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Du 20 novembre au 8 décembre 2012
L'hiver dedansL'hiver dedans
Texte et mise en scène Maryse Lapierre
Avec Jonathan Gagnon, Marie-Ginette Guay, Catherine Hugues et Frédéric Bouffard

Récompensé par le prix Première oeuvre de Première Ovation, L’hiver dedans parle de ces catastrophes implosives qui trouent le corps de l’intérieur et laissent entrer le vent. Et raconte comment ces ouragans émotifs, ces tremblements de peur, ce tsunami d’amour nous prennent par surprise quand on s’y attend le moins. 

La pièce se déroule dans deux appartements aux murs mitoyens. 

D’un côté, Elle, artiste visuelle. Grande brûlée de l’amour, frappée par le coup de foudre qui réduit en cendres, pas celui qui commence, mais celui qui termine l’histoire, elle plonge dans le trou de sa mémoire et remonte le courant de ses souvenirs. Fantasmes, rêves et créations font surgir l’Homme d’avant, son ancien amoureux entre les boîtes de son nouvel appartement.  

De l’autre côté se trouve le voisin, ingénieur civil. Dans le cadre de son travail, il doit régulièrement rendre compte de l’avancement de ses travaux. Cette façon de structurer les choses le rassure. Pourquoi ne pas l’appliquer à sa propre vie? Son existence bien réglée sera ébranlée par la visite de sa mère, veuve depuis peu… 

Une tempête de neige sans fin s’abat sur la ville. Reclus dans leur appartement, les deux voisins qui ne se connaissent pas partagent pourtant bien plus qu’ils ne le pensent…

Les jours déboulent, les deuils s’accumulent et devant cette conscience aiguë de la fragilité de la vie, ils se demandent, presque pris de panique: «À quelle heure le bonheur?»


Section vidéo
trois vidéos disponibles

     



Assistance à la mise en scène : Mary-Lee Picknell
Scénographie : Karine Mecteau Bouchard
Costumes : Geneviève Lapierre

Une production Théâtre de Passage


Premier Acte.
870, de Salaberry
Billetterie : Réseau Billetech 418-694-9656

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 Critique
Critique

par Odré Simard


Crédit photo : Gabriel Talbot-Lachance

La toute nouvelle création du Théâtre de Passage présente, avec la pièce L'hiver dedans, une histoire toute simple, une histoire comme on en voit souvent, soit une rupture amoureuse, des solitudes qui se côtoient sans se voir, mais avec beaucoup de douceur et de sensibilité. On rencontre donc en parallèle un voisin et une voisine d'un même bloc appartement ressentant un vide intérieur semblable, le même vague à l'âme suscité, entre autres, par la tempête de neige qui perdure depuis trois semaines déjà.

D'un côté, nous retrouvons Marie, interprétée par la très touchante Catherine Hugues, une jeune artiste peintre de 30 ans qui n'arrive pas à se considérer comme une adulte tout à fait, venant tout juste d'emménager dans un petit appartement mal chauffé. Ce changement n'en est pas un particulièrement heureux, puisqu'il est le résultat de sa rupture avec celui qui partageait sa vie depuis cinq ans (Frédéric Bouffard). Enfermée entre ces murs blancs, ainsi qu’à travers un amoncellement de boîtes et de toiles emballées et posées ici et là, comme oubliées, elle revit et revoit sans cesse le moment irréversible de la rupture avec ledit amoureux, sans que l'on soit certain si elle l'imagine ou s’ils ressassent ensemble l’événement douloureux. De l'autre côté, on fait la rencontre du rationnel et introverti constructeur et vérificateur de structure de pont, joué par le toujours comique et attachant Jonathan Gagnon. Son personnage est tellement aliéné par ses démonstrations routinières du travail qu'il parle de sa vie comme si elle était découpée en « points de contrôle », selon divers thèmes telles l'enfance ou la solitude, qu'il nous présente à la manière d'un exposé avec diapositives. Importunée par la tempête de neige, sa mère vient lui rendre visite, jouée avec une grande justesse par Marie-Ginette Guay. On comprend très vite que ce n'est pas tant l'hiver que l'absence de son mari qui la remue, et que cette mort les a bouleversés tous les deux davantage qu’ils veulent bien se l’avouer.

Le texte de Maryse Lapierre traite de façon générale d'un sujet mille fois abordé, de l'amour et de ses multiples désillusions, mais avec une belle intimité. Le personnage du voisin est rafraîchissant et attachant, sorte d’antihéros du quotidien, personnalité de l'ombre qu'on écoute alors avec attention. Ce qui donne l'impression d'avoir accès à une vérité cachée, une solitude plus amère, plus vierge de notre regard que celle de la rupture d’à côté. Au niveau de la structure, il aurait peut-être été préférable de rester concentré sur les quatre personnages centraux, ou, encore, à l'inverse, voir une panoplie de rôles déferler autour des êtres esseulés. Ici, on est à mi-chemin entre deux propositions ; seul Frédéric Bouffard incarne deux autres rôles, mis à part l'amoureux, soit un directeur de galerie d'art et une rencontre charnelle d'un soir. Ce qui fait un peu étrange, avouons-le, dans ce huis clos occasionné par la tempête, bien qu'il joue à merveille ces personnages. La mise en scène offre de belles images et des scènes touchantes, en phase avec une superbe ambiance sonore signée Uberko, ainsi qu'une intégration vidéo intéressante. Cette dernière offre, entre autres, un effet formidable dans une scène où des contours multicolores se tracent sur les boîtes blanches posées dans le décor tout blanc pour amener un effet d'ivresse plus que réussi.

Le Théâtre de Passage nous convie à une rencontre avec un quatuor d'interprètes au charisme fou, dans une mise en scène chaleureuse parsemée de poésie qui donne le goût de rentrer chez soi en espérant y retrouver des bras réconfortants.

22-11-2012