Espace GO,
1er juin à 18 h 30 et 21 h / 2 et 3 juin à 12h 30, 15 h 30, 18 h 30 et 21 h / 4, 5, 6 et 7 juin à 18h et 20 h 30
Fantasmagories technologiques I, II, III
UBU (Montréal)
Première montréalaise
Repoussant les limites du théâtre, le brillant metteur en scène et illusionniste Denis Marleau propose une aventure visuelle, sonore et textuelle en trois « fantasmagories technologiques » : Dors mon petit enfant de Jon Fosse, Comédie de Samuel Beckett et Les Aveugles de Maurice Maeterlinck. Réunis pour la première fois à Montréal, ces spectacles à la fois troublants et fascinants, produits par des acteurs qui rayonnent par leur absence, nous laisse suspendus au pays des spectres. À voir toute affaire cessante sur la scène de l’Espace GO du 1er au 7 juin.
Le spectateur est invité à entreprendre ce voyage au pays de l’absence en se déplaçant dans trois espaces différents du théâtre. Bien qu’elles empruntent des formes plus associées aux arts visuels et à l’installation vidéo, ces expérimentations demeurent des œuvres théâtrales liées au parcours de metteur en scène de Marleau, qui aborde une fois de plus la scène comme un « lieu d’étrangeté ». Avec ses projections des visages des comédiens Céline Bonnier, Ginette Morin et Paul Savoie sur des masques, le souvenir du vivant épouse la matière et naît alors un théâtre qui renvoie le spectateur à l’émouvante fragilité de la vie.
Dors mon petit enfant de Jon Fosse — La blancheur des limbes. Trois petits êtres parlementent doucement. Où sont-ils ? Dans la blancheur des limbes ? Tout juste avant ou tout juste après la vie ? L’un d’eux dit : « J’ai toujours été ici / même quand je n’étais pas ici / j’étais ici ». Dans ce lieu sans portes ni fenêtres, où le temps n’existe pas, ils sont plutôt bien. Et s’ils étaient nulle part, mais que nulle part n’existait pas ? Et s’ils étaient à l’intérieur de l’amour ?
Courte pièce cristalline écrite en 2000 nous entraîne dans les méandres métaphysiques de l’auteur norvégien Jon Fosse, lesquelles évoquent ici un état de plénitude flottant entre l’existence et son contraire, qui ne serait pas la mort mais le début de tout. Depuis sa première pièce de théâtre,
Et jamais nous ne serons séparés (1994), Fosse poursuit une écriture simple, minimaliste et répétitive, mais presque baroque dans la multiplication et la transformation infinie de ses motifs, captant ainsi les pensées intimes et les soubresauts des sentiments. Il est aujourd’hui l’une des figures de proue de la dramaturgie contemporaine européenne.
Comédie de Samuel Beckett — Les choses risibles de la vie. Un mari, sa femme et sa maîtresse. Un vaudeville sans portes ni placards, avec jarres géantes où les corps se planquent et se cachent, ne laissant que la tête pour tout dire. Tous les clichés des affaires de cœur s’immiscent dans leurs étranges soliloques croisés. Manipulés et revus par Beckett, leurs mots s’emballent et laissent percevoir dans des clairs-obscurs orchestrés la solitude des êtres, à travers les choses risibles de la vie et de l’amour. Avec ses projections de visages sur des têtes inertes, le souvenir du vivant illumine la matière et fait naître un théâtre fantomatique qui nous redit la précarité de la vie.
« Est-ce de la vie, est-ce de la vision ? Les physionomies bougent, les voix psalmodient, c’est du Beckett à l’état pur. »
— Georges Banu, Artpress, Paris.
Les Aveugles de Maurice Maeterlinck— La forêt entre chien et loup. Six visages de femmes et six visages d’hommes surgissent de l’obscurité. Leurs regards ne se croisent pas, ne portent sur rien. Ils sont tous aveugles. Immobilisés dans une forêt obscure où ils s’étaient assoupis, ils attendent leur guide. Alors ils se parlent pour meubler l’angoisse, pour s’assurer qu’ils ne sont pas seuls. Ils écoutent, avec peur ou avec espoir, les bruits qui émergent du noir autour d’eux. Leur guide ne répond pas, ne répond plus. Ces aveugles, ne sachant plus s’il fait jour ou nuit entre la vie et la mort, se sentent abandonnés.
Créé au Musée d’art contemporain de Montréal, puis invité au Festival d’Avignon et au Festival d’Édimbourg en 2002, Les Aveugles a été présenté en tournée sur quatre continents. En 2002, le spectacle a reçu le Prix de la meilleure production de Montréal de l’Association québécoise des critiques de théâtre.
« …Beau, mystérieux, soufflant. »
– Michel Cournot, Le Monde, Paris.
Parcours, Créations – Merz Opéra, Oulipo Show, Les Ubs, Roberto Zucco, Maîtres anciens, Les trois derniers jours de Fernando Pessoa, Catoblépas, Nous étions assis sur le rivage du monde... Depuis leurs débuts respectifs, des affinités électives unissent le FTA et le metteur en scène, adaptateur et maintenant scénographe Denis Marleau. Depuis 1997, ce dernier intègre également la vidéo au service du personnage, et a donné vie de cette manière inventive et fascinante à Pessoa et à ses hétéronymes ainsi qu’aux songes et aux fantômes de Faust. Denis Marleau est directeur artistique du Théâtre français du Centre national des Arts à Ottawa depuis décembre 2000.
