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La cartomancie du territoire
Du 28 janvier au 8 février 2020
mardi et mercredi 19h, jeudi et vendredi 20h, samedi 16h
à l'exception du samedi 8 février, 13h30

La cartomancie du territoire est une création théâtrale et vidéographique sur notre rapport aux réserves autochtones et aux réserves naturelles, mais aussi sur la colonisation du territoire et de la pensée. Pour l’écrire, Philippe Ducros est resté fidèle à ses habitudes; il s’est déplacé dans différentes communautés des Premières Nations du Québec pour aller à la rencontre de ces gens qu’on ignore et qui, pourtant, sont les descendants du sol sur lequel on vit, ce sol que l’on piétine, que l’on pille. Ceux qu’on appelait sauvages, qu’on kidnappait vers les pensionnats où sommeillait l’horreur la plus noire.

Serait-il possible, à travers leur histoire et leurs réalités, de voir notre propre colonisation, celle qu’on s’impose en tant qu’individu, en tant que nation, celle qu’on impose au territoire qui nous habite et qui définit notre destinée commune ? Serait-il possible d’apprendre d’eux, de voir comment ils ont survécu, comment ils se décolonisent, comment ils réinventent des paradigmes à notre modernité ?


Texte et idée originale Philippe Ducros
Traduction vers l’innu-aimun Bertha Basilish et Evelyne St-Onge
Mise en scène Philippe Ducros
Avec Marco Collin, Philippe Ducros et Kathia Rock


Crédits supplémentaires et autres informations

Assistance à la mise en scène Jean Gaudreau
Images Éli Laliberté
Conception vidéo Thomas Payette HUB Studio
Intégration vidéo Antonin Gougeon HUB Studio
Musique Florent Vollant
Conception sonore Larsen Lupin
Lumière Thomas Godefroid
Costumes Julie Breton
Aide aux accessoires Robin Brazill
Direction technique et régie Samuel Patenaude
Répétiteur Xavier Huard

Durée à venir

Soirée rencontre
Tous les premiers vendredis de chaque spectacle, les créateurs se prêtent au jeu de questions-réponses pour expliquer les aspects de la production et entendre vos points de vue

TARIFS
PRIX EN PRÉVENTE : 25 $ (jusqu'à la veille du jour de la première)
PRIX DÈS LA PREMIÈRE DU SPECTACLE: 36 $
Lors d'ajout de supplémentaire : billet à 36$ en tout temps

STUDIO MARC DORÉ : 25$ en tout temps

*Les taxes et les frais de services sont inclus dans les tarifs
Choisissez 7 pièces ou plus de la programmation régulière et obtenez la carte privilège « Fidèle au poste ». Elle vous permettra de bénéficier de nombreux avantages

Billets suspendus : Inspirés des Cafés suspendus, les Billets suspendus vous invitent à faire un don dans le but d’offrir un billet à un inconnu n’ayant pas les moyens de se le procurer. Soucieux de développer un public riche, inclusif et ouvert sur le monde, le Périscope s’engage à combler la différence des dons pour proposer, ensemble, l’expérience de l’art vivant aux bénéficiaires des organismes suivants : PECH, Accès-Loisirs Québec, Maison Revivre. Les dons peuvent être faits directement dans le foyer du théâtre ou sur le site www.theatreperiscope.qc.ca

Production Compagnie — Les Productions Hôtel-Motel


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Critique disponible
            
Critique

La dernière décennie a été marquée par la prise de parole des Autochtones. La Commission de vérité et réconciliation du Canada (2008-2015) a mis au jour les objectifs d’assimilation forcée des pensionnats « indiens » et leurs séquelles sur les enfants et leurs familles. Le mouvement Idle No More a mobilisé les nations d’un océan à l’autre (2012-2013). L’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées (2016-2019) a examiné les causes systémiques des formes de violence dont elles sont victimes. La Commission d’enquête sur les relations entre les Autochtones et certains services publics au Québec (2016-2019) a entre autres dénoncé le racisme et les pratiques discriminatoires à leur endroit.






Crédit photos : Maxime Côté

Les preuves et les témoignages douloureux s’accumulent tandis que les plaies demeurent vives. Les Premières Nations et les Inuits composent aujourd’hui avec les conséquences intergénérationnelles des politiques de colonisation et d’assimilation qui visaient l’effacement de leurs cultures et de leurs communautés.

« Nos livres d’histoire sont des contes de fées », lance Philippe Ducros dans La cartomancie du territoire, une pièce qui oscille entre le théâtre documentaire et l’introspection poétique.

