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Du 18 au 28 octobre 2011
Entre Vous et Moi, il n'y a qu'un mur
Texte et mise en scène Jocelyn Pelletier
Avec Lucien Ratio, Éliot Laprise, Alexandrine Warren, Joanie Lehoux et Noémie O'Farrell

Un espace vide, désaffecté, où les corps et les idées se fracassent. Un couple se questionne et questionne le public sur l'intérêt et la place de l'amour dans notre société. Une mère modèle est trop occupée à être parfaite pour prendre soin de ses deux filles. Une jeune femme et son alter ego tentent de se remémorer une soirée cauchemardesque. Un homme crache ses frustrations sur un mannequin de centre commercial;. Et finalement, on se retrouve en plein cœur d'un établissement scolaire sur le point d'être frappé par un évènement tragique…

Toutes ces existences en quête/perte de sens forment une fresque que j'ai nommée Entre Vous et Moi, il n'y a qu'un mur.

… des corps et des idées se fracassent sur fond d 'émotions/(stroboscope; étreintes vides…

À l'image de notre société, ce sera un spectacle exigeant et surchargé.

Ce spectacle sera/est une révolte.


Assistance à la mise en scène : Rachel Lapointe
Scènographie : Dominic Thibault
Assistance à la scénographie et éclairages : Jean-François Labbé
Conception sonore : Pascal Asselin
Mouvements: Karine Ledoyen

Carte Premières
Cartes Prem1ères
Date Premières : 21, 22, 28, 29 octobre 2011
Régulier : 26$
Carte premières : 13$

Une production SUSHI (POISSE/SON/MORT)


Premier Acte
870, de Salaberry
Billetterie : Réseau Billetech 418-694-9656

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 Critique
Critique

par Odré Simard

À mille lieues d'un théâtre prémâché, Jocelyn Pelletier nous offre une pièce électrochoc qu'il qualifie d'exigeante et de surchargée. Présentée au théâtre Premier Acte, Entre vous et moi il n'y a qu'un mur propose une constellation d'êtres esseulés, essoufflés ou carrément asphyxiés par un monde trop dense, trop violent. L'auteur et metteur en scène nous largue, par le biais de ses interprètes solides, une salve ininterrompue de mots justes et mordants, empreints de sensibilité et d'une urgence palpable.

Comme l'indique le programme, nous assistons d'abord aux questionnements d'un couple sur leur relation ambigüe, puis vient la mère de famille  qui nous livre une litanie presque obsessive sur sa perfection sans tache, alors que ses deux filles réclament son attention sans succès. Ensuite, une jeune femme nous raconte dans un discours disloqué une soirée « pleine de promesses » qui tourne à l'enfer. Finalement, nous sommes les témoins d'une multitude d'adolescents vivant des situations cocasses ou désolantes soit à la maison, à l'école ou encore dans une fête, mais toutes teintées d'un malaise dévorant. La réception réelle du spectacle peut nous sembler toute autre que cette description assez simple. Plus les minutes avancent et plus les personnages sont flous, les acteurs changeant constamment de vêtements et ainsi de personnages, revêtant ces peaux éparses ; les textes sont hachurés, imbriqués subtilement les uns aux autres, chuchotés, hurlés, sués par les actrices et acteurs. Une force hors du commun surgit de ce procédé, car au risque de nous perdre, il nous fait prendre conscience que ces individus pourraient être n'importe qui, nos amis, notre famille ou encore nous-mêmes. Nous sommes tous aux prises avec ce monde aux technologies sans bornes mais à la communication défaillante. Entre chaque individu il n'y a qu'un mur et il ne tient qu'à nous de le faire disparaître pour enfin se rejoindre. La violence et le contraste des incursions sonores et musicales orchestrés par Pascal Asselin (Milimétrik) avec le silence et la stature désincarnée de la parole percutent à souhait le spectateur.  Dans le regard de la jeune femme abusée, dans  l'implacable déroute des adolescents, nous sommes figés devant ce questionnement « comment l'humain peut-il générer autant de violence, de souffrance, et comment contrecarrer ce déni dont nous sommes tous coupables? » Une réponse est tentée à la toute fin du spectacle, une ode contemporaine à la beauté par un homme qui demande dans une belle métaphore « son fix de lumière ».

Entre vous et moi il n'y a qu'un mur, c'est un texte et une mise en scène solide et rigoureuse signés Jocelyn Pelletier, un mouvement harmonisé avec talent par Karine Ledoyen, un jeu assuré par cinq interprètes investis et généreux (Alexa-Jeanne Dubé, Joanie Lehoux, Frédérique Bradet, Gabriel Fournier, Lucien Ratio), une ambiance sonore percutante élaborée par Pascal Asselin et Lucien Ratio et une scénographie et des éclairages au service de l'oeuvre, réalisés respectivement par Dominic Thibault et Jean-François Labbé. Une pièce qui en dit autant devrait être présentée chez les jeunes publics adolescents (non sans un certain suivi pédagogique, il s'agit tout de même d'une œuvre riche et complexe où il est possible de se perdre), et ce, dans l'espoir de leur partager cette vision du caractère insignifiant de la violence et de la haine gratuite. Il y a tant de choses plus essentielles, plus profondes, que tout cela peut commencer en laissant de côté l'intelligence de nos téléphones pour se tourner vers l'unicité des individus qui nous entourent.

21-10-2011