Les Aveugles,
crédit photo : Richard-Max Tremblay
Dors mon petit enfant (gauche), Comédie (droite)
crédit photo : Richard-Max Tremblay (gauche), Maryse Boulanger (droite)
Conception et réalisation : Denis Marleau; Collaboration artistique : Stéphanie Jasmin;
Équipe de création : Angelo Barsetti, Yves Labelle, Pierre Laniel Michel Pétrin, Claude Rodrigue, Nancy Tobin
Dors mon petit enfant : Texte : Jon Fosse ; Traduction : Terje Sinding
Avec : Céline Bonnier ; Ginette Morin, Paul Savoie
Coproduction : UBU; Théâtre français du Centre national des Arts et Manège scène nationale de Maubeuge
Comédie : Texte : Samuel Beckett
Avec : Céline Bonnier ; Ginette Morin, Paul Savoie
Coproduction :UBU; Théâtre français du Centre national des Arts et Manège scène nationale de Maubeuge
Les Aveugles: Texte : Maurice Maeterlinck
Avec : Céline Bonnier ; Paul Savoie
Coproduction :UBU; le Musée d’art contemporain de Montréal et le Festival d’Avignon
Espace Go
4890, boul. Saint-Laurent – métro Laurier
1er juin à 18 h 30 et 21 h / 2 et 3 juin à 12h 30, 15 h 30, 18 h 30 et 21 h / 4, 5, 6 et 7 juin à 18h et 20 h 30
En Français (sauf le 5 juin en anglais) / 1 h 40 / admission générale
Tarif régulier : 30$ / 25 ans et moins, 65 ans et plus : 20$
par Mélanie Viau
Une expérience d’une particularité somme toute désarmante que nous fait vivre Denis Marleau dans ses Fantasmagories I, II, III. En illustre illusionniste, ce grand metteur en scène de chez nous nous entraîne aux confins de l’Absence; l’absence lucide, vécue, l’absence de soi, l’absence de l’Autre, dans un espace-temps en dehors de son concept, où les acteurs brillent par leur propre immatérialité dans le corps objet de personnages tout en langage et en abstraction. Trois univers distincts édifient le triptyque (présenté en trois installations technologiques dans diverses salles du théâtre Espace Go), soit ceux des auteurs dramatiques Jon Fosse, Samuel Beckett et Maurice Maeterlinck, pour créer une oeuvre monstre, d’une cohérence parfaite entre le fond et la forme, d’une charge intellectuelle extrêmement dense et d’une acuité sensitive palpable en constante stimulation. Alliant théâtre, vidéo, cinéma, arts visuels et performance, ce spectacle capture physiquement son public dans cet état d’étrangeté où l’on se met à douter de notre réalité. Nul doute qu’il mérite une étude pointue des sphères qui régissent ses thématiques à différents égards, entre autres la métaphysique, la psychanalyse, l’esthétique et même la spiritualité et la sociologie. De quoi faire travailler activement pendant une heure trente les deux hémisphères de votre cerveau.
La première fantasmagorie, Dors mon petit enfant, nous ouvre un espace où trois êtres demeurent assis, côte à côte, en dehors de leur être, dans un espace où l’illimité suppose un ailleurs concret, où le temps s’explique par sa négation, par la fusion de toutes ses temporalités. Trois petites poupées blanches, animées des visages fantomatiques de Céline Bonnier, Ginette Morin et Paul Savoie, trois objets vivants discutent, captivant notre regard, provoquant parmi les spectateurs des rires nerveux tant le choc des apparitions nous déstabilise dans notre perception de l’immédiat. Mais de quoi est-il question dans toute cette plénitude inquiétante, cette blancheur, ce vertige ? Le vivant dans son idée et ses phénomènes ? La Création ?
Déplacement du public vers Beckett et sa Comédie. Le corps emprisonné dans une jarre, trois personnages d’un triangle amoureux expient, par une logorrhée verbale d’une rapidité étourdissante (étouffante à en donner le hoquet !), leur surmoi dans une anecdote d’adultère où chacun se trouve dépossédé de soi dans l’absence de l’objet de leur désir égoïste et blessé. Toujours par procédés de visages projetés sur têtes de mannequins, l’effet donné colle à l’esthétique minimaliste de Beckett, rappelant ses fameux personnages dissolus de leur corps tels que Winnie de Ô les beaux jours, tels que les habitants stoïques des poubelles de Fin de Partie.
La profonde solitude émanant des personnages trouve son apogée dans la pièce Les Aveugles. Douze têtes perdues gravitant dans l’air, douze hologrammes spectraux (dont les rictus accentuent leur intériorité visible) créent une atmosphère des plus angoissantes où le sentiment d’isolement s’étend et se propage dans l’espace éclaté.
Certes, nous en sortons ébranlés, confus, excités intellectuellement, mais il faut noter qu’avec un spectacle aussi complexe qu’abstrait, il nécessite peut-être (et malheureusement ?) une étude préliminaire pour arriver à bien se situer au travers des leitmotivs partagés des auteurs. Soit. Mais peu importe, l’ingéniosité de l’exploration scénique, la finesse d’esprit et la féerie de l’évènement en valent largement le coup !
01-06-2007
Rouge décanté
Mnemopark
Frank Ketchup
CHS
Life Is But A Dream #1
The Eco Show
Famous Puppet Death Scenes
Lipsynch
Hey Girl !
Source
: www.fta.qc.ca