En 2015, le dramaturge a sillonné les routes 132 et 138 afin de rencontrer des membres de nations autochtones. Sa pièce rend compte de son périple et de ses réflexions personnelles sur leurs conditions de vie, nos rapports au territoire ainsi que sur la colonisation des peuples, des lieux et des esprits. Marco Collin et Kathia Rock, tous deux Innus, accompagnent Ducros sur scène. Par leurs chants et leurs confidences entremêlant l’innu-aimun et le français, entre la tristesse, les pointes d’humour, les prières et l’espoir, ils confient le fardeau de leur héritage. Comme un baume, l’environnement sonore et la musique de Florent Vollant enrobent de douceur la brûlure de leurs témoignages.

Le portrait dressé est bien documenté, dense et exhaustif. On y aborde la perte de l’autonomie des Autochtones et leur inféodation aux gouvernements, la mise en réserves, les pensionnats, les sévices physiques et sexuels, la rupture du tissu familial et communautaire, la violence et les dépendances, les conditions de vie déplorables, le racisme et la discrimination, l’inadéquation des institutions face à leurs besoins et à leurs réalités. La trame de fond ramène cependant aux réflexions intimes de l’auteur sur le rapport au territoire et à l’identité, tout en mettant en parallèle les situations des Autochtones et des non-Autochtones, eux aussi colonisés à leur manière.

Outre quelques chaises, la scène est vide. Elle s’ouvre toutefois sur l’immensité du territoire nordique, dont les images projetées sur écran géant constituent le seul décor. Captées en hiver par le vidéaste Éli Laliberté, elles transportent sur la route de la Côte-Nord, ce long filet d’asphalte bordé de conifères chétifs et baigné de grandioses couchers de soleil. Camions, trains et bâtiments se succèdent à travers les phares des voitures et les bourrasques de neige. On survolera une communauté autochtone, qui du haut des airs ressemble à une maquette avec ses maisons trop bien alignées. Les plans rapprochés dévoilent cependant une tout autre réalité : celle des maisons vétustes et trop petites pour accueillir les familles de plus en plus nombreuses.

Parmi ces images de véhicules et de paysages, les humains se font rares. Il faudra attendre à la toute fin du spectacle pour voir enfin des visages autochtones, tel un générique qui défile pour rappeler que sans eux, ce témoignage théâtral n’aurait pas pu exister. Leur soudaine apparition sur l’écran fait réaliser à quel point leur présence a manqué tout au long de la pièce. Certes, Marco Collin et Kathia Rock incarnent avec sensibilité et humilité leurs pairs marqués par le lourd héritage de la colonisation. Toutefois, on ne peut que constater qu’ils sont les interprètes d’un texte écrit et mis en scène par un Blanc. Malgré le fait qu’il soit sincèrement interpellé par leur histoire et leurs conditions de vie, Philippe Ducros demeure un témoin extérieur de la réalité autochtone, qu’il saisit à travers ses préoccupations personnelles et qu’il présente à travers le langage poétique qui est le sien. Qu’auraient exprimé des artistes Autochtones s’ils avaient eu la chance de raconter leur propre histoire et d’occuper la scène à leurs manières ? Auraient-ils autant insisté sur les âmes brisées, la détresse et la souffrance ? Auraient-ils plutôt montré leur force, leur résilience, leur guérison, leur dignité ? Une véritable démarche de décolonisation ne serait-elle pas de laisser la parole et l’espace aux Premières Nations et aux Inuits pour qu’ils nous enseignent le monde tel qu’ils le voient et le portent en eux ? Ces questions ne s’adressent pas qu’au dramaturge, mais aussi aux institutions culturelles et aux lieux de diffusion…

La décolonisation et la co-construction de relations nouvelles entre Autochtones et Allochtones seront des processus longs et ardus, semés de maladresses et d’incompréhensions mutuelles. On ne peut que saluer les initiatives comme celle de Philippe Ducros, qui témoignent d’un désir de s’ouvrir à ceux et celles que nous côtoyons sans les connaître. Le Théâtre Périscope emprunte également cette voie en accueillant en ses murs Iskwewok, une exposition colorée de l’artiste atikamekw Meky Ottawa. Espérons maintenant que les petits pas deviendront grands, et que bientôt les Autochtones occuperont pleinement les devants de la scène, au théâtre comme ailleurs.

30-01-2020
Théâtre Périscope
2, rue Crémazie Est
Billetterie : 418-529-2183

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Dates antérieures (entre autres)

Du 27 mars au 7 avril 2018 - Espace Libre