblement lumineuse.
26-09-2020