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Manque(s)
Du 15 au 26 septembre 2020
relâche les 20-21 septembre
Spectacle extérieur ambulatoire présenté en 4 stations autour de Premier Acte
5 départs au 15 minutes, de 20h à 21h

L’équipe de création derrière Food Club (qui devait être présenté au printemps dernier) vous propose Manque(s), une variation sur le thème de la relation de l’être humain face à l’absence sur toutes ses formes et l’inconfort que ce manque suscite en lui.

L’idée est apparue en observant ce commencement de 2020. Au début de la crise de la COVID-19, plusieurs d’entre-nous ont eu le réflexe de faire des provisions démesurées en nourriture, par peur d’en manquer. Au cours des derniers mois, nous avons pu observer le manque de façon générale : le manque d’art vivant, de contacts physiques, d’amour, de liberté, d’une personne disparue, le manque de rire et de plaisir, le manque de papier de toilette, le manque, le manque, encore le manque. Comment réagissons-nous face à la perte, face à ce trou creusé autour de nous et en nous ?

Sous forme d’un parcours théâtral à proximité de Premier Acte, Théâtre Escarpé désire parler de ces manques qui habitent notre quotidien depuis toujours et y laissent des traces. Le tout livré avec sensibilité, douceur et humour. Sans oublier l’espoir de combler les Manque(s). Une version en baladodiffusion sera aussi disponible.


Mise en scène Samantha Clavet


Crédits supplémentaires et autres informations

Assistance à la mise en scène et direction de production Catherine Simard
Conception sonore Émile Couture
Conception d’éclairages Marie-Pier Faucher

Tableau 1 : Cul-de-sac

Auteur : Gabriel Simard
Scénographie : Dominique Giguère
Voix : Gabriel Simard
Comédien : Paul Fruteau de Laclos

Tableau 2 : Mi-figue, mi-raisin

Auteurs : Nicola Boulanger et Edwige Morin
Scénographie : Dominique Giguère
Voix : Nicolas Boulanger, Samantha Clavet, Marina Harvey, Edwige Morin
Comédiens : Samuel Bouchard, Edwige Morin, Catherine Simard

Tableau 3 : Bleu Renée

Autrice : Geneviève Bournival
Scénographie : Geneviève Bournival
Voix : Catherine Simard
Comédienne : Samantha Clavet

Tableau 4 : De l’importance de se brosser les dents

Auteurs : David Boily et Paul Fruteau De Laclos
Scénographie : Geneviève Bournival
Voix : David Boily, Paul Fruteau De Laclos, Anne-Justine Guestier
Comédiens : David Boily et Nicola Boulanger

Durée : environ 1h

Réservation obligatoire sur lepointdevente.com

Tarifs : contribution volontaire suggérée de 20$ - Détenteurs de la carte privilège : un breuvage non-alcoolisé vous sera offert

Une production Théâtre Escarpé


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Critique disponible
            
Critique

En ce mardi 15 septembre, le coup d’envoi de la saison 2020-2021 du théâtre à Québec est donné, grâce à Manque(s), une proposition tout aussi douce que singulière, du Théâtre Escarpé, présenté par Premier Acte. Le spectacle de type parcours théâtral s’avère plutôt efficace pour apprivoiser la nouvelle réalité des arts vivants.






Crédit photos : David Mendoza Hélaine

Bien distanciés, les spectateurs masqués (le couvre-visage est fortement recommandé, même si l’on demeure à l’extérieur), réunis par petits groupes, circulent autour de Premier Acte – stationnement adjacent, parc Lockwell, ruelle – et assistent à quatre tableaux sur le thème de l’absence et de son inconfort. Inspirés par le début de cette année 2020 qui fut tout sauf ordinaire, les six auteurs creusent la question au travers de simples réflexions, d’éveil motivationnel, de perte et de questionnements personnels et identitaires.

Tous les tableaux sont portés par une bande sonore narrée (peu de scènes, d’ailleurs, réunissent le comédien à sa propre voix), dans une mise en scène relativement minimaliste signée Samantha Clavet. Cependant, l’espace est superbement occupé grâce à des scénographies plus ou moins élaborées.

Manque(s) du Théâtre Escarpé accomplit sa mission de rétablir le contact entre la population et les arts vivants, qui ont certainement manqué à bien des gens au cours des derniers mois.

