Au carrefour de la danse et du théâtre, L'ÉVEIL écrit avec le corps et bouge avec la parole. Célébration des premières fois, le spectacle est construit sous forme de cartes postales : bribes, pulsions, instants de vie sans plus de mise en situation, pas d'avant ni d'après, seulement le présent avec l'adolescence comme point d'ancrage. Il témoigne de l'intensité d'un âge qui, si tout y est à la fois inconnu et possible, nous définit pour le reste de nos jours.
Librement inspiré de L'éveil du printemps de Frank Wedekind écrit en 1881, la proposition fait état de l’éveil des sens, des émotions, de tout, de nous, seul, mais surtout de nous ensemble : de tout ce que nous sommes, de qui nous sommes, de qui nous voulons être, de ce qui nous entoure et de ceux qui nous entoure.
Une aire gazonnée, 3 garçons, 3 filles. Ensemble, ils refont le monde, comme on pense être capable de le faire lorsque l'on est adolescent. Célébration de la vie et de ses aléas, L'ÉVEIL est une ode à l'adolescence, mais aussi à l'âge adulte, à celui ou celle que nous sommes devenu à travers les grandes émotions des premières fois et de la rencontre des autres et de nous-mêmes.
Section vidéo
Conseil au décor Christian Fontaine
Musique Josué Beaucage
Vidéo Eliot Laprise
Costumes Sébastien Dionne
Éclairages et direction technique Antoine Caron
Crédit photo Daniel Richard
Discussion avec les artistes après la représentation du 2 octobre.
Coproduction Le Fils d'Adrien Danse et Théâtre Les Enfants Terribles
Présentation de La Rotonde
Présentée en première mondiale aux plus récents Coups de théâtre 2014 il y a près d’un an, la pièce hybride L’Éveil s’installe pour quelques jours au Théâtre Périscope. Coproduction de la compagnie Le Fils d'Adrien Danse et du Théâtre Les Enfants Terribles, L’Éveil explore, par l’entremise de tableaux joués et dansés, l’essence même des émois et des premières fois de l’adolescence, dans toute sa furie, son amour, sa tendresse, sa beauté, ses espoirs, sa maladresse, son obsession et son besoin inéluctable de liberté. C’est l’éveil de la conscience, des désirs, c’est l’émancipation, c’est la révolte, c’est la quête de sens, d’un moi chez l’autre et de l’autre chez moi.
Par l’entremise de sept tableaux, le spectateur est aspiré au cœur du cercle que forment six amis, interprétés par les danseurs et comédiens Jean-François Duke, Gabriel Fournier, Odile-Amélie Peters, André Robillard, Claudiane Ruelland et Ariane Voineau. Courant à en perdre haleine sur un tapis gazonné, encadrés par des lampes de studio de photographie, ils sont enivrés du bruissement des salopettes d’hiver et des jeux d’enfants, aussi violents que joyeux, qui les unissent encore, se promettant une amitié indéfectible. Puis, le groupe évoluera, découvrant l’attirance vers l’autre, les crises impulsives, la découverte de nouvelles frontières à explorer, le deuil de certains endroits de leur jeunesse – une plage où on ne reviendra plus - ou de projets et de rêves avortés, les songes pornographiques dans lesquels on s’abandonne à l’autre, pleinement, l’appel
vers l’ailleurs et les choix déchirants.
Sur une magnifique trame sonore éclatée et éclectique de Josué Beaucage, où se chevauchent les créations acoustiques ou électroniques et les mélodies classiques, dont La danse des chevaliers de Prokofiev – le remix dansant est absolument fantastique -, les six interprètes dansent avec ferveur, puissance et grâce, tout en enjoignant à leurs gestes un chaos maîtrisé et une certaine lourdeur, comme s’ils commençaient à percevoir le poids du monde, leur côté minuscule dans l’immensité de l’univers. Les chorégraphies d’Harold Rhéaume, qui empruntent ici à la danse contemporaine, là au ballet classique, viennent affirmer clairement et concrètement les émotions ressenties. L’un des duos, simplement éclairé par un projecteur, qui symbolise avec beauté le sentiment amoureux et la séparation, sera d’ailleurs l’un des moments forts de la soirée, tout comme la scène qui précède, voyant le personnage d’André Robillard voler de ses propres ailes et déménager à Montréal, aidé par sa mère, émotive, évoquée par une simple paire de souliers rouges ; un moment touchant et vrai. La prose, concoctée par les auteurs Marie-Josée Bastien et Steve Gagnon, est tout aussi poétique, viscérale, humoristique qu’ancrée dans la réalité.
Si le spectacle prend parfois des allures d’autoproduction, alors que les interprètes adaptent constamment l’éclairage autour d’eux, il propose aussi, sur un écran géant placé en arrière-scène, des séquences vidéo saisissantes par leurs qualités visuelles et son montage impeccable. Les images de ville, de forêt, ou simplement des comédiens en action, viennent faire éclater l’espace, transcender les frontières physiques du théâtre pour nous transporter ailleurs, ou rendre encore plus tangibles les sentiments des protagonistes.
Si certains jeunes spectateurs auront peut-être plus de difficulté à apprécier les scènes dansées, habitués aux spectaculaires et symétriques chorégraphies à la Beyoncé ou à la DM Nation, ce seront les membres un peu plus âgés du public qui savoureront pleinement ces moments, déchiffrant sans effort chaque geste, saisissant chaque parcelle d’émotion, forts de leurs expériences de vie.
À admirer, en sortant de la salle, quelques dessins de l'excellent Francis Desharnais, inspirés par le spectacle.