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Du 19 janvier au 6 février 2016
Sauver des vies
Texte et mise en scène Pascale Renaud-Hébert
Avec Maxime Beauregard-Martin, Vincent Champoux, Ariel Charest, Samuel Corbeil, Sophie Dion et Marc-Antoine Marceau

« On sera jamais ces gens-là. On s’est promis ça, pis ça va pas changer parce que je vais mourir. On n’est pas le genre de monde qui choisit On va s’aimer encore comme toune de mariage. On n’a jamais été ce monde-là, pis on le sera jamais. Je te dis pas de pas avoir de peine, ou mal. Je te dis juste qu’on va pas se laisser aller là-dedans, parce que ça serait trop facile. Pis ça nous fait chier, ce qui est facile. »

Murielle a 48 ans, Maude est dans la mi-vingtaine. Elles sont toutes deux frappées par le même sort : un cancer incurable. Murielle aborde la mort avec un silence désarmant pour son mari et ses deux fils. Elle continue à jouer son rôle de mère légèrement castrante, convaincue de ses souvenirs approximatifs et fière de ses références douteuses. Comme si tout était normal, comme si la date d’expiration qu’on lui avait donnée à l’hôpital n’existait pas.

À l’opposé, Maude aborde la mort comme une réalité avec laquelle on doit apprendre à vivre. Son amoureux et elle font le pacte de s’aimer et de vivre leurs derniers moments en écoutant de la musique, en volant des casse-tête en pédiatrie et en mangeant des Doritos. Le couple fait le choix de rire, même si c’est plus difficile. Quand tout se déconstruit autour de nous, mieux vaut s’en tenir à ce qu’on fait le mieux.


Assistance à la mise en scène Élodie Grenier
Concepteurs Maude Groleau, Cécile Lefebvre

Une production Collectif du Vestiare


Premier Acte
870, de Salaberry
Billetterie : Réseau Billetech 418-694-9656
ou lepointdevente.com
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Critique

Crédit photo : Cath Langlois Photographe

L’année 2016 commence de belle façon pour le théâtre Premier Acte avec Sauver des vies,  le tout premier texte solo de la jeune et prometteuse Pascale Renaud-Hébert. C’est une deuxième création pour le Collectif du vestiaire qui avait présenté Julie, tragédie canine (voir notre critique) aussi à Premier Acte il y a de cela moins d’un an.

On note une grande amélioration quant à la maturité du propos et de l’écriture par apport à leur création précédente.  Bien que la perte du chien dans  Julie, tragédie canine n’était qu’un prétexte servant une trame narrative plus complexe, la charge émotionnelle de Sauver des vies est de loin supérieure puisqu’elle nous présente un drame qui, s’il n’est pas arrivé à quelqu’un de notre famille, est probablement arrivé à un proche ou bien à une personne de notre entourage ;  le cancer.

L’histoire tourne autour de Maude (Ariel Charest) et Murielle (Sophie Dion), deux femmes atteintes d’un cancer incurable qui vivront leurs derniers instants avec  cette maladie de façon diamétralement opposée.  Murielle, 48 ans et mère de deux adolescents (Samuel Corbeil et Maxime Beauregard-Martin), vivra jusqu’à la dernière seconde dans le déni de sa maladie ainsi que de sa mort imminente, entretenant un silence déstabilisant envers les membres de sa famille. Maude, mi-vingtaine, décide quant à elle d’aborder son cancer de la manière la plus réaliste possible en acceptant son sort et en vivant ses derniers instants intensément  avec son amoureux (Marc-Antoine Marceau).

Les deux femmes ne se rencontreront jamais réellement dans la pièce, mais l’habile mise en scène de Pascale Renaud-Hébert  fera  en sorte que leurs chemins se croiseront sur scène, superposant la vie de l’une à celle de l’autre, permettant de mettre l’accent sur le parallèle qu’on cherche à créer entre leurs histoires respectives et leur manière personnelle d’y faire face.


Crédit photo : Cath Langlois Photographe

Pascale Renaud-Hébert a un talent indéniable pour l’écriture. Son chassé-croisé navigue de belle manière entre le comique et le drame sans tomber dans le piège de la surenchère ou du tape-à-l’œil. Car, oui, c’est une histoire qui parle de la mort, mais avant tout c’est un récit d’amour qu’elle désire nous présenter : l’amour dans tout ce qu’il peut avoir de plus beau et de plus cruel. Et qu’y a-t-il de plus cruel que de savoir que nous allons perdre la personne que nous chérissons le plus au monde d’un jour à l’autre?

On pleure et on rit sans arrêt durant le spectacle d’une heure et demie. Le rythme est très efficace et les scènes regroupant plusieurs comédiens sont tout simplement délectables.  Celle durant laquelle tous les membres de la famille de Murielle sont à table pour souper et parlent tous les uns par-dessus les autres témoigne de la superbe complicité présente entre les comédiens.  Sophie Dion est tout particulièrement touchante dans son rôle de Murielle. Lors des derniers instants avant sa mort, on pouvait entendre les reniflements nombreux du public qui faisaient foi de son immense talent d’actrice ainsi que de sa grande capacité à émouvoir. Même constat du côté de Vincent Champoux qui joue le mari de Murielle. D’un naturel et d’une aisance exemplaire, il offre une tirade finale poignante et vibrante d’émotion.

Sauver des vies est l’une de ces pièces qui se doit d’être vue mouchoir à la main. Une pièce qui, bien qu’on en connaisse dès le départ la chute finale, arrive à capter notre attention du début à la fin, et ce, sans fla-fla ou autres cabotinages.

23-01-2016