Le plus complet des tableaux s’avère être le deuxième, intitulé Mi-figue, mi-raisin, écrit à quatre mains (Nicola Boulanger et Edwige Morin) et joué dans les escaliers de secours sur le côté sud de l’immeuble Frédéric Bach. Les spectateurs font d’abord la connaissance d’une jeune femme de type survivaliste qui fermera bientôt la porte de son bunker pour protéger la vie de son enfant. Habits protecteurs, gants, elle veut pourtant que la journée soit parfaite avant de se fermer au monde. Son dernier message aux spectateurs, sur carton blanc, vient chambouler tout son monologue, créant un flou entre le personnage et la comédienne. Au deuxième étage, une femme espionne une passante postée devant l’épicerie. Elle raconte ses faits et gestes avec poésie, tout en ajoutant une parcelle d’entomologie. Le témoignage du garçon du troisième, antisocial, agoraphobe et mysophobe, fait un réel écho à l’actualité, alors qu’il décrit une virée nocturne jusque sur l’autoroute, à pied, alors que personne ne circule, que la ville est enfin déserte, laissée à elle-même, grâce au confinement. Un réel instant de bonheur à l’extérieur des quatre murs de son appartement. Samuel Bouchard, Edwige Morin et Catherine Simard (et les voix de Nicolas Boulanger, Samantha Clavet, Marina Harvey et Edwige Morin) se démarquent dans une scéno de Dominique Giguère.

Dans le parc, en face, sous des cordages tissés rappelant grossièrement une toile d’araignée géante, s’affaire Samantha Clavet. Elle joue Geneviève, une femme qui laisse des messages sur la boîte vocale de sa grand-mère Renée, une ancienne nageuse décorée, que l’on devine atteinte d’Alzheimer ou de démence. Geneviève relit les cartes postales, les mots que sa grand-mère chérie lui a laissés au cours de sa vie, ainsi que les articles de journaux relatant ses exploits, qu’elle épingle ensuite aux fils qui pendent. Devenir la mémoire de sa grand-maman tout en sentant que cette femme forte lui échappe de plus en plus. Ressentir profondément son absence, même si elle est encore physiquement présente. Le corps de la comédienne réagit aux propos du personnage (voix de Catherine Simard), rappelant la danse contemporaine, s’accrochant parfois aux cordages comme à ceux d'un voilier en mer (conception Geneviève Bournival, qui signe aussi le texte). Ce tableau, un brin long, s’avère pourtant le plus poignant, malgré l’environnement bruyant causé par les voitures qui roulent sur Salaberry.

Le premier et le dernier tableau se révèlent un peu plus anecdotiques, mais somme toute divertissants. Dans Cul-de-sac, un homme (Paul Fruteau de Laclos) au volant d’une voiture remplie de ballons, de jouets et d’objets divers (scéno Dominique Giguère) se questionne sur l’impact des prénoms sur la vie de quelqu’un. Et plus il réfléchit, plus il s’interroge sur son sentiment personnel d’insuffisance. Est-ce possible de vivre que pour soi, alors qu’on existe et on se définit souvent par les autres ? Gabriel Simard signe ici texte et voix. Dans De l’importance de se brosser les dents de David Boily et Paul Fruteau De Laclos, un jeune homme qui tente de s’endormir après avoir avalé un sac de croustilles ouvre finalement la télé et regarde une entrevue avec un émule de Laurent Duvernay Tardif (à l’effet plutôt comique). Un moment télévisuel qui semble le marquer profondément : just do it, comme le clame le faux LDT. Si lui le peut, pourquoi pas le reste de l’humanité ? Durant tout ce temps, en opposition, un homme juché sur un conteneur médite, va au travail et s’entraine au saut à la corde. Sa situation en hauteur devient un symbole d’élévation dans la société, alors que le premier, recroquevillé dans son petit appartement et son lit une place, reste cloitré devant sa télé. David Boily et Nicola Boulanger jouent les deux hommes, David Boily, Paul Fruteau De Laclos et Anne-Justine Guestier prêtent leurs voix aux personnages.

La comparaison avec Où tu vas quand tu dors en marchant est presque inévitable. Cet événement du Carrefour devenu incontournable à Québec met la barre haute aux autres spectacles du même genre. Néanmoins, Manque(s) du Théâtre Escarpé accomplit sa mission de rétablir le contact entre la population et les arts vivants, qui ont certainement... manqué à bien des gens au cours des derniers mois. Sans prétention, ce parcours théâtral s’avère parfois drôle, parfois touchant, mais fort sympathique.

15-09-2020



Premier Acte
870, de Salaberry
Billetterie : 418-694-9